Blanquer et l'impossible débat 

"C'est faux !" "N'importe quoi !" "Vous répandez des mensonges". Après des mois de péroraisons devant des animateurs triés sur le volet, JM Blanquer a montré le 6 février sur France Culture qu'il n'est pas capable de débattre avec un véritable contradicteur. Le ministre avait face à lui Philippe Meirieu, un des meilleurs spécialiste de  l'Ecole. Très vite le ministre  a perdu son calme, revendiquant le droit de couper la parole à Philippe Meirieu. Très vite son seul argument a été d'accuser son contradicteur de "bombarder de mensonges tous les jours" et même de "détruire". Après ses invectives à l'Assemblée et au Sénat les 4 et 5 février, JM Blanquer montre qu'il n'est plus capable de défendre la politique gouvernementale. Peut-être parce qu'il est clair maintenant qu'elle n'est plus défendable.

 

"Il faudrait me dire sur quoi faire un mea culpa"

 

 Comme les conjoints adultères pris sur le fait avec leur "n'avouez jamais", avant même que Philippe Meirieu participe à l'émission, JM Blanquer est à nouveau dans le déni systématique le 6 février sur France Culture.

 

Il estime par exemple qu'il n'y a pas d'arrogance au gouvernement ou de problèmes avec les nouveaux programmes du lycée. "Il faudrait me dire sur quoi faire un mea culpa", déclare le ministre alors qu'un bon tiers des lycées est perturbé et que les professeurs font des grèves massives. JM Blanquer nie aussi qu'il y ait des problèmes liés à la réforme des retraites. "On est en situation de garantir un niveau de retraite et d'améliorer la rémunération des enseignants" affirme  t-il à nouveau. "La revalorisation on va la faire". Une promesse tellement répétée depuis avril 2019  que plus aucun enseignant y croit. "On appelle lourd un programme sérieux qui ne nous plait pas", assène le ministre qui justifie les nouveaux programmes de maths du lycée, très critiqués par l'association des professeurs de maths, par "une exigence renouvelée" et la volonté de hausser le niveau des élèves. Tout au plus concédait-il la possibilité que le comité de suivi "améliore" la réforme comme cela a d'ailleurs été fait récemment en maths et français.

 

"Je n'ai jamais vu une telle rupture entre les enseignants et le ministre"

 

Mais voilà que France Culture met face au ministre, non pas un interlocuteur complaisant, mais un spécialiste de l'Ecole, Philippe Meirieu. Quelqu'un capable de pointer ce qui ne va pas et aussi ce qui va , comme par exemple son hommage rendu au chef d'oeuvre introduit en CAP.

 

"Je n'ai jamais vu une telle rupture entre la majorité des enseignants et l'éducation nationale et son ministre. Les réformes ne sont pas seules en cause. Il y a la souffrance au travail de la part de beaucoup d'enseignants. A cette situation s'ajoute la brutalisation des instits avec des injonctions permanentes, une évaluation systématique qui donne l'impression aux enseignants qu'il n'y a pas de liberté pédagogique" dit P Meirieu. Il met des mots sur les maux dont parlent tant d'enseignants en ce moment, particulièrement depuisle suicide de C Renon, évoqué par P Meirieu comme un élément de cette période inédite.

 

Le bac : un examen permanent

 

Sur les nouvelles épreuves du bac, P Meirieu estime que "officiellement c'est du controle continu mais en réalité c'est un examen permanent..., un bachotage permanent et non de l'exigence.. Je crois à un bac national qui maintenait une culture commune à côté d'options qui permettent de se spécialiser... Aujourd’hui le bachotage de fin de terminale est remplacé par un bachotage permanent".

 

"Les enseignants ont un sentiment de prolétarisation"

 

"Il y a le sentiment d'un déclassement général. Vous avez précarisé les enseignants" dit P Meirieu faisant allusion à la loi de transformation de la fonction publique qui encourage et permet de multiplier les contractuels. "Les enseignants ont un sentiment de prolétarisation".

 

En coupant la parole à P Meirieu, JM Blanquer l'accuse plusieurs fois de dire des mensonges. "C'est terrible vous répandez des mensonges", dit le ministre. "Il y a une manière de caricaturer qui est votre manière de procéder... Toute la journée on bombarde de mensonges et Meirieu y participe. Des gens comme vous passent leur temps à dire cela... Ce type de discours détruit". Le dénigrement de son interlocuteur montre à l'antenne que le ministre n'a pas d'arguments à lui opposer. Que contrôle encore JM Blanquer ?

 

François Jarraud

 

 

 

Par fjarraud , le vendredi 07 février 2020.

Commentaires

  • Rodolphe DUMOUCH, le 08/02/2020 à 15:31
    Militant du SNALC, je co-signe les propos de Philippe Meirieu... Il faut que la situation soit grave et inédite pour en arriver là, non ? 
    Quant aux promesses de JMB auxquelles personne ne croit, rappelons que le Conseil d'Etat les a déclarées inconstitutionnelles. Nous avons don affaire à un champion : il est docteur en droit constitutionnel. 
    • pauleau, le 10/02/2020 à 10:55
      "Il n'est pire sourd que qui ne veut pas entendre". Le problème, dans cette discussion, est que notre ministre écarte systématiquement comme infondée toute critique et donc refuse le droit de penser valablement à tout contradicteur. De l'absence d'empathie on passe directement au mépris.
      Malheureusement, regarder le bout de ses chaussures pour avancer n'est pas forcément la meilleure façon de choisir le chemin....
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