Un protocole sanitaire inadapté ?  

Est-il approprié d’alléger le protocole sanitaire des écoles et établissements scolaires au moment où le conseil scientifique annonce l’arrivée d’une seconde vague virale ? C’est pourtant ce que fait l’Education nationale avec la publication, le 21 juillet d’un nouveau protocole sanitaire, suivie le 28 d’un nouveau décret sanitaire. Ces textes allègent toutes les barrières existantes face au virus avec l’objectif annoncé de remplir les classes à la rentrée. Seul le port du masque est maintenu pour les élèves (hors écoles maternelles). Est-il imaginable de l’appliquer à la rentrée ?

 

Une seconde vague épidémique annoncée 

 

 « Il est hautement probable qu’une seconde vague épidémique apparaisse à l’automne – hiver prochain ». Dans un avis rendu le 27 juillet, le conseil scientifique Covid-19 ne fait pas mystère d’une nouvelle vague pandémique. « Il insiste sur la nécessité d’une campagne d’information rappelant l’importance du masque et des mesures barrières durant cette période d’été ». Très clairement le conseil demande des mesures immédiates parce que « les Français semblent avoir moins observé les mesures barrières et la distanciation physique ». Ces propos ont été suivis d’une déclaration du premier ministre, J Castex, le 11 aout 2020 précisant que « depuis deux semaines environ, la situation épidémiologique, que nous surveillons de très près, évolue en effet dans le mauvais sens ».

 

Face à cette reprise de l’épidémie, le protocole sanitaire concocté par l’Education nationale pour la rentrée semble particulièrement inadéquat. Comme en mars, L’Education nationale évolue à rebours de l’action générale du gouvernement.

 

Le protocole donne la priorité au retour en classe

 

Publié quelques jours avant l’avis du Conseil scientifique, le protocole établit que « dans les espaces clos (salles de classe, ateliers, bibliothèques, réfectoires, cantines, internats, etc.) la distanciation physique n’est plus obligatoire lorsqu’elle n’est pas matériellement possible ou qu’elle ne permet pas d’accueillir la totalité des élèves ». C’est donc le remplissage des classes qui est maintenant l’objectif premier, devant la sécurité des élèves et des personnels. On sait que le nombre d’élèves par classe est particulièrement élevé en France, rendant impossible le maintien d’un mètre de distance entre élèves. Les élèves sont généralement entassés. Ce n’est pas mieux en récréation puisque « dans les espaces extérieurs la distanciation physique ne s’applique pas ». 

 

La limitation du brassage des élèves « n’est plus obligatoire » et les établissements organisent le déroulement des journées à leur guise  même s’ils sont invités à « limiter » les croisements et regroupements importants. Il n’y a plus de limitation du brassage dans les transports scolaires.

 

Le lavage des mains continue à être présenté comme « essentiel » et doit avoir lieu plusiuers fois par jour. Mais aucune obligation n’a été faite aux collectivités locales de rendre cette recommandation possible en faisant les travaux nécessaires durant l’été.

 

Le nettoyage et la désinfection des locaux sont eux aussi allégés. Le protocole demande un nettoyage des sols et surfaces par jour, un nettoyage des surfaces touchées fréquemment par les élèves (poignées de portes par exemple) par jour. On peut à nouveau partager des objets au sein de la classe.

 

 

Finalement il ne reste qu’une seule barrière : le masque. « Les élèves de plus de 11 ans doivent porter le masque de protection dans les espaces clos et extérieurs, lors de leurs déplacements ainsi qu’en classe, lorsque la distanciation d’un mètre ne peut être garantie et qu’ils sont placés face à face ou côte à côte ».  Les personnels doivent aussi porter le masque quand la distanciation d’un mètre ne peut être garantie. Ils ne les portent pas en écoles maternelles et dans les autres niveaux en classe s’ils sont à plus d’un mètre des élèves. La faible transmission du virus par les enfants les plus jeunes fait encore débat chez les spécialistes.

 

Confirmé par un nouveau décret sanitaire

 

Ces consignes se retrouvent dans un nouveau décret sanitaire publié le 28 juillet. Il dit, dans une formulation que l’on appréciera, que « dans les établissements d'enseignement… l'observation d'une distanciation physique d'au moins un mètre ou d'un siège s'applique, entre deux personnes lorsqu'elles sont côte à côte ou qu'elles se font face, uniquement dans les salles de cours et les espaces clos et dans la mesure où elle n'affecte pas la capacité d'accueil de l'établissement ». Le décret confirme le port du masque par les collégiens et lycéens « lorsque la configuration de ces derniers ne permet pas le respect des règles de distanciation qui leur sont applicables ». Il précise que les personnels des écoles maternelles ne portent pas de masque quand les règles de distanciation ne sont pas respectées.

 

Une nouvelle rentrée désorganisée ?

 

L’Education nationale a donc largement baissé la garde, rendant infiniment plus facile l’organisation de la rentrée scolaire. Le problème c’est que l’évolution prévisible de la situation sanitaire rend ce protocole publié fin juillet déjà caduc. Dans un entretien donné à France Bleu le 5 aout, le président du Conseil scientifique, JF Delfraissy annonce que de nouvelles mesures pour la rentrée sont en préparation avec el retour de la distanciation.

 

Si c’est le cas, à quoi aura donc servi ce protocole du 21 juillet ? Seulement à perdre le temps de l’été pour une organisation sérieuse de la rentrée, y compris dans ses composantes budgétaires. 

 

François Jarraud

 

Le nouveau protocole sanitaire

Le décret du 27 juillet

Le décret du 10 juillet

L’avis du conseil scientifique

L’interview de JF Delfraissy

 

 

 

Par fjarraud , le vendredi 14 août 2020.

Commentaires

  • lcarcel, le 19/08/2020 à 13:08
    On se fiche de nous! Alors que le masque et les barrières sociales s'imposent partout, même à l'extérieur, on veut nous faire croire que la COVID n'existe plus une fois franchies les barrières de l'école. On envoie les enseignants et le personnel (mais aussi les parents et leurs ascendants) au casse pipe! De plus, LA SEULE ETUDE PUBLIEE faite sur la contagiosité des jeunes enfants le 30 juillet (voir lien) montre qu'ils peuvent être 10 à 100 fois plus contagieux que les adultes avec la circonstance aggravante que la plupart du temps, ils sont asymptomatiques.
    https://www.ouest-france.fr/sante/virus/coronavirus/coronavirus-les-enfants-de-moins-de-cinq-ans-pourraient-etre-extremement-contagieux-selon-une-etude-6923714

    En juin, les enfants sortaient de 2 mois de confinement, mais tel ne sera pas le cas en septembre. 
    Nous attendions une augmentation? Elle aura bien lieu, une augmentation du nombre d'infectés au COVID, en espérant  qu'elle ne sera pas une augmentation de la mortalité des personnels.

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