EPSF : Blanquer cède ? 

La forte mobilisation des enseignants du premier degré dans le mouvement du 19 mars a-t-elle déjà porté ses fruits ? Dans une vidéo postée sur Facebook, le ministre de l'éducation nationale semble revenir sur la mise en place des établissements publics des savoirs fondamentaux (EPSF) et le maintien des directeurs d'école. Des points qui irritent fortement les professeurs des écoles. Le ministre semble amorcer un pas en arrière. Mais il a aussi tenu des propos différents à l'Assemblée le même jour. Et les enseignants ont-ils encore confiance dans ses déclarations ?

 

L'avis des conseils d'école demandé pour ouvrir un EPSF ?

 

"J'ai tenu à donner aux communautés éducatives une liberté nouvelle", explique JM Blanquer dans une intervention vidéo sur Facebook. Le regroupement des écoles et d'un collège  dans un établissement public des savoirs fondamentaux (EPSF) ne sera "pas obligatoire... Les communautés de manière consensuelle peuvent choisir", dit-il.

 

JM Blanquer semble donner une garantie nouvelle : "la création (des EPSF) doit résulter de la demande de la communauté éducative et aussi de la communauté scolaire. On pourra faire évoluer le texte sur ce point".  Le texte de la loi adoptée par l'Assemblée prévoit que la création de l'EPSF soit décidée par le préfet sur demande du département et des communes après avis du représentant de l'éducation nationale. En parlant de "communauté scolaire" le ministre semble dire qu'il faudra aussi l'avis des conseils d'école. Il faudrait dans ce cas modifier la loi. Mais le ministre n'a pas employé la formule "conseil d'école" ou "conseil d'administration  du collège", ce qui aurait levé toute ambiguïté.

 

Les directeurs préservés ?

 

JM BLanquer intervient aussi sur l'avenir des directeurs. "Dans ces EPSF des directeurs d'école resteront des acteurs majeurs. Il ne s'agit pas d'en finir avec les directeurs... Toutes les écoles conserveront leurs directeurs. Selon les modalités arrêtées par les acteurs locaux ils travailleront avec le principal. Dans certains cas un directeur sera un véritable adjoint du principal. Dans uen autre école il y aura une autre organisation. C'est de cette souplesse que l'on a besoin".

 

Ce que présente maintenant JM Blanquer c'est une structure souple, selon les voeux des "acteurs locaux" (les collectivités locales ?), avec ou sans maintien des directeurs d'école. Sur ce point, JM Blanquer annonce une réécriture totale de la loi. Celle ci ne parle pas des directeurs d'école. Elle précise que l'EPSF est dirigé par un principal assisté de principaux adjoints (donc du corps des personnels de direction) dont un aura en charge les classes du premier degré.

 

Quant le ministre dit que " dans certains cas un directeur sera un véritable adjoint du principal", il faut évidemment comprendre qu'un directeur d'école peut être principal adjoint... dès qu'il est reçu au concours des personnels de direction...

 

Enfin le ministre affirme que l'EPSF n'est pas là pour fermer les écoles rurales, "il n'y aura pas de fermetures d'écoles rurales". Mais là qui le croira ?

 

Des propos contredits le jour même à l'Assemblée

 

On aimerait croire que les enseignants du premier degré soient entendus sur des points si importants. Dans ce cas on devrait voir circuler rapidement des projets d'amendement qui pourraient être déposés début mai au Sénat lors de l'examen de la loi.

 

Mais ce qui relativise ces propos tenus sur Facebook, ce sont d'autres propos tenus le même 19 mars par JM Blanquer devant l'Assemblée lors de la séance des questions au gouvernement. Répondant à la députée socialiste Michèle Victory, JM Blanquer précise :  "Aucune création d’un établissement public des savoirs fondamentaux n’aura lieu contre la volonté des communautés éducatives...  Je sais bien que certains essaient de décrire les choses autrement : d’aucuns affirment qu’il s’agit de fermer des écoles rurales, d’autres qu’il s’agit de mettre en cause le statut des directeurs d’école. C’est exactement le contraire : ce dispositif est fait pour sauver les écoles rurales et pour rassembler les écoles et les collèges qui le désirent !.. Cela ne sera imposé à personne. Enfin, l’objectif est de consolider le statut de directeur d’école, par conséquent l’école de la République".

 

Ce qui est inquiétant dans ces propos c'est que le ministre parle de "communauté éducative" et même pas de communauté scolaire. Les deux formules n'ont pas de sens précis sur le plan administratif mais communauté scolaire est moins vague que communauté éducative.

 

Surtout le ministre ne parle pas d'avoir plusieurs modes d'organisation administrative des EPSF.  Il ne promet pas de garder tous les directeurs. Sur un point aussi essentiel, le ministre tient deux discours différent le même jour. Enfin suite au rapport Reiss (LR), la majorité LR du Sénat semble acquise au regroupement et à la mise des écoles sous tutelle des principaux. On voit mal le ministre les contrarier sur ce point.

 

On accueillera donc avec prudence ces propos. Ou le ministre veut modifier la loi avant que le Sénat ne s'en occupe. En ce cas il devrait préciser ses propos et faire circuler le texte des amendements. Ou il s'agit encore une fois de propos sans fondement tenus pour calmer l'opinion.

 

Pour plusieurs députés de l'opposition, la question ne se pose plus et  JM Blanquer n'est plus crédible.  "Ça, c’est faux", dit le député LR Maxime Minot. "Mensonge !", résume la députée GDR Huguette Bello. "Menteur" dit Pierre Cordier (LR). Des qualificatifs que JM Blanquer n'entendait pas il y a seulement un mois.

 

François Jarraud

 

Sur Facebook

A l'Assemblée

Les EPSF dans la loi Blanquer

 

 

 

Par fjarraud , le mercredi 20 mars 2019.

Commentaires

  • DoMomi, le 20/03/2019 à 09:11
    Petite précision : il existe bien une définition légale de la communauté éducative. C'est justement l'objet de l'article L111-3 du Code de l'éducation. La définition légale originelle venait de la loi d'orientation sur l'éducation de 1989. Elle a été complétée par la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la république de 2013 :

    Dans chaque école, collège ou lycée, la communauté éducative rassemble les élèves et tous ceux qui, dans l'établissement scolaire ou en relation avec lui, participent à l'accomplissement de ses missions.

    Elle réunit les personnels des écoles et établissements, les parents d'élèves, les collectivités territoriales, les associations éducatives complémentaires de l'enseignement public ainsi que les acteurs institutionnels, économiques et sociaux, associés au service public de l'éducation.

    En revanche, je ne suis pas sûr qu'il existe une définition légale de la communauté scolaire. Dans une circulaire de juillet 2000 sur le règlement intérieur des EPLE, l'expression apparaît par deux fois, comme une variante de la communauté éducative qui est citée sept fois.

    • fjarraud, le 20/03/2019 à 11:18
      merci d ecette remarque. Mais rien ne dit comment cette communauté éducative décide. Et c'est tout l'enjeu...
      cordialement
      • DoMomi, le 21/03/2019 à 10:03
        Nous sommes bien d'accord. 

        Cordialement
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