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À la Une : Actualités : Vers de nouveaux programmes, rencontre avec Christian Couturier, secrétaire national du SNEP 

Par Antoine Maurice



Au moment où la question des programmes est au cœur de la loi de refondation sur l’école, le SNEP a interpelé ses adhérents pour connaître leur rapport avec les programmes existants. Justement, qu’en est-il ? Quels sont les enjeux de ces derniers ? Logiquement, nous avons voulu en savoir un peu plus sur ces questions, Christian Couturier, secrétaire national a bien voulu répondre à nos questions.


Le SNEP a réalisé au mois de novembre une enquête sur le rapport des enseignants aux programmes disciplinaires. Pourquoi ?

C CouturierPlusieurs raisons conjuguées. D’abord parce que l’actualité l’imposait. Le Conseil supérieur des programmes, mis en place par la loi de refondation de l’Ecole, travaille depuis quelques mois et doit produire à terme une refonte du socle commun et des programmes disciplinaires. Comme tout le monde l’a souvent constaté, chaque nouvelle réflexion institutionnelle sur ce sujet oublie systématiquement 2 choses : faire un bilan de l’existant et s’appuyer sur l’expertise professionnelle. Tout se passe toujours comme si les enseignants n’avaient pas droit à la parole et n’étaient là que pour appliquer des textes pensés par d’autres. Nous avons décidé de leur donner la parole, cette enquête étant une étape. Ensuite, parce que beaucoup de choses se disent dans les formations* par certains membres du corps d’inspection et plus généralement par tous ceux qui ne nous veulent pas du bien… Par exemple : « que le SNEP ne comprend rien, qu’il est éloigné de la profession, qu’il ne représente personne »… Nous avons donc voulu vérifier !

Enfin, parce que l’an dernier, avec l’avènement des référentiels DNB dans de très mauvaises conditions (application à la rentrée de textes publiés en fin d’année scolaire, pas de temps d’expérimentation, aucun débat sur les tenants et aboutissants, pas de mutualisation de l’existant…), la profession a fortement réagit. En tant que syndicat et organisation professionnelle (c’est notre spécificité), nous devions, non seulement relayer le mécontentement, mais proposer à la profession un rebond, mieux comprendre, analyser proposer…


Comment avez-vous procédé ?

Il faut savoir que ce genre d’initiative est pris par un collectif réunissant tous les militants académiques. Après l’organisation, l’an dernier, de nombreux débats dans toute la France autour d’un « manifeste » pour explorer toutes les questions posées par la mise en œuvre des programmes et certifications, nous avons décidé de proposer une enquête quantitative pour cerner les représentations des enseignants. Et, pour ne pas s’imposer un tempo trop long, nous avons proposé que l’enquête soit courte et facile à répondre, et soit inscrite dans un temps court (5 semaines en tout). Nous avons donc mis en ligne l’enquête, mais nous avons aussi utilisé une version papier pour qu’elle soit disponible lors de stages ou réunions professionnelles (UNSS…). En un mois, donc, plus de 4000 réponses (c’était l’objectif que nous avions fixé). Si nous avions continué, je pense que nous aurions été largement au-delà. Mais pour nous, y compris statistiquement, cela était suffisant. Seul le SNEP est aujourd’hui en capacité de réaliser un tel travail à cette échelle.

Concernant les questions, nous les avons travaillées de 2 façons. D’une part en évitant dans la question toute induction de la réponse, comme c’est souvent le cas. La première question était donc tout simplement : Êtes-vous satisfait-es des programmes ? Ensuite, nous avons proposé que l’échelle de satisfaction, là aussi contrairement à ce qui se fait souvent, oblige à prendre partie en positif ou en négatif. Nous avions fait l’hypothèse que sur une échelle normale, de 1 à  5 ou 1 à 10, pour aller vite, les collègues auraient tendance à répondre au milieu et ne pas trop se positionner. L’échelle de 1à 4 obligeait d’une certaine manière à se positionner plutôt en négatif ou plutôt en positif pour que nous ayons une indication plus précise.

Par ailleurs nous avons posé une question qui pouvait, ou pas, contredire la question précédente. C’est un procédé assez classique. Par exemple, en collège, alors qu’une majorité de collègues ont un regard plutôt positif sur les programmes, lorsqu’on leur propose de changer les programmes, ils répondent de la même façon que ceux qui ont un regard globalement négatif, en grande partie pour changer la classification. Donc, au-delà d’un positionnement plutôt pour ou plutôt contre, reflet d’une posture qui dépasse probablement la question des programmes proprement dits, on identifie des priorités, comme transformer les « compétences propres ».

