Les syndicats face à la nouvelle évaluation 

Par François Jarraud



Les syndicats d’enseignants d’abord, ceux des cadres éducatifs ensuite, ont manifesté leur opposition à la réforme.


"Totalement inacceptables", pour le Snes, le Snep et le Snuep, les projets de texte sont vivement critiqués. " Ce qui deviendra de fait premier, ce n’est plus le cœur du métier, la capacité de l’enseignant à faire acquérir savoirs et compétences à ses élèves, mais tout ce qui est périphérique à l’acte d’enseigner", écrit le Snes. "Cela changera le sens du métier d’enseignant mais aussi le rôle de l’Ecole envers les élèves, dans la mesure où l’appropriation et la maîtrise de savoirs, l’acquisition de compétences seraient minimisées". Le syndicat fait allusion au fait que l'inspection n'évaluera plus. Il dénonce aussi "le gel des promotions jusqu'en 2015" du fait du changement de système d'avancement.


Interrogé par le Café, Guy Barbier du Se-Unsa, estime ces textes "pas acceptables". "On est attaché au regard croisé IPR - chef d'établissement. Ce dernier a son mot à dire dans certains aspects mais le regard pédagogique ne peut venir que de l'inspection. Comment le chef d'établissement pourrait-il apprécier les compétences disciplinaires comme le demande le texte ? C'est aberrant". Le Se-Unsa rappelle quand même les défauts du système actuel : irrégularité des inspections, absence de critères objectifs et connus.


Le Sgen "salue la disparition de l'inspection individuelle" et demande de "déconnecter la question de l'évaluation des modalités d'avancement.. Il est inacceptable qu'avec le nouveau système les personnels soient perdants dans le déroulement de leur carrière".

 

"On prend le problème à l'envers", affirme Philippe Tournier, secrétaire général du Snpden, le premier syndicat des chefs d'établissement, interrogé par le Café. "Le ministère met en avant une évaluation qui présuppose une évolution du métier qui n'a pas eu lieu. On demande d'évaluer un métier au contenu non défini. C'est difficile !".


"Que ce soit le rôle de la direction d'évaluer les personnels du point de vue de leur contribution au collectif ce n'est pas scandaleux", ajoute-il. "En revanche cette évaluation ne peut pas aller sur les aspects disciplinaires. Un chef d'établissement n'est pas en mesure de juger un cours de maths par exemple". Quant à l'évaluation à partir des progrès des élèves, P Tournier estime que "ça n'a ni queue ni tête". "Pourquoi les élèves d'une classe progressent-ils en maths ? Parce qu'ils ont de bonne s bases ou à cause de leur professeur ? On ne peut pas mesurer l'impact individuel sauf cas extrêmes. Une vraie modernisation ce serait de réaliser que la dynamique de progrès des élèves est collective. On peut concevoir et mesurer ce progrès collectif. On peut savoir si un établissement fait avancer ses élèves". Un débat que le Snpden entend faire remonter vers la rue de Grenelle.


"L'administration ne sait pas où elle va", craint Patrick Roumagnac, secrétaire général du SIEN, principal syndicat des inspecteurs de l'éducation nationale. Il nous confie reconnaître un aspect positif au texte : "en finir avec l'infantilisation de la note". Mais, "le plus gros problème c'est la non prise en compte des compétences disciplinaires, ce qui ne remet pas en cause l'importance du regard du chef d'établissement dans le second degré. Un autre point noir c'est la nouvelle grille d'avancement qui ramène la quasi totalité des enseignants au rythme de l'ancienneté actuelle".


Peut-on évaluer un enseignant sur les progrès des élèves ? "C'est aberrant", nous répond P Roumagnac. "Cela ne tient aps compte du contexte . Ce qui pos eproblème c'est la centration du acteur individuel. Il faut arriver à évaluer la prise de conscience de l'enseignant des possibilités de traiter les choses différemment en confiance. Pour que l'entretien ait du sens il faudrait qu'il ne soit aps la seule forme d'évaluation. Sinon on risque d'avoir des entretiens bien préparés où l'enseignant ne dit rien de ses difficultés ou de ses doutes".


Les inspecteurs du SIA en colère

"En appliquant des principes de gestion simplistes et inadéquats au champ pédagogique, on tombe dans l’absurdité. L’évaluation dans le second degré repose sur une expertise disciplinaire que possède un IA IPR recruté dans le corps de plus haut niveau des professeurs, celui des agrégés et formé pour cela. Faute de s’appuyer sur cette compétence, seule reconnue des professeurs, et malgré le subterfuge que constitue l’introduction d’une pseudo « autoévaluation », on aboutira à l’arbitraire dans la notation et l’avancement  des enseignants", écrit le Syndicat des inspecteurs d'académie (SIA), une organisation qui représente 21% des IA-IPR.


"Cette disposition due à la volonté de transposer sans discernement un modèle de gestion des personnels de l’entreprise est à l’évidence un mauvais coup porté à la qualité du système éducatif. Alors même qu’il faut mettre en cohésion des équipes pédagogiques, cela engendrera des difficultés relationnelles au sein de l’établissement, une dégradation du climat de travail et un appauvrissement de la qualité des contenus d’enseignement qui ne seront plus expertisés... Sans risque de se tromper, on peut affirmer que les actuelles faiblesses de notre école s’aggraveront de façon importante".


Le SIA souligne également que le projet de décret sur la nouvelle gouvernance qui concerne au premier chef les inspecteurs "n'a jamais été soumis à concertation". Il dénonce "un dévoiement libéral extrêmement dangereux pour l'école".


Vers une grève unitaire le 15 décembre

L'intersyndicale du second degré s'est réunie le 17 novembre. Elle se reverra le 21 au même moment qu'une réunion de l'intersyndicale du premier degré. On s'achemine bien vers une grève unitaire.


"On a une analyse commune sur la méthode et le fond de ces textes", nous dit Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes, à la sortie de la réunion de l'intersyndicale du second degré, faisant allusion au décret et à l'arrêté sur l'évaluation des enseignants publiés le 15 novembre par le Café. L'intersyndicale réunit les syndicats Fsu (Snes, Snep, Snuep), le Sgen, le Se Unsa, FO, le Snalc, Sud et la Cgt. "C'est une vision inacceptable de l'éducation qui se dessine". L'intersyndicale a décidé la diffusion d'une pétition commune lundi 21. "L'appel à la grève se dessine", nous dit F. Rolet et devrait être décidé lundi. L'intersyndicale a lancé un appel pour une action commune à l'intersyndicale du premier degré.


Selon Sébastien Sihr, secrétaire général du Snuipp, l'intersyndicale du premier degré (Snuipp, Se Unsa, Sgen) se réunira effectivement lundi. "On pense que le sujet, c'est à dire l'annonce de nouvelles suppressions de postes, les 3000 Rased dans le viseur, les salaires et la nouvelle évaluation des enseignants, est de nature à amener une réaction commune face au torpillage de l'école".



Article du SIA

http://www.syndicat-ia.fr/actualites/2011/evaluation_r[...]

Les projets de textes sur l'évaluation des enseignants

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/11/15112011Accueil.aspx



Sur le site du Café

Par fjarraud , le dimanche 20 novembre 2011.

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