Professionnel : Un rapport veut prolonger le CAP, le bac pro et le BTS 

Père de la réforme du bac professionnel en 1985, Daniel Bloch publie chez Terra Nova un rapport  pour "un nouveau souffle pour l'enseignement professionnel". Il propose de rallonger d'une année la préparation des diplômes professionnels (CAP, bac, BTS) en doublant la durée des périodes de formation en entreprise. Il pense ainsi remédier à la perte de niveau de ces diplômes. Un rapport qui s'appuie sur le programme ébauché par E Macron pendant la campagne des présidentielles. Mais qui demande un effort budgétaire supplémentaire.

 

Le père du bac professionnel

 

" L’enseignement professionnel en lycée a connu une période prospère, de 1985 à l’an 2000, avec notamment la création du baccalauréat professionnel", écrit Daniel Bloch qui fut à l'origine de cette réforme sous JP Chevènement. " Cependant, depuis l’an 2000, l’enseignement professionnel en lycée est en difficultés. Celles-ci sont notamment liées à la baisse du niveau des élèves « orientés » en fin de classe de troisième des collèges vers un CAP ou vers un baccalauréat professionnel. De plus, la durée de la préparation du baccalauréat professionnel a, malencontreusement, été réduite, en 2009, de quatre à trois années, aboutissant à réduire la « valeur marchande » de ce diplôme".

 

Il souligne aussi la baisse de l'âge moyen des bacheliers professionnels résultant de la baisse des redoublements et de celle de la durée des diplômes. Ainsi le CAP a été passé à 2 ans et le bac pro à 3 ans sous N Sarkozy pour récupérer des postes enseignants.

 

Une réforme de structure

 

Il appelle à "remodeler l'enseignement professionnel" en ajoutant une année de formation à chacun des trois diplômes professionnels : CAP, bac pro et BTS. Ce dernier diplôme deviendrait un "Bachelor" professionnel, calquant la réforme mise en place pour les DUT. " En lycée, les périodes de formation en milieu professionnel verraient leur importance considérablement accrue, en étant doublées, comme le propose le Président de la République, atteignant ainsi une année non seulement pour le bachelor professionnel, mais aussi pour le CAP et le baccalauréat professionnel. Ces périodes de formation devraient être rétribuées", ce qui est aussi au programme d'E Macron. La dernière proposition concerne la gouvernance du système éducatif. " La conduite du système éducatif ne peut ainsi reposer sur un simple adéquationnisme. Il faut un temps d’avance. En conséquence, nous plaiderons en faveur d’une planification portant au moins sur les dix années à venir, avec comme socle une loi de programmation budgétaire dont la mise en oeuvre prendrait appui sur une structure administrative spécifique".

 

Augmenter d'une année la durée des formations

 

Dans ce rapport on retrouve des revendications des syndicats de l'enseignement professionnel. Eux aussi ont constaté le rajeunissement des lycéens professionnels avec les problèmes nouveaux que cela apporte quant à l'acceptation de leur orientation et l'ajustement de leur comportement en entreprise. Plusieurs, comme le Snuep Fsu, demandent le retour au bac pro en 4 ans pour améliorer le niveau des élèves.

 

Mais les deux diagnostics ne sont identiques. D Bloch justifie ce constat de la faiblesse du niveau des élèves de deux façons. D'abord par l'évaluation PISA qui montre bien une baisse du niveau des élèves faibles en fin de collège début de 6ème. D'autre part par la hausse du nombre de reçus aux examens. En fait celle-ci est inférieure à la croissance du taux de réussite du bac général. Et ce que montre PISA c'est la baisse de niveau dans les matières d'enseignement général (maths, français, sciences). Les compétences professionnelles n'y sont pas évaluées.

 

Où sont les lacunes des lycéens pros ?

 

Lors de sa conférence sur l'enseignement professionnel, le CNESCO a montré que la particularité de l'enseignement professionnel français c'est la faiblesse de l'enseignement général. La réforme Blanquer a aggravé la baisse de niveau professionnel en mettant en place des "familles de métier" en 2de professionnelle faisant perdre une année de formation professionnelle. Mais c'est pire pour l'enseignement général. La durée des cours dans les matières d'enseignement général a presque été divisée par deux.

 

Ce n'est évidemment pas en doublant la durée des stages en entreprise qu'on améliore le niveau de  ces élèves en enseignement général. On n'améliore pas non plus le niveau dans la partie théorique de l'enseignement professionnel. Or celle ci est aussi importante. Elle comprend par exemple la formation à la sécurité qui est d'autant plus impérative que les élèves sont plus jeunes.

 

Du BTS au Bachelor

 

Daniel Bloch souligne avec raison l'écart grandissant entre le nombre de bacheliers professionnels et celui des places en BTS. " A la croissance, depuis l’an 2000, de 90 000 du nombre de bacheliers professionnels n’a répondu qu’une augmentation trop faible du nombre de places de première année en STS : 20 000 seulement. Faute de places ouvertes en STS en nombre suffisant, 40 % seulement des bacheliers professionnels peuvent aujourd’hui y être admis alors que les trois quarts d’entre eux auraient souhaité l’être." D Bloch pose un autre problème : "Les programmes des STS sont essentiellement adaptés au profil des bacheliers technologiques", écrit il, " Il est ainsi demandé aux bacheliers professionnels de se transformer en bacheliers technologiques, l’espace de l’été qui sépare le jour du baccalauréat de l’entrée en STS. D’où des taux d’échec inacceptables". Et cela justifierait l'ajout d'une année de formation.

 

Rompre avec l'adéquationnisme

 

On touche avec cette proposition un autre manque du rapport : celle de son financement. Si augmenter d'une année le CAP et le bac pro est en grande partie couvert par le doublement des  périodes en entreprise, l'ajout d'une année de BTS va entrer en concurrence avec l'augmentation du nombre des places.

 

Au final, ce rapport pose de bonnes questions. Les réponses, liées aux promesses présidentielles, poussent les diplômes professionnels dans le même sens que l'apprentissage vers le monde de l'entreprise plutôt que renforcer la vraie lacune des formations professionnelles :le faible niveau académique des élèves. Il apporte une exigence nouvelle : celle de prévoir les formations professionnelles pour le long terme là où le programme présidentiel prévoit de les lier aux demandes des entreprises de façon très adéquationniste.

 

François Jarraud

 

Le rapport

 

 

 

Par fjarraud , le lundi 20 juin 2022.

Commentaires

  • ldely, le 20/06/2022 à 13:28
    En 1965 un BTS (alors tout nouveau diplôme) était à Bac +2, un ingénieur à bac+5 et un enseignant du primaire à bac+1
    en 70 l'enseignant du primaire passe à bac+2 en 1990 il est à bac+3 en 2010 à bac+4 et mainte,nant à bac+5 mais le BTS toujours à bac+2 et l'ingénieur à bac+5.
    Le monde s'est complexifié aussi un BTS à bac +3 ou 4 et un diplôme d'ingénieur à bac+8 me semble être une nécessité.
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