Pour le Snes, la réforme du lycée aggrave les inégalités d'orientation 

Censée casser la hiérarchie des filières et libérer les ambitions des élèves, la réforme Blanquer fait le contraire si l'on en croit une étude publiée par le Snes. Sans prétendre à la représentativité elle porte quand même sur 4000 lycéens d'une vingtaine de lycées de plusieurs académies. Selon l'étude, l'analyse des choix de spécialités (triplettes) demandées par les élèves montre que les filières se reconstituent en aggravant les inégalités sociales, de genre et territoriales.

 

Reconstitution de filières dissoutes

 

" Les statistiques présentées dans cette note doivent être maniées avec précaution, car la collecte des données repose sur les remontées d'établissements dans lesquels des militants SNES ont pu y avoir accès, soit pour leurs classes, soit pour l'ensemble de l'établissement. L’échantillon ne respecte donc pas formellement les règles de la méthode statistique, et on ne peut pas affirmer avec certitude qu’il est représentatif", prévient le Snes. En effet selon les questions l'échantillon varie fortement. Mais pour plusieurs questions l'enquête porte sur 3998 élèves de 19 lycées issus de 17 départements.

 

Avec la réforme Blanquer et la mise en place des spécialités en 1ère, les élèves de 2de doivent choisir 3 spécialités. Selon l'étude, cela n'a pas remis en question les anciennes filières. "Les trois spécialités les plus souvent demandées par les élèves sont justement les trois disciplines centrales de la série S. Elles sont suivies par deux disciplines qui sont au centre de la série ES, elles-mêmes suivies par deux disciplines typiques de la série L" Ainsi 66% des élèves demandent maths, 50% svt, 47% physique chimie, 43% SES.

 

 

 

Les arts et LCA grands perdants

 

Une analyse sur l'académie de Versailles montre que les LCA et les disciplines artistiques sont les grands perdants de la réforme car très peu demandés. Autre remarque : dans le lycée actuel 90% des élèves font maths en 1ère. Dans le lycée Blanquer ce ne sera plus que 66% avec toutes les conséquences sur l'orientation. Dès maintenant, on peut dire que l'élévation du niveau en maths, avec la spécialité, filtre davantage les élèves que les filières.

 

Aggravation des inégalités ?

 

Or ce tri aggraverait les inégalités. Selon l'enquête les écarts de genre sont accrus dans la nouvelle configuration. Ainsi au lieu de 40% des garçons en S actuellement il y aura 70% des garçons en spécialité maths l'année prochaine. A vrai dire la démonstration n'est pas faite car l'échantillon pour cette question est déséquilibré (601 filles et 438 garçons) et ca donnerait au final 342 filles et 306 garçons , c'est à dire un pourcentage supérieur aux 47% de filles actuel.

 

Ce qui est certain par contre c'est que la réforme rétablit la hiérarchie des filières. 80% des bons élèves demandent spécialité maths, 56% physique contre 20% langues vivantes ou  14% humanités philosophie.

 

La démonstration est faite aussi pour les inégalités territoriales. Le pourcentage de demandes de spécialités est directement lié à la présence ou non de la spécialité dans le lycée. Ainsi pour NSI seulement 3% des élèves la demandent quand elle n'est pas proposée par le lycée contre 15% dans le cas contraire.

 

Le Snes demande un moratoire

 

Pour le Snes, " la “liberté de choix” est donc un leurre et les déterminismes sociaux, de genre et de niveau ne sont pas remis en cause. Le discours sur la possibilité de choisir des spécialités dans d’autres établissements est sans fondement : sans surprise, les choix de spécialités des élèves sont massivement guidés par leur présence dans l’établissement. Les premiers de cordée seront les seuls à tirer leur épingle du jeu de ce lycée où le devenir scolaire des élèves sera décidé dès la Seconde. Choisir à la carte plutôt qu’auparavant un menu est plus facile quand on en a socialement les moyens… Le SNES-FSU continue de demander que le ministre renonce à sa réforme. Dans l’urgence, il doit annoncer un moratoire pour la rentrée 2019.

 

F Jarraud

 

L'étude

 

 

 

Par fjarraud , le vendredi 19 avril 2019.

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