L'Ecole de Yannick Jadot c'est l'Ecole anti Macron 

Présentant son programme pour l'Ecole le 21 mars, Yannick Jadot, le candidat écologiste, a surtout pris position contre le projet d'Emmanuel Macron. Une opposition sur le fond, sur les valeurs, sur le budget. Il veut "réparer" les dégats du quinquennat Macron  pour donner sa chance à une école "de la tête,  du coeur et de la main". Il promet des embauches massives, la revalorisation des salaires et une rupture dans la gestion comptable de l'Ecole. Autant de baumes sur les plaies enseignantes. Reste à voir si le projet pédagogique porté par le candidat, qui envisage une refonte des rythmes scolaires, va séduire les enseignants.

 

Le candidat anti Macron

 

"Aujourd'hui dans le discours du candidat sortant il y a une absence dramatique de reconnaissance du caractère souvent héroïque dans lequel a travaillé l'ensemble de la communauté éducative pour faire face à la pandémie... C'est le modèle avec tableau excel qui a fait dérailler hôpital public et qui a fait souffrir nos enfants. Etendre à l'école une logique comptable, privée, de la compétition est aujourd'hui une menace sur l'unité de la nation. Jouer les parents contre les enseignants est irresponsable", affirme Y Jadot qui va tacler ainsi E Macron tout au long de son discours. " Pour changer nous avons besoin de réconciliation : il nous faut apaiser les tensions dans l'Ecole."

 

Réparer l'institution scolaire

 

Ce que propose Y Jadot c'est une école "de la tête,  du coeur et de la main", une école où s'épanouissent les élèves, "une école de l'émancipation individuelle et collective".

 

Mais comment faire ? D'abord il faut "réparer" affirme Y Jadot. "Nous ne pourrons transformer l'école que si nous réparons l'institution. C'est la priorité absolue". Pour cela le candidat promet 4.5 milliards par an pour relever les salaires des enseignants de 20%, recruter 65 000 enseignants , 2000 médecins, 3000 infirmières,  1000 assistants sociaux et relever le salaire des AESH. Pour le Café pédagogique, cet effort dépasserait les 4.5 milliards et ce budget semble mal assuré. Pour régler la question des remplacements d'enseignants , Y Jadot prévoit de renforcer les postes de TZR.

 

La seconde étape du plan Jadot c'est une vaste concertation "dont le résultat ne serait pas écrit à l'avance". C'est la méthode avec laquelle le candidat souhaite combler l'éventuel fossé entre ses intentions pédagogiques et les conceptions des enseignants tout en "réparant"

 

La réforme des rythmes scolaires

 

Car cette école de l'épanouissement passe par une réforme des rythmes scolaires. Y Jadot souligne que l'école française est caractérisée par beaucoup d'heures de classe sur très peu de journées.  Ce n'est donc pas tant les vacances qu'il faut réduire qu'augmenter le nombre des journées de classe. C'est un exercice périlleux qui a détaché les enseignants du premier degré du gouvernement Hollande. Y Jadot s'y prendrait autrement que F Hollande en commençant par revaloriser les enseignants avant de mettre en débat la semaine de 5 jours. Mais la question est brulante.

 

Une autre pédagogie

 

Serait mis en débat aussi la pédagogie que souhaite développer Y Jadot  : une pédagogie de la coopération et de la découverte.Une école "de tous les savoirs" ouverte sur le monde et la nature, tissant des partenariats avec les associations locales. "Une école où on peut apprendre autrement sans opposer les fondamentaux aux savoirs pratiques". Y Jadot  veut "rompre avec la culture de l'apprentissage intensif et de l'évaluation permanente". Par exemple il souhaite un voyage scolaire par an et un voyage en Europe dans la scolarité de chaque enfant. Il veut accorder une grande autonomie pédagogique des équipes pédagogiques "et non des chefs d'établissement", "construire l'interdisciplinarité mais pas faire de chaque établissement une startup avec un chef d'entreprise".

 

C'est un peu les conceptions pédagogiques du quinquennat Hollande qui s'isncrivent dans le programme écologiste et l'exemple des EPI revient dans les propos de l'équipe de campagne d'Y Jadot.

 

Comment concilier ces conceptions avec la liberté pédagogique des enseignants ? "C'est une question de conférence de consensus", répond Y Jadot. "Je ne souhaite pas imposer verticalement un changement de pratiques. Mais il fait lever les freins qui existent". La conférence de consensus s'emparera de ces questions comme de celle des notes.

