Lors de la passation du pouvoir, les ministres Genetet et Portier ont exprimé leur volonté de stabilité, de continuité de la politique mise en œuvre par leurs prédécesseurs, mais dans sa version Attal. Les ministres veulent de la sérénité, ont-ils fermement affirmé. Les conditions sont-elles réunies pour retrouver de la sérénité dans l’École ? Parler de stabilité et de garder le cap dans une École traversée par de multiples crises n’est-il pas contradictoire ? La stabilité souhaitée par les ministres sera-t-elle celle d’une profonde colère qui s’ancre chez les personnels et agents du ministère ? Le Café pédagogique est allé à la rencontre des syndicats pour prendre la température, et leur accueil des nouveaux ministres. Force est de constater une unanime méfiance et colère envers une ministre considérée hors-sol et un ministre délégué défenseur de l’école privée, alors que l’école publique vit une crise inédite.
Un affront démocratique pour le SNES-FSU
Sophie Vénétitay, la secrétaire générale du Snes-FSU, syndicat majoritaire des enseignants du Second degré dénonce « les nominations d’Anne Genetet et Alexandre Portier ». Pour elle, « elles témoignent d’une nouvelle forme de mépris pour la communauté éducative et relèvent même d’une forme d’affront démocratique. Le choix d’Anne Genetet est préoccupant et même consternant, car résultat de tractations politiciennes, tant elle semble éloignée des enjeux de l’Ecole. Elle a vraisemblablement été appuyée par Gabriel Attal qui veut ainsi garder la main sur l’école et s’assurer que le choc des savoirs sera poursuivi alors même qu’il est contesté, ne se met pas en place et, est désavoué dans les urnes. C’est en ça que c’est un affront démocratique. Les urgences de l’Ecole sont ailleurs que dans la poursuite coûte que coûte du choc des savoirs (qu’il faut d’ailleurs abroger) ! Salaires, conditions de travail, budget 2025, voilà les dossiers prioritaires mais que pourra réellement faire cette ministre ?! »
L’exaspération et l’inquiétude pour le Se-Unsa
Elisabeth Allain-Moréno, secrétaire générale de Se-Unsa souligne d’emblée l’exaspération sur le traitement de l’École par l’Elysée. Elle explique : « Exaspération car une fois de plus sous Macron, l’École sert de variable d’ajustement alors qu’elle ne peut être réduite à simple objet des équilibres politiques. Exaspération aussi parce que le pilotage de l’Ecole ne s’improvise pas et Madame Genetet semble très éloignée du sujet. Le service public d’éducation qui accueille chaque année des millions d’élèves et de jeunes a déjà trop souffert d’une tutelle élyséenne. Inquiétude ensuite car les urgences de l’Ecole sont réelles et attendent déjà depuis trop longtemps (rémunérations, manque de personnels, conditions de travail, école inclusive, mixité scolaire…). Or, sans expertise, sans poids politique et accompagnée d’un ministre délégué qui n’a jamais caché son attachement à l’enseignement privé, la nouvelle ministre n’ira pas bouger une virgule à la politique éducative en place et n’ira encore moins porter la nécessité d’un budget suffisant pour l’École de tous. »
La colère du Snuipp-FSU
Guislaine David exprime au Café pédagogique la position du Snuipp-FSU, syndicat majoritaire du 1er degré. Elle se dit « en colère et désabusée » et dit : « pour l’Education nationale, c’est la continuité d’Attal avec la nomination d’Anne Genetet. On ne veut pas de la continuité des réformes engagées, notamment sur le Choc des savoirs, le programme des cycles 1 et 2 et la labellisation des manuels des enseignants. » pour elle, « l’urgence de l’Education nationale, c’est le budget qui doit être à la hauteur des enjeux, pour l’augmentation des salaires des enseignants et l’amélioration des conditions de travail des personnels. On voit bien sur la question de l’inclusion qu’on a déjà des enseignants en début d’année qui n’arrivent pas à faire classe. On accueille des élèves sans moyens afférents au handicap. » La secrétaire générale du Snuip-FSU craint un ministère avec une méconnaissance du 1er degré : « comme d’habitude, on aura aucun spécialiste du 1er degré dans le ministère. La problématique de l’école n’est pas la même qu’au second degré, en termes d’organisation des directions d’école. »
Appel à la grève du 1er octobre
Sophie Vénétitay, la secrétaire générale du Snes rappelle au Café pédagogique ses priorités et appelle à une mobilisation massive lors de la grève du 1er octobre : « Alors que l’Ecole est à un point de bascule, il faut une rupture claire avec les politiques menées par E.Macron et prendre des mesures urgentes : revalorisation sans contreparties, abandon du pacte, diminution du nombre d’élèves dans les classes et des moyens pour l’Ecole inclusive, abrogation du choc des savoirs, abandon des réformes Blanquer du bac et du lycée …nous mènerons campagne avec la profession sur ces sujets et appelons dès maintenant à la grève le 1er octobre. »
Djéhanne Gani
Dans le Café
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