PISA : Le numérique contre la lecture ? 

Les technologies digitales font-elles reculer les compétences en lecture ? Les résultats de Pisa ont déjà montré une relation négative entre le temps passé avec les outils numériques et les performances des élèves. Un nouveau volume de Pisa 2018 publié le 3 mai confirme mais approfondit la question à propos des performances en lecture. Si globalement le temps passé avec des outils numériques en classe est toujours corrélé négativement avec les compétences en lecture, cela n'est pas vrai dans tous les pays. Un bloc de pays sait tirer partie des outils du siècle numérique. Ce qui amène l'OCDE à faire des recommandations qui touchent notamment à l'EMI.

 

Le digital s'est imposé

 

"Les technologies digitales ont révolutionné le monde de l'écrit... N'importe qui peut devenir journaliste ou éditeur. Lire dans un monde digital est devenu encore plus un défi compte tenu de la production et de la consommation exponentielles de médias", rappelle l'OCDE.

 

Le problème n'est plus dans l'équipement au moins dans les pays membres de l'OCDE. Si le fossé digital y existe encore, 88% des élèves ont ne connexion Internet et un ordinateur à la maison. Un pourcentage très élevé, et en hausse rapide depuis 2000, mais qu'il faudrait sans doute relativiser au vu de ce qu'a montré la crise. Il reste des élèves qui sont d'autant plus exclus qu'ils ne sont pas équipés, ce que l'OCDE confirme. Et l'équipement à la maison est souvent partagé ce qui crée des tensions quand les usages augmentent. Selon l'OCDE l'équipement des élèves français est un peu au dessus de la moyenne de l'OCDE.

 

Lire sur papier ou sur écran ?

 

La lecture sur écran augmente-elle les compétences en lecture ? Oui et non. Selon Pisa, les élèves qui disent lire davantage de livres papier que de textes digitaux ont de meilleures performances en lecture que ceux qui lisent surtout des textes digitaux.

 

Pisa note aussi la baisse du temps consacré à la lecture dans tous les pays OCDE et aussi la baisse du plaisir de lire. Cela concerne d'ailleurs davantage les garçons et les élèves défavorisés. En France l'écart lié aux inégalités sociales est particulièrement net.

 

Les élèves qui lisent sur papier passent plus de temps à lire que ceux qui lisent surtout sur écran. En fait les élèves qui lisent surtout sur écran passent 3 heures par semaine seulement à lire pour le plaisir. Ceux qui lisent surtout sur papier passent 4 heures. Et ceux qui lisent des deux, passent 5 heures.

 

Mais que lit-on sur écran ? La France se caractérise par une forte consommation d'informations digitales (nettement au dessus de le moyenne ocde). Les jeunes font aussi davantage de recherches d'information sur internet. Par contre l'usage du chat et des forums est plus faible que dans l'OCDE en moyenne.

 

Les textes longs réhabilités

 

Les types de lecture sont plus ou moins corrélés à de bonnes performances en lecture. La lecture de textes longs en classe (plus de 100 pages) est fortement corrélé à de bonnes compétences. C'est d'ailleurs un point où la France est au dessus de la moyenne OCDE. La lecture de fictions est aussi corrélé positivement. Et là la France est en dessous de la moyenne. Lire des textes courts et digitaux est associé à de faibles compétences en lecture.

 

L'EMI, un point faible

 

 


Que sait-on des apprentissages numériques ? Pisa 2018 évalue par exemple la capacité des élèves à naviguer et à traiter l'information c'est à dire à trier entre les faits et les opinions. Un exercice particulier a été dédié à cette compétence.

 

Dans l'OCDE 54% des élèves ont un enseignement sur l'information sur Internet. Un pourcentage qui varie selon les pays. Aux Etats Unis, en Australie, au Danemark (des pays que l'on va retrouver) c'est plus de 70% des élèves. En France on est en dessous de la moyenne de l'OCDE. Le résultat se voit dans Pisa : les élèves français sont en dessous de la moyenne dans l'analyse de l'information sur Internet alors que leurs compétences globales en lecture sont un peu au dessus de la moyenne de l'OCDE.

 

Pour une réorientation des usages numériques

 

 

 


Alors le développement des usages numériques se fait-il au détriment des compétences en lecture ? Globalement oui. Plus on passe du temps avec des outils numériques en classe plus le niveau de compétences est faible. "Le lien entre les usages du numérique à l'école et la performance en lecture est négatif" confirme l'OCDE.

 

Mais des pays échappent à cette malédiction. On les a déjà cité : Etats-Unis, Australie, Nouvelle Zélande, Danemark, Corée. Voilà des pays où on passe beaucoup de temps avec des outils numériques et où les compétences en lecture sont élevées.

 

Aussi pour l'OCDE la question n'est pas celle du temps passé avec des outils numériques que celle des usages. Une analyse des usages amène l'OCDE à des prescriptions.

 

L'usage le plus intéressant pour les compétences en lecture est la recherche d'information sur internet. Publier des travaux sur le site de l'école ou mener des simulations sont par contre associés négativement.

 

La conclusion générale tourne autour des compétences digitales. Ce sont elles qui doivent être enseignées et qui augmentent aussi les compétences en lecture. Apprendre à distinguer faits et opinions, ce qu'on appelle l'EMI en France, devient une compétence clé à acquérir.

 

François Jarraud

 

 

 

Par fjarraud , le lundi 03 mai 2021.

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