Budget : A peine voté, déjà raboté... 

Par François Jarraud



Les députés ont adopté le 10 novembre le budget 2012 de l'éducation nationale. Un budget en baisse réelle et qui a fait l'objet, au dernier moment, d'un ultime coup de rabot gouvernemental.

 

Valérie Pécresse, ministre du budget, a eu fort à faire pour défendre le budget de l'éducation nationale. Un budget en apparence stable à 61 milliards , en réalité en baisse compte tenu de l'inflation. La ministre a rappelé quelques engagements présidentiels : "comme le Président de la République en a pris l’engagement, le nombre de classes dans le primaire est désormais stabilisé... Nous sommes aujourd’hui en mesure de redéployer des moyens vers des points plus fragiles du système scolaire. Je pense au recrutement de 4 000 assistants administratifs des directeurs d’écoles primaires.. Je pense également au recrutement des assistants de scolarisation qui permettent d’accueillir et d’accompagner les élèves en situation de handicap. Nous poursuivrons les progrès que j’évoquais à l’instant grâce au recrutement de 2 000 assistants à la rentrée 2011 et de 2 300 autres à la rentrée 2012". Elle a pourtant demandé une diminution de 20 millions au nom des dernières mesures d'austérité Fillon. Ces 20 millions sont pris quasi-exclusivement sur des dépenses sociales : bourses des collèges et lycées (11M), les fonds sociaux du programme « Vie de l’élève »(2M), au motif que les crédits seraient sous-utilisés.


Le budget a été vivement critiqué par Marie-Hélène Amiable (groupe GDR). "Peu vous importe que la suppression de 80 000 postes depuis le début de la législature fasse du taux d’encadrement français le plus faible de l’OCDE, qu’entre 2000 et 2010, la scolarisation des moins de trois ans soit passée de 34,5 % à 13,6 %, que la remédiation de la difficulté scolaire et les adultes entourant les élèves dans les établissements aient quasiment disparu, que le dispositif de remplacement des enseignants soit exsangue alors que l’éducation nationale compte 32 000 précaires, que les déserts médico-scolaires se multiplient, que les enseignants ne soient plus formés et que leurs salaires, quoi que vous en disiez, aient reculé entre 2000 et 2009. Peu vous importe que les crédits pédagogiques aient été divisés par treize au cours du quinquennat. Peu vous importe, enfin, la relégation dans laquelle sont maintenus l’enseignement professionnel et l’enseignement agricole".

Les débats

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/20[...]


Du coût de l'éducation aux coups du ministère...

" En 2007, comparativement à la moyenne de l'OCDE, pour un élève ou un étudiant, la France dépense 24%de moins pour les études primaires, 21%de plus pendant la durée des études secondaires et légèrement moins au cours des études supérieures (- 4 %). En 2009, au niveau national, l'État participe à hauteur de 60% de la dépense moyenne et les collectivités territoriales en financent près de 25 %. Dans la moyenne des pays de l'OCDE, contrairement à la France, ce sont les collectivités territoriales qui financent la plus grande partie de la dépense moyenne en 2007 (51 %), l'État central n'en finançant que 34 %." Ces informations sont communiquées par la dernière Note d'information du ministère de l'éducation nationale et elles sont scientifiquement établies. Ainsi la note affirme que "la France figure parmi les pays qui dépensent le plus  pour la scolarité d'un élève du secondaire" et que "au niveau de l'OCDE, les collectivités territoriales sont la source majeure du financement" de l'éducation. Deux idées fortement martelées par cette note et dont on devine sans peine la fonctionnalité.