Enfin, nous avons posé quelques questions ouvertes pour laisser cours à une parole « libre ». Cela va nous servir, en particulier pour la suite du travail.


Quels résultats alors ?

Ils sont conformes à ce que chacun peut imaginer en discutant avec les collègues : un fort mécontentement sur la certification, une impression que le « terrain » n’est pas pris en compte, et un bilan plus mitigé sur les programmes, en fonction de leur niveau de contraintes dans la programmation : en collège cela va à peu près mais le mécontentement est plus prononcé en lycée et LP. Mais il faut aller voir le document de synthèse sur notre site qui donne tous les résultats et analyses. Les résumer ici serait trop long. (voir site)


Vous parlez d’une suite à l’enquête ? Qu’avez-vous prévu ?

Une enquête ne peut donner autre chose qu’un point de vue un peu superficiel et spontané. Cela a une valeur de sondage. On voulait vérifier, c’est fait, les résultats sont clairs. Maintenant, il faut aller plus loin. Nous avons d’ores et déjà engagé la suite : une série d’entretiens auprès de collègues répartis dans toutes les académies et dans les différents établissements, collèges, lycées, lycées professionnels. Nous nous sommes fixés une centaine d’entretiens pour approfondir la relation des collègues aux programmes et textes de certification. Nous souhaitons creuser, par exemple, l’utilisation concrète des programmes et référentiels, les discussions dans les équipes… Nous aurons, alors, des renseignements plus pertinents. Parallèlement, nous avons entamé, ou plutôt poursuivi, un travail en profondeur sur des programmes alternatifs, aussi bien sur la forme que sur le fond. Ce travail avait déjà été abordé l’an dernier aux Etats-Généraux (voir site), mais nous profitons du Congrès national du SNEP qui aura lieu au mois de mars pour aller plus loin. Une première trame sera disponible dans les semaines qui viennent. Nous nous préoccupons aussi de la question européenne et nous co-organisons en Avril un colloque sur la qualité de l’EPS en Europe à l’UNESCO. Enfin, on finira l’année avec probablement un grand séminaire sur les programmes et l’EPS, avec l’objectif d’avancer dans une nouvelle écriture, en phase avec les préoccupations professionnelles et la réussite de tous. Nous animons un débat pédagogique de fond qui, aujourd’hui, est au point mort, ou alors réservé à quelques personnes dans une sorte de cocon vivant un peu en autarcie. Nous avons d’autres ambitions, et la profession a d’autres besoins.


Pensez-vous que les choses peuvent évoluer ?

Bien entendu, rien n’est écrit ! A chaque étape, à chaque nouveau travail sur les contenus d’enseignement, un choix est possible. Ou bien, on considère que c’est une affaire de territoire, de pouvoir, d’exclusivité sur la discipline et il y aura une nouvelle bataille pour imposer une démocratie qui ne fonctionne plus chez nous, ou bien, on considère que c’est l’affaire de tous, et on mutualise les réflexions, regards théoriques, travaux et retours du « terrain » pour viser un accord global permettant une nouvelle dynamique disciplinaire. Pour nous, il suffit de regarder nos colloques, nos rencontres professionnelles organisées tant au niveau national (EPSiliades) que local, ce choix est fait depuis longtemps : l’enjeu de la discipline ne peut s’accommoder de replis frileux sur des prés-carrés. Malheureusement, nous sommes les seuls à organiser de vrais débats. Mais bon, comme je l’ai dit, ça peut changer. Il suffit d’un peu de volonté et de penser au bien commun que nous avons construit et défendu : l’EPS et le sport scolaire, formidables outils de développement des jeunes. Spécificité française, enviée lorsque nous discutons au niveau européen, la question nous est posée collectivement : avons-nous le désir de continuer à faire progresser l’EPS ou sommes-nous prêt à la brader au nom d’intérêts supposés supérieurs ? C’est sur les actions concrètes, pas uniquement sur les discours, que l’on verra tout cela dans la période qui s’engage. Je pense qu’on sera fixé d’ici la fin de l’année scolaire sur les intentions des uns et des autres.


Les résultats de l’enquête

http://www.snepfsu.net



Sur le site du Café


Par antoinemaurice , le vendredi 21 février 2014.

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