Revalorisation : Blanquer promet des arbitrages fin mars 

"C'est au mois de mars qu'on va pouvoir préciser certaines choses". Interrogé sur France Inter le 2 mars, JM Blanquer a promis de rendre ses arbitrage sur la revalorisation avant la fin mars. Il a signé le 2 mars le décret instituant la revalorisation des enseignants en début de carrière. Il promet de nouvelles avancées sous conditions. Qu'en penser ?

 

Une revalorisation 2021 limitée à 12€ pour  la grande majorité des enseignants

 

"C'est au mois de mars qu'on va pouvoir préciser certaines choses. Il y a des augmentations qui ont déjà eu lieu comme la prime informatique mais aussi la prime d'attractivité pour les enseignants jeunes qu'ils verront à partir de mai", a déclaré JM BLanquer sur France Inter le 2 mai. "On prépare le budget 2022 dans une perspective ambitieuse pour continuer la revalorisation. Il est important d'avoir une augmentation des salaires mais aussi une augmentation qualitative. J'invite à aller voir le document sur le professeur du 21ème siècle pour voir ce qui peut nous moderniser".

 

Ainsi JM BLanquer ne se limite pas à faire le point de la revalorisation 2021. Alors que les résultats du Grenelle de l'éducation sont attendus depuis début février, il semble avoir fait ses arbitrages et affirme être en situation d'annoncer les conditions d'une revalorisation.

 

La revalorisation décidée pour 2021 est connue depuis le 16 novembre. Tous les enseignants, à l'exception des professeurs documentalistes, touchent une prime informatique de 150€ net. Elle a été versée, en retard, en février. JM Blanquer confirme le versement, attendu en mai, d'une prime d'attractivité qui ne sera versé qu'aux échelons 1 à 7 inclus. Elle sera de 100€ net par mois à l'échelon 1 (1197 € annuels), de 89€ à l'échelon 3 et sera dégressive jusqu'à 35.58€ par mois aux échelons 6 et 7. Au delà : rien. Seulement 31% des enseignants en bénéficieront. La prime sera moins importante pour les contractuels : de 53 € à  27€. Pour  69% des enseignants la revalorisation va se limiter à une prime informatique qui en représente que 12€ par mois. On est donc très loin de ce qui est attendu par les enseignants.

 

Plus question de loi de programmation

 

JM Blanquer annonce une nouvelle étape pour 2022. Mais il ne parle pas de loi de programmation. L'idée d'une véritable revalorisation étalée sur plusieurs années hissant les salaires enseignants français à la hauteur du standard européen semble bien abandonnée.

 

JM Blanquer a beau parler de "perspective ambitieuse", celle-ci n'est pas précisée ni même dessinée. Ce qui l'est c'est les contreparties, celles qui sont inscrites dans la conclusion du colloque sur le professeur du 21ème siècle du Grenelle de l'éducation.

 

L'avancement à l'ancienneté menacé

 

Les groupes de travail du Grenelle ont abordé la question de la rémunération des enseignants. Ils ont imaginé de lier la revalorisation à un devoir d'astreinte au remplacement. Elle dépendra aussi des formations suivies hors temps scolaire. Les primes pourront varier en fonction des lieux. La rémunération pourra varier selon "le mérite". Par exemple "les projets innovants (avec droit à l'erreur), certaines expérimentations devraient pouvoir être récompensés". C'est le cas aussi de "certaines fonction objectivées qui demandent un investissement préalable". Le Grenelle recommande aussi de supprimer les accords PPCR et l'avancement à l'ancienneté. Là l'enjeu est de taille : l'avancement à l'ancienneté c'est 350 millions par an, beaucoup plus que toutes les indemnités qui pourraient être imaginées. C'est aussi renforcer la pression des cadres sur les enseignants.

 

Une refonte du métier

 

Le colloque sur le professeur du 21ème siècle a avancé d'autres idées. Les auteurs veulent réécrire le référentiel de compétences des enseignants pour en faire un cadre contraignant organisant la progression de carrière. " Réorganiser le référentiel de compétences, dans la lignée du rapport du CSEN, afin de rationnaliser la formation selon les domaines de compétence attendus des enseignants, et leurs différents niveaux de maîtrise, de manière synthétique et lisible. Un tel référentiel présenterait un double avantage :  Servir de cadre à la structuration et à l’élaboration des contenus de la formation initiale et continue ;  Lier la progression de l’enseignant dans les niveaux de maîtrise de chaque compétence avec le déroulement de sa carrière". La carrière dépendrait de la conformité acquise à travers des "formations" aux attendus fixés par le référentiel.

 

" Mettre en place des formations fondées sur « l’apprentissage actif et collaboratif », avec un dispositif d’observation et de formation par les pairs, et le développement de formations en fonction d’objectifs partagés de l’établissement". Notez bien que les formations seraient toujours décidées sans avis des enseignants ("par l'établissement") et que l'argument des pairs est lié à "un dispositif d'observation". Le tout aboutit à "un système de valorisation" dans la carrière des enseignants. Des "temps collectifs" seraient introduits dans les obligations de service pour surveiller le maintien de la conformité des enseignants.

 

Inutile de chercher où les auteurs ont trouvé ce modèle. Ils l'indiquent eux mêmes : c'est Singapour. Voilà un pays où les enseignants sont surveillés et évalués en permanence en formation et dans leur classe par des pairs un peu plus anciens, selon un système de grades sophistiqué. Tout le système est tendu vers l'application de référentiels imposé à la profession et qui ne peut en aucun cas être critiqué puisque "basé sur la recherche".

 

Un budget mensonger

 

Jusqu'où JM Blanquer est-il prêt à aller sur cette voie ? L'année 2021 nous a quand même apporté une  certitude qui mérite d'être soulignée. Les annonces budgétaires de JM BLanquer n'ont plus de crédibilité. Depuis le 17 février on a une vision probablement définitive du budget 2020 de l'Education nationale. Alors que ses prédécesseurs avaient souvent du mal à terminer l'année et assurer la paye de décembre, JM Blanquer a économisé 640 millions en 2020. C'est une somme colossale, largement supérieure aux 400 millions de la revalorisation 2021. Cela veut dire que le budget de l'éducation nationale en 2020 a été de 52 milliards et non de 52.7 et que la hausse d'un milliard présentée en septembre 2019 était de la poudre aux yeux.

 

Avec une telle différence entre budget annoncé et budget réel, tout semble remis en question pour 2021. Alors quelle crédibilité pourrait avoir une annonce pour 2022 faite en mars pour un budget qui n'est à peu près constitué qu'à l'été ? Si JM Blanquer a des idées sur l'évolution du métier enseignant, ses annonces budgétaires sont sujettes à caution.

 

François Jarraud

 

Recommandations du Grenelle

Résultats du colloque

640 millions économisés en 2020

 

 

Par fjarraud , le mercredi 03 mars 2021.

Commentaires

  • Eliel, le 05/03/2021 à 18:14
    Personnellement je suis enseignant contractuel en CDI pour l'Académie de Créteil et je n'ai pas reçu la prime informatique fin février comme d'autres contractuels. Je suis surpris, j'attendais avec impatience un article de votre part sur le sujet mais visiblement une grande majorité à l'air de l'avoir reçu et vous n'avez pas eu écho de problèmes de versements sinon vous l'auriez précisé. Bizarre.
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