En Gironde, les professeurs des écoles invités à repasser un entretien d'embauche 

Il était une fois des professeurs qui passaient un concours et finissaient par être titulaires de leur poste. Ce bon vieux temps devient légendaire en Gironde où déjà environ un professeur des écoles sur  cinq est invité à passer un entretien d'embauche ou à déguerpir là où il pourra. Cette situation violente, mise en place avec les dédoublements des classes de l'éducation prioritaire, gagne cette année les grandes sections de  maternelle.

 

Des postes de GS en éducation prioritaire deviennent à profil

 

 "La priorité c'est de faire du ménage , se débarrasser des "vieilles" pour les remplacer par du sang neuf genre start'up". Clémentine (1) enseigne en grande section de maternelle en Gironde et ne décolère pas. Elle qui enseigne depuis plusieurs années à ce niveau et est titulaire de son poste en éducation prioritaire est convoquée à un entretien à Bordeaux. Si elle n'est pas retenue elle devra laisser sa place et trouver un point de chute là où ce sera possible.

 

Tous les enseignants de grande section du département en Rep ou Rep+ ont reçu une fiche "d'appel à candidature pour poste spécifique donnant lieu à commission d'entretien" qui n'hésite pas à faire appel à "l'école de la confiance".

 

Interrogés sur quelles compétences ?

 

"Pour bâtir l’école de la confiance, le choix a été fait de combattre la difficulté scolaire dès les premières années de l’école en soutenant les élèves les plus fragiles. Cela se traduit par le dédoublement des classes de Grande Section en REP et en REP+", annonce l'inspection académique de Gironde. Les enseignants en poste doivent donc se porter candidats pour garder leur propre poste à la rentrée 2021 !

 

La fiche énumère les compétences attendues des candidats : "mettre en oeuvre une pédagogie explicite", "exploiter les résultats des évaluations", "s’inscrire dans un projet d’évolution de ses pratiques professionnelles", "avec en transversalité l’utilisation des outils numériques".

 

Les enseignants  qui se portent candidats sont convoqués devant une commission de 2 ou 3 IEN chargés de sélectionner les bons candidats sur des critères qui restent imprécis. Ceux qui ne sont pas reçus ou qui enseignent en GS en Rep ou Rep+ et ne se portent pas candidats perdent leur poste d'office. A eux d'en retrouver un autre dans le département. Inversement ceux qui sont reçus e trouvent étiquetés GS et ne pourront plus en bouger pour suivre une classe par exemple. 

 

20% des postes

 

"Passer de 24 élèves à 12 ne justifie pas du tout cette procédure", nous dit Marc Vieceli, co-secrétaire départemental du Snuipp 33. L'argument qui consiste à faire croire qu'enseigner en classe dédoublée demande des compétences autres que celles demandées à tous les professeurs des écoles est spécieux. On n'est pas sur un poste d'enseignant spécialisé. Et c'est difficile de dire à un enseignant qui a 30 élèves en maternelle et qui s'en sort qu'il n'est pas capable d'enseigner à 12. D'autant que les enseignants nommés reçoivent une formation et un accompagnement". Mais la procédure est la même pour les CP et Ce1 dédoublés dans le département.

 

Le Snuipp 33 affiche son désaccord avec le Dasen, François Coux, sur ce point. Les postes à profil devraient être marginaux . Or ils concernent environ 20% des enseignants du département selon le Snuipp Fsu.

 

Une volonté managériale

 

"On voit une volonté managériale s'affirmer et apparaitre un controle sur les enseignants", dit M Vieceli. " Il y a davantage de choses descendantes, de "bonnes pratiques" qui nient la liberté pédagogique des enseignants. Davantage de pression managériale comme ces entretiens. Au final on voit des enseignants avec de bons états de service prendre des avis réservés parce qu'ils n'ont pas su répondre à une question dans un entretien".

 

" Un(e) enseignant(e) expérimenté(e), et qui connaît les enfants, les fratries, les familles, avec qui il(elle) sait trouver les mots, les façons de parler et de dédramatiser les situations, qui est aux avant-postes pour résoudre un sacré grand nombre de situations conflictuelles et extrêmement compliquées; le truc, donc, c’est que cet(te) enseignant(e) risque l’éjection, ni plus ni moins", nous dit Clémentine. "Enseigner dans ces conditions plutôt difficiles n’est possible qu’au sein d’équipes soudées, où c’est l’entente et la concertation qui règnent, équipes qui bien souvent sont solidement constituées depuis pas mal d’années ; dans des contextes où la stabilité est une condition sine qua none. Ces enseignant(e)s-là sont en fait un des tout-derniers remparts qui permet de tenir encore un semblant de micro-paix sociale dans ces zones compliquées. Finalement, le projet c’est de casser tout ça..."

 

François Jarraud

 

Contacté le Dasen de Gironde n'a pas répondu à nos questions.

 

(1) ce n'est pas le vrai prénom

 

Blanquer normalise la maternelle

 

 

 

Par fjarraud , le mercredi 17 mars 2021.

Commentaires

  • ofraise, le 17/03/2021 à 16:39
    Normalement, nous ne sommes pas titulaires d'une classe mais d'un poste. Certes on peut perdre le droit d'exercer en GS et c'est une ineptie, mais c'est toujours le dernier nommé qui perd son poste et doit partir de l'école. Si ça n'est plus le cas, il faudra le signaler aux écoles.
    Et sinon quelle sont les communes qui mettent en place les GS dédoublées ?
  • caroudel, le 17/03/2021 à 09:49
    On nous a déjà fait le coup pour les maîtres-directeurs ! Après 10 ans de direction donnant toutes satisfactions, j'ai été convoqué,  interrogé par deux inspecteurs qui n'en savaient pas plus que moi sur la direction d'école.
    Quant à ceux qui interrogent ici, on peut se demander qui les a interrogés pour savoir s'ils avaient les compétences pour constituer un tel Jury.
    Par ailleurs un titulaire reste encore un titulaire de son poste ou alors je n'ai pas bien suivi l'évolution.
    Ajoutons que les dédoublements n'étant pas de façon éclatante la solution (les évaluations le prouvent!) on chercherait les candidats qui eux, seraient caopables d'obtenir de bons résultats. Allez savoir ! On n'y comprend plus rien !
     Et comme le dit Lizdarcy, c'est une illustration de l'école de la confiance!
  • Lizdarcy, le 17/03/2021 à 11:17
    Ecole de la méfiance.
    Article 1: trouver tous les jours une nouvelle façon d'empêcher les enseignants / les équipes de faire leur travail
    Article 2: occuper les mauvais inspecteurs (les bons le sont déjà, évidemment), éventuellement aux dépens de l'objectif (on le rappelle, cet objectif: former des citoyens épanouis et instruits)
    Article 3: que ça ne coûte rien.

    Les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnait.

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