Après le meeting de Poissy, l'équipe de campagne d'Emmanuel Macron précise les orientations du candidat. Notamment sur la part donnée aux entreprises dans la formation des élèves au collège. Et sur l'évolution du métier enseignant. Car E Macron veut s'appuyer sur eux pour ses réformes. Un indice supplémentaire que son "grand chantier" pour l'école n'est peut-être encore qu'une ébauche...

Les entreprises chaque mardi dans les classes du collège

"Le programme éducatif d'E. Macron, un de ses trois chantiers prioritaires, semble encore peu précis", écrivions nous le 8 mars juste après le meeting de Poissy. Il appartenait à son équipe de campagne de préciser les intentions du candidat sur des points encore obscurs. Disons le tout de suite :elle n'a pas réussi à le faire.

Si le candidat a "la volonté de creuser le sillon tracé depuis 5 ans pour élever le niveau et l'égalité des chances", selon son équipe, il entend aussi engager "un chantier" sur l'Ecole, qui est présenté comme prioritaire.

E Macron avait évoque le 7 mars la place des entreprises dans l'Ecole qu'il veut construire. Cela concerne le collège. A partir de la 5ème, donc sur les 3 niveaux du cycle 4, une après midi par semaine sera consacrée à l'orientation, un savoir manuel et le numérique. Le savoir manuel et le numérique sera pris en charge par le professeur de technologie. Mais celui ci ne dispose que de 1h30 par semaine.

L'orientation sera initiée dès la classe de 5ème."A compter de la 5ème tous les élèves découvriront un métier". L'idée c'est que l'éducation à l'orientation c'est découvrir un métier et que celle ci doit être avancée au collège. On ne sait pas si l'orientation elle même sera avancée en 5ème. Les établissements auront une grande liberté d'organiser la demi journée. Mais l'idée du candidat Macron c'est d'associer les entreprises locales à l'éducation à l'orientation. Outre l'apprentissage des mécanismes de l'orientation, les entreprises seront invitées à présenter leurs métiers et les élèves se rendront dans les entreprises proches du collège. On assure que cet enseignement sera assuré sans augmenter les horaires des élèves et que "cette demi journée sera crée en transformant l'enseignement de la technologie". Mais le professeur de technologie ne voit chaque classe qu'une heure 30 par semaine. A moins de réduire la demi journée à cette durée, ou d'inclure l'orientation dans l'horaire de technologie, on ne voit toujours pas comment cette découverte des métiers sera mise en place. Les élèves seront ils simplement accompagnés d'un surveillant et laissés seuls face à un cadre d'entreprise ?

Les entreprises seront aussi davantage sollicitées dans les lycées professionnels. Pour le candidat c'est un moyen de valoriser la voie professionnelle. "On doit aux jeunes de faire mieux pour les accompagner à l'emploi", dit-on dans l'équipe d'E Macron. Les périodes en entreprises sont de trop courte durée, moins de 2 mois, fait remarquer l'entourage d'E Macron. Il est question d'étendre ce temps et de rémunérer les stages en entreprises. Cette rémunération sera prise en charge par l'Etat. Au moins on a là une promesse concrète, même si pas budgetée. C'est plus concret que la promesse de confier les collégiens à des entreprises une demi journée par semaine. Quelles entreprises ont le temps, le savoir faire et les moyens humains pour faire cela ?

Faire des enseignants le levier de la réforme de l'Ecole ?

"On veut s'appuyer sur les enseignants pour ne faire un levier de transformation du système éducatif en les revalorisant et en les respectant" assure aussi l'équipe de campagne. Mais on se souvient aussi des propos du candidat le 7 mars. "Le projet que je veux défendre c'est réussir à décloisonner davantage l'école et donner plus de marge de manoeuvre aux équipes pédagogiques sur le terrain. C'est à dire les directeurs d'école, les proviseurs de collège et de lycée en leur donnant plus de moyens, plus de rémunération, plus de capacité à prendre des initiatives". Et on sait aussi que, selon le dernier baromètre Unsa, seulement 6% des enseignants sont favorables à la politique scolaire du gouvernement. Les mobiliser au service de la réforme du candidat Macron ne va pas être une mince affaire...

Cependant l'équipe de campagne d'E Macron confirme. Les chefs d'établissement auront la possibilité de recruter leurs enseignants. "Mais la possibilité existe déjà avec les postes à profil et ceux à exigences particulières" rappelle l'équipe d'E Macron. Il faut comprendre que cette règle remplacera peut-être le mouvement actuel qui a les mêmes règles, transparentes, pour tout le monde. Pur autant l'équipe assure ne pas vouloir remettre en cause le statut des enseignants. Mais changer les règles d'affectation concernerait aussi tous les professeurs.  Pour l'équipe d'E Macron, ce recrutement local des enseignants est "un levier parmi d'autres" pour changer l'Ecole.

Quant à la revalorisation, l'équipe d'E Macron ne s'engage pas sur les budgets à venir. Avant la guerre d'Ukraine ceux -ci semblaient déjà promis à de fortes économies. Pour l'équipe d'E Macron la revalorisation "prendra place après la réorganisation de l'Ecole" mais on n'en saura pas plus.

Un chantier à peine ébauché

Un des trois "grands chantiers" du candidat E Macron affiche de forts marqueurs à droite : autonomie renforcée des établissements, pouvoirs accrus des chefs d'établissement et directeurs d'école, entrée des entreprises dans le temps scolaire. Pour autant on est face à des propositions qui ne semblent pas réellement abouties. Un projet éducatif n'est viable que par rapport à un budget et à une organisation claire du temps scolaire. Sur ces points le projet du candidat est encore dans le brouillard commode des discours de campagne.

François Jarraud

E Macron veut poursuivre ses réformes scolaires