Virginie Estève : Paysages sonores et géographie sensible du confinement 

« Je voulais leur montrer que la géographie sert à comprendre le monde. Et aussi faire en sorte qu’ils ne soient pas des spectateurs passifs de la pandémie ». Professeure au collège de la Serre de Sarsan à Lourdes, Virginie Estève a fait réaliser à ses collégiens des cartes sonores durant et après le confinement. Une découverte de leur environnement qui invite les élèves à cartographier aussi leurs sentiments sur leur espace et donc la façon dont ils se l’approprient. La géographie ça sert aussi à parler émotions…

 

Une géographie sensible

 

 Travailler les émotions et les bruits de la ville est une pratique venue des urbanistes, nous rappelle V Estève. Elle leur permet de travailler plus finement leurs projets d’aménagement. En classe d’histoire-géographie, comme dans d’autres disciplines, on fait rarement appel aux émotions. On s’en méfie alors qu’elles ont leur rôle dans l’apprentissage.

 

Alors travailler les espaces sensibles est-ce encore de la géographie ? « Les élèves en doutent », nous dit V Estève. « Pour eux, apprendre de la géographie c’est « apprendre des lieux ». Ils ne la voient pas comme une science qui étudie l’interaction entre l’homme et son milieu. Or dans cette optique l’étude des paysages est un outil idéal.

 

Le projet

 

 Dans ce projet V Estève entraine 15 élèves volontaires à qui elle demande de faire 2 collectes d'enregistrements dans les semaines des 23 avril et 25 mai, pendant et après le confinement. Les élèves analysent les sons enregistrés, les classent et réalisent des cartes ou/et des sketchnotes sur ces espaces sonores. Ils prennent des photos. Tout ce travail se fait à distance avec envoi des documents via l’ENT et après une initiation méthodologique faite elle aussi à distance.

 

« On garde ainsi des traces de ce moment exceptionnel », nous dit V Estève. « Les élèves se rendent compte des bruits du milieu rural. Ils constatent les mutations des bruits avec la sortie du confinement, le glissement de certains bruits dans le temps ». Avec la réalisation des cartes ils organisent l’espace dans lequel ils vivent. Ils l’interprètent et lui donnent sens.

 

Une géographie citoyenne

 

 « C’était important de travailler sur le sensible pendant le confinement. On se demandait comment allait nos élèves. Or rien n’apparaissait dans les échanges avec eux. Ils ne se livraient pas. Travailler sur le sensible a permis de recueillir des émotions ». Le confinement est aussi apparu  comme un moment exceptionnel sur le plan scolaire. « Avec nos programmes chargés on a du mal à mettre en place ce genre de projet en temps ordinaire », reconnait V Estève.

 

Mais finalement c’est cette appréhension de l’espace et donc de la géographie qui compte pour l’historien géographe. « On leur enseigne plein de choses en géographie jusqu’au bout du monde. Mais eux ne savent pas qu’ils vivent dans une vallée. Leur faire découvrir à pied leur espace proche c’est les outiller pour leur rôle d’adulte ».

 

Propos recueillis par F Jarraud

 

Les réalisations des élèves

Dans le Café : Travailler les paysages sonores

Dans le Café : des cartes sensibles pour penser son espace

Dans le Café : V Estève

 

 

 

Par fjarraud , le vendredi 03 juillet 2020.

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