Salaire, carrière, accès aux corps les plus prestigieux : dans le ministère le plus féminisé, la place laissée aux femmes n'est jamais la première. Alors que l'Education nationale porte les valeurs de la République, l'égalité entre les femmes et les hommes reste à conquérir, comme le montrent les données du Bilan social du ministère.
Une hiérarchie interne basée sur le genre
Si le ministère de l'éducation nationale compte trois fois plus de femmes que d'hommes, cette proportion varie fortement selon les corps. La logique est simple : plus on monte dans les corps les plus prestigieux et les plus rémunérés, plus la part des femmes diminue.
Ainsi on compte 84% de femmes chez les professeurs des écoles mais seulement 65% chez les certifiés. Cette proportion dégringole à 53% chez les agrégés et 38% chez les professeurs de chaire supérieure. Le même mouvement s'observe chez les corps d'encadrement. 51% des postes de direction sont occupés par des femmes mais on va les trouver davantage sur des postes d'adjointes alors que ceux de proviseurs restent plus fortement masculins. La proportion de femmes diminue au delà : 43% des Dasen et dasen adjoints sont des femmes et seulement 36% des recteurs.
Inégalité salariale
L'écart de rémunération varie fortement selon le sexe. "Dans le premier degré public, le salaire net des hommes est supérieur de 10 % à celui des femmes (6 % dans le secteur privé) et, dans le second degré public, de 8 % (6 % dans le secteur privé)", rappelle le Bilan social. Il fournit des chiffres : 2557€ nets mensuels en moyenne chez les PE du sexe masculin, 2371 pour les femmes. 2820 pour les certifiés, 2677 pour les certifiées.
Des carrières différentes
"Quels que soient le corps et le secteur, les hommes enseignent davantage à temps plein et sont plus avancés dans leur carrière", écrit le Bilan social. " Le niveau et la part des primes sont également plus élevés pour les hommes. Parmi les professeurs des écoles du public, l’écart de primes est de 37 % entre hommes et femmes, en lien avec une relative surreprésentation des hommes dans les directions des écoles et sur des établissements de plus grande taille (la prime de direction étant en partie liée à la taille de l’établissement), et dans les missions de remplacement. Dans le second degré, public comme privé, les hommes perçoivent en moyenne 27 % (dans le public) à 23 % (dans le privé) de primes de plus que les femmes. Cet écart est particulièrement fort parmi les professeurs agrégés et de chaire supérieure (40 % dans le public, 45 % dans le privé). En particulier, les hommes ont une plus grande propension à effectuer des heures supplémentaires, percevant, en moyenne tous corps confondus 47 % (dans le public) à 44 % (dans le privé) de rémunérations pour heures supplémentaires de plus que les femmes. Ils exercent également davantage de fonctions rémunératrices". On devine ce qu'il y a derrière ces situations : le poids des stéréotypes et un partage des tâches familiales qui se fait au détriment des femmes.
Inégalités que l'on retrouve dans les carrières : "Quel que soit le corps considéré, les hommes passent plus rapidement à la hors classe à partir de 20 ans d’ancienneté en moyenne. C’est parmi les professeurs des écoles et les professeurs d’éducation physique et sportive que l’écart entre femmes et hommes est le plus important. Le passage en classe exceptionnelle est également un peu plus rapide pour les hommes que pour les femmes au sein du corps des professeurs certifiés".
Des disciplines encore genrées
Plus significatif encore peut-être : l'éducation nationale qui enseigne les valeurs républicaines n'a toujours pas réussi à assurer la parité dans les disciplines d'enseignement. On le sait en ce qui concerne l'orientation des élèves. Mais c'est aussi flagrant chez les enseignants.
Ainsi les femmes dominent largement le paramedical (91%), les biotechnologies (85%), les langues (83%) , les lettres (80%), les arts (68%) et les SVT (66%). Elles ne sont plus que 44% des enseignants en maths et 43% en physique chimie et EPS, 26% en génie industriel, 15% en technologie. Leur part dégringole à 9% en informatique et STI. Aux yeux des élèves, l'Education nationale reste mal placée pour enseigner l'égalité entre les genres.
François Jarraud