Or comme toute vérité scientifique, elles restent à prendre avec précaution.  Un exemple ? Où faut-il investir et où faire des économies ? , puisque visiblement cette note prépare ce genre de décision. Investir au primaire et diminuer le budget du secondaire et surtout du lycée laisse entendre la Note. Oui mais depuis 1980, c'est justement au primaire que la dépense d'éducation ale plus augmenté (x 1,77 contre 1,65 au secondaire). Or la massification a porté sur le secondaire et il faudra toujours plus de moyens pour hisser les enfants de milieu défavorisé au bac que pour les enfants de la bourgeoisie... La comparaison entre les dépenses éducatives des collectivités territoriales entre pays de l'OCDE n'est pas opérante, la France restant un pays très fortement centralisé. La vérité c'est que celles-ci vont au-delà de leurs obligations quand l'Etat reste en-deçà.


Ajoutons que la Note gomme des statistiques gênantes. Ainsi la part de l'Etat dans la dépense intérieure d'éducation (DIE) est passée de 56 à 52% depuis 2000 alors que celle des collectivités locales évolue de 21 à 25%. Ainsi l'évolution de la DIE dans le PIB français est passée de 7,6% en 1997 à 6,7 en 2008. Un point de PIB en moins en 10 ans quand même... On pourra donc considérer cette Note avant tout comme un instrument politique peut-être destiné à faire oublier certaines publications fracassantes de l'OCDE... Plutôt qu'opposer Etat et collectivités, primaire et secondaire, peut-être est-il plus sain de se demander comment financer les missions d'éducation qui aujourd'hui le sont mal : scolarisation des enfants de moins de 3 ans, des aides spécialisées, maintien des 150 000 décrocheurs etc.

La Note

http://media.education.gouv.fr/file/2011/69/2/DEPP-NI-201[...]



Dubet : 60 000 postes pour faire quoi ?


"Les 60 000 postes ne peuvent être justifiés que s'ils ouvrent le chantier d'une transformation de l'école, de sa structure et de la conception même du métier d'enseignant et de son service. Sans cette volonté et sans la capacité de placer le débat sur ce plan, la "pente naturelle" de l'évolution scolaire l'emportera et ce sera, avec ou sans 60 000 postes, dans le sens du pire pour tous ceux qui n'ont pas eu la chance de naître du côté des vainqueurs". Dans une tribune donnée au Monde le 1er novembre, François Dubet revient sur la question des 60 000 postes que F Hollande promet de créer dans l'Education nationale.


"Si les moyens consistent à continuer en plus grand ce qui ne fonctionne déjà pas, ils seront inutiles et un nouveau prétexte à désespérer de l'école", ajoute-il. "A quoi sert-il de mettre plus de moyens dans les zones sensibles alors que l'on ne parvient pas à y stabiliser les équipes éducatives ? A quoi sert-il de diminuer le nombre des élèves par classe si c'est pour y utiliser plus intensément des méthodes qui ne fonctionnent guère ?". Le sociologue invite à "arbitrer en faveur de l'école élémentaire et du collège, et surtout de leur rapprochement progressif autour de la conception d'une école commune à tous les jeunes Français". Des idées déjà avancée le 28 octiobre au colloque Education en crise.

La tribune

http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/11/01/pour-une-ec[...]

Le colloque Education et/en crise

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/10/31102[...]


Le Royaume-Uni se prépare à des coupes budgétaires historiques dans l'éducation

Selon l'Institute for Fiscal Studies, les coupes budgétaires décidées par la coalition conservateurs - libéraux au pouvoir seront "historiques". Ce seront les plus importantes depuis les années 1950. L'IFS a calculé que les mesures déjà prises conduiront à une réduction de 13% du budget de l'éducation d'ici 2014, soit -3,5% par an en moyenne. La rupture est donc totale par rapport aux travaillistes qui avaient régulièrement augmenté le budget de l'éducation. Les coupes vont frapper essentiellement la scolarité non obligatoire (après 16 ans et avant 6) et les salaires des enseignants.

Etude

http://www.ifs.org.uk/pr/bn121_pr.pdf



Sur le site du Café

Par fjarraud , le dimanche 20 novembre 2011.

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