Comment profs et élèves se catégorisent-ils ? 

"Celle là c'est une locomotive". "Celui-ci il a de petits moyens". Tous les enseignants sont amenés à ranger les élèves dans des petites boites étiquetées. Et les élèves le leur rendent bien en triant les professeurs entre gentils et méchants, entre ceux qui m'aiment et les autres. Quelle importance ont ces catégorisation sur le niveau scolaire des élèves ? Comment évoluent-elles au fil de l'année ? Comment influent elles sur les pratiques d'enseignement ? Ces questions sont abordées dans un nouveau numéro de Recherches en éducation. Partant d'observations faites en classe les chercheurs tentent de rendre visible une part immergée de l'iceberg et de montrer à quoi elle sert.

 

Coté enseignants...

 

" La compréhension de ce qui se joue entre enseignants et apprenants nécessite de s’intéresser à la façon dont ils interprètent les situations de classe et leurs interactions. Dans ce dossier, il s’agit d’approcher les activités des enseignants et de leurs élèves en classe par le concept de « catégorisation »...  La catégorisation est entendue ici dans le sens de processus cognitif constitutif de l’activité, en l’occurrence de l’activité en classe : d’une part les enseignants « catégorisent » les éléments de leur environnement pour pouvoir agir, remplir leurs missions, faire leur travail et d’autre part, les élèves « catégorisent » l’environnement qui les entoure pour pouvoir agir dessus". Lara Laflotte et Hélène Veyrac qui ont coordonné ce numéro en fixent les objectifs : " le répertoire cognitif des enseignants est-il organisé selon des catégories distinctes d’élèves ? Les enseignants ont-ils recours à des routines pédagogiques particulières ? L’appartenance plus ou moins prononcée des élèves à ces catégories est-elle associée à des comportements pédagogiques effectifs ?"

 

Hélène Veyrac et Julie Blanc montrent comment les enseignants construisent leurs catégories. " Cet ensemble de résultats laisse apparaître une représentation des élèves par les enseignants triplement multicritériée. Premