Par Françoise Solliec
Ce 1er avril, une quinzaine de représentants des 19 organisations et des premiers signataires de l’appel « Projet de programmes de l'école primaire : copie à revoir ! » présentaient leurs analyses à la presse, en attendant de rendre publiques les réponses des collègues aux questions posées par le ministère, dans une consultation très controversée.
« Les enseignants du primaire se sentent remis en cause »
Pour Gilles Moindrot, secrétaire général du Snuipp, qui introduisit la conférence de presse, il est important de noter la diversité des signataires de l’appel, « Projet de programmes de l'école primaire : copie à revoir ! » : organisations syndicales, mouvements pédagogiques et d’éducation populaire, anciens responsables de l’éducation nationale, chercheurs, parents d’élèves, etc. « C’est un sujet d’importance » déclare-t-il, faisant référence aux 5854 signatures enregistrées à ce jour, à l’analyse commune rédigée par les orgnaisations et aux très nombreuses réactions publiées ces dernières semaines, auxquelles le Café pédagogique a d’ailleurs consacré un dossier spécial.
Les différentes interventions relèvent le manque d’ambition patent du projet de programme, qualifié dans la pétition comme « marqué par l’inadaptation des contenus, par un affaiblissement de leur dimension culturelle et par une conception mécaniste des apprentissages ». Philippe Joutard, Roland Charnay et Rémi Brissiaud, entre autres, sont revenus, exemples à l’appui, sur l’alourdissement des programmes, le transfert de nombre de notions du collège à l’école primaire et du CP à la maternelle. Ce projet de programmes présente, selon les intervenants, un fort déséquilibre entre des activités de mémorisation et d’entraînement, d’une part, et des activités de découverte favorisant l’épanouissement de l’élève, d’autre part. Gilles Moindrot pointe ainsi la place consacrée dans le projet aux activités de grammaire (120 lignes) à comparer à celle qu’occupe une activité, pour lui fondamentale, la rédaction d’un texte cohérent (5 lignes). En s’élevant contre les propos tenus par les ministre à destination des familles « les enfants ont besoin de mécanismes, d'automatismes, d'entraînements », pour justifier un retour à des méthodes traditionnelles, Rémi Brissiaud rejoint le sentiment, largement exprimé chez les signataires de l’appel, que ce projet met à mal la liberté pédagogique. Les organisations syndicales regrettent vivement que le projet de programme ne soit pas accompagné de grilles horaires, en s’inquiétant de la restriction probable des activités sportives ou artistiques et que tous les efforts pour mettre en place les liaisons école–collège ou maternelle-élémentaire semblent totalement ignorés
Ainsi que le remarquait Patrick Picard dans l’éditorial de l’Expresso du 1er avril, la consultation organisée par le ministère dans les écoles apparaît aussi sujet de controverse et de tension. « Nous avons demandé à plusieurs reprises à ce que les réponses des collègues au questionnaire du ministère soient rendues publiques », nous déclare Gilles Moindrot, « mais nous n’avons eu aucun retour là-dessus. Nous avons donc demandé aux collègues de nous les remonter ». Même si les questions du ministère sont jugées très mal posées, comme celle concernant la clarté et la précision du projet, le Snuipp entend bien, pour sa part, publier « d’ici quelques jours » les réponses qu’on lui aura fait parvenir. « Les enseignants se sentent complètement remis en cause par l’avalanche de mesures qui les atteignent depuis quelques mois (la suppression des heures du samedi matin, l’organisation des stages pour les élèves de cours moyen, le discours sur les mauvais résultats de l’école…) », poursuit-il. « Nous souhaitons recueillir un maximum de signatures et demander d’ici peu un rendez-vous au ministre. Les vacances de printemps vont compliquer un peu notre travail, mais nous le poursuivrons durant ces congés, pour aboutir à un calendrier d’actions début mai ».