 

Assurer davantage de mixité sociale

 

Dernier thème important du programme d'Y Jadot. Le candidat écologiste veut assurer davantage de mixité sociale et scolaire dans le système éducatif. "Toutes les études montrent qu'on a un des systèmes d'assignation le plus lourd de l'OCDE", dit-il. Pour réduire ces inégalités entre établissements, Y Jadot s'engage à revoir les dotations des établissements en fonction de leurs indicateurs sociaux (et en sens inverse de la réalité actuelle). Cela sera valable pour le privé sous contrat comme pour le public. "On veut que le privé assure sa part et qu'on donne au public les moyens pour ne pas avoir une injonction contradictoire entre ce qu'on veut pour la République et ce qu'on choisit comme parent pour nos enfants".

 

Yannick Jadot vise visiblement à récupérer l'électorat enseignant bien déçu par E Macron. Par bien des points le projet qu'il présente assume la rupture avec celui d'E Macron. Il en est aux antipodes. Il ramène dans le débat électoral les valeurs auxquels sont attachés les enseignants. Il a la force de respecter les convictions des enseignants et de marier autonomie locale avec liberté pédagogique de chaque enseignant. Cette force est aussi sa faiblesse.

 

François Jarraud

 

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 22 mars 2022.

Commentaires

  • Amytrezan, le 22/03/2022 à 18:04
    Bonjour,

    Présidentielle 2022 : Yannick Jadot, le candidat EELV souhaite instaurer « pour tous les élèves des espaces d’acquisition des savoirs pratiques pour le climat – réparation, cuisine, jardinage, construction… – avec un minimum de deux heures par semaine ». Au collège, deux heures minimum par semaine pour l'acquisition de « savoirs pratiques ».

    Ces enseignements seraient pris pour une part sur le temps d’enseignement actuel (j’y suis totalement opposé), pour une part sur des temps en plus (quel budget ?).
    La campagne électorale est l’occasion pour les candidats de se démarquer, mais pas forcément une bonne chose pour les élèves. Après les injures contre les enseignants et le cassage de l’école proférés récemment par Emmanuel Macron, que penser pour l’école de cette proposition « verte » ?

    Je ne disserterai pas sur son intérêt en termes de climat. Je pense que cette proposition "pratique" est le reflet d’un mal être global de l’école, et de la société, qui ne sont plus en phase avec le monde et l'action sur le monde.
    Les raisons sont multiples :
    - numérisation, virtualisation du monde,
    - dévalorisation des savoirs du monde (trucs pour « intellos » ringards) confondus avec la profusion chaotique des informations, au profit des marchandises.
    - dévalorisation des savoirs de monde, source de vilaine technologie qui ferait du mal au monde lui-même…
    - culture scolaire de la protection contre un monde au choix, d’incivilité, de dangers naturels, de terrorisme, de dangers sanitaires, de guerre… A qui le tour la semaine prochaine ?
    - prééminence pédagogique de la compétence sur les savoirs du monde,
    - savoirs scolaires dérivant en formalisme didactique, avec des objets du monde excessivement dénaturalisés (« secondarisation » des objets de monde),
    - associés à un formalisme méthodologique scientifique procédural trop précoce, qui a pris le pas sur le gout du monde, à développer chez le jeune enfant.
    - lien mal assuré chez les jeunes enfants entre le sensible et le raisonné, le concret et l’abstrait. Le sensible, la manipulation, dévalorisés au profit d’une abstraction coupée de tout lien avec le concret.
    Tout cela participe aujourd’hui, du manque de gout de l’école pour le monde.

    C’est, il me semble, dans ce contexte qu'intervient la proposition de définir « le bricolage, le jardinage, la cuisine » comme des enseignements en soi, à partir du collège, puis au lycée (l’école primaire serait suffisamment efficace sur ces questions, ce que je conteste…) !! Un réflexe qui a déjà vu le succès de la méthode Montessori en maternelle…. Un réflexe pratique avec Jadot, à mon sens maladroit, mais qui témoigne du malaise actuel.

    Si le débat présidentiel pouvait éviter à nos enfants de subir les contrecoups d’annonces médiatiques électoralistes, putassières (Macron) ou à côté de la plaque, ce serait bien ? Si la société et la politique pouvaient s'interroger sur elles-mêmes et ses valeurs, et laisser tranquille une école harcelée de réformes et de décrets ?... Si la société, la communauté scolaire s’interrogeaient sur leur goût pour le monde, l’école et les élèves iraient peut-être mieux ? Le monde aussi ?
    Cordialement.
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