12 novembre : Un mouvement déterminant ? 

Bien que tous les syndicats enseignants appellent à faire grève et à manifester le 12 novembre, le mouvement sera-t-il important ? Ce n'est pas sur au regard des premières indications données par les syndicats. Ainsi dans le premier degré, où les enseignants doivent se déclarer grévistes à l'avance depuis 2008, le Snuipp annonce 25% de grévistes, soit guère plus que le mouvement du10 octobre 2017. Cette journée de mobilisation est pourtant lancée alors que le gouvernement sanctionne les fonctionnaires et annonce des réformes décisives et que le ministre multiplie les réformes et exerce des pressions pédagogiques de plus en plus fortes au moins dans le premier degré. Un échec de cette journée ouvrirait un boulevard au gouvernement. A l'inverse, un fort taux de mobilisation pourrait marquer un temps d'arrêt pour un président et un gouvernement dont les cotes de popularité s'effondrent.

 

 Tout semble réuni pour faire de la journée du 12 novembre, une date dans l'histoire de l'Ecole. A quelques semaines des élections professionnelles, les syndicats enseignants ont su s'unir pour lancer un mouvement commun. Fsu, Unsa, Sgen Cfdt sont à l'initiative de la journée. Mais ils ont été rejoint par les autres organisations, y compris le Snalc pourtant proche du ministre.

 

Le rôle du #pasdevagues

 

La journée arrive alors que les enseignants sont encore dans le phénomène #pasdevagues. Cette vague a fait exploser la stratégie de communication du ministre qui depuis 2017 vante "l'école de la confiance". Incontestablement , il n'y a pas de confiance entre les enseignants et l'institution Education nationale. Les réponses ministérielles ne prennent pas. Les premières déclarations sur les centres éducatifs fermés ont semblé totalement à cote de la plaque (sans parler du coût pour 240 places !). Dans son intervention du 31 octobre le ministre a multiplié les déclarations en faveur des enseignants, promettant la protection fonctionnelle et mettant leur parole par exemple avant celle des élèves. Mais les enseignants savent bien que la situation réelle dans leur établissement dépend des postes  et notamment des non enseignants. Or le ministre en supprime encore après avoir vidé les établissements des contrats aidés. Si JM Blanquer n'apporte pas de réponse convaincante aux enseignants, personne ne le rendra responsable de l'absence de confiance. Le phénomène est bien plus ancien.

 

Les suppressions de postes

 

Les syndicats dénoncent "la fin de la priorité accordée à l'éducation nationale" et le retour aux suppressions de postes, "une logique appelée à s'amplifier". Dans le premier degré, les 1800 créations de postes dans le premier degré ne permettront pas faire face aux dédoublements des Ce1 de l'éducation prioritaire annoncés pour la rentrée 2019. Il faudrait au moins 4000 postes. La majorité des nouveaux postes de Ce1 devra être trouvée dans les autres classes et chez les maitres plus. Les dédoublements de CE1 vont donc se faire aux dépens des autres niveaux où les classes seront plus  chargées.

 

Dans le second degré 2650 postes d'enseignants disparaissent alors qu'on attend 40 000 élèves en plus. Si la réforme du lycée va libérer des postes d'enseignants, au collège la situation va encore se dégrader. La promesse de compenser par des heures supplémentaires parait peu sérieuse au regard du budget. Enfin près de 500 postes administratifs disparaissent et la suppression de ces emplois indispensables ne sera pas compensée.

 

Le refus des réformes

 

Mais à vrai dire les syndicats ont bien d'autres raisons de jouer l'épreuve de force avec le ministère. Il y a le système d'évaluations  qui se met en place et dont la perspective semble bien être la paye au mérite des enseignants et le pilotage par les résultats. Il y a les injonctions pédagogiques de plus en plus pesantes à l'école élémentaire et qui vont gagner la maternelle avec les évaluations de CP et la réforme des programmes en 2019. Il y a aussi la réforme des lycées. Au lycée professionnel elle va se solder par des suppressions importantes de postes et une déqualification des élèves. Au lycée général et technologique on voit la main mise du supérieur sur le secondaire et la concurrence s'amorcer entre établissements et disciplines.

 

Il y a aussi tout le versant Fonction publique où le gouvernement semble à la fois punir les fonctionnaires (jour de carence, gel du point, csg, retraite et plus récemment l'absence d'allègements des charges sociales qui améliorent depuis octobre les rémunérations dans le secteur privé) et chercher le conflit avec les syndicats en voulant supprimer les commissions paritaires.

 

Quitte ou double ?

 

Les syndicats organisent le 12 novembre des cortèges dans tous les départements. Pour autant rien n'assure que la journée soit un succès.  On sait que le mouvement est très moyennement suivi dans le premier degré avec 25% de grévistes annoncés par le Snuipp Fsu. Il est vrai que dans la surenchère syndicale, des grèves ont eu lieu juste avant les vacances de la Toussaint asséchant le vivier de novembre. Ainsi à Paris la grève de fin octobre contre la semaine de 4.5 jours explique l'échec du mouvement de novembre.  Dans le second degré on peut s'attendre à des taux de grévistes très différents selon les régions. L'ouest et le sud ouest pourraient avoir des taux importants alors que des zones difficiles semblent avoir du mal à se mobiliser.

 

Sans nul doute le ministre suivra de près le mouvement. Un taux de participation faible ou juste identique à celui d'octobre 2017 ne ferait qu'inviter le gouvernement à aller plus vite encore vers la réforme du statut des enseignants.

 

François Jarraud

 

 

Par fjarraud , le lundi 12 novembre 2018.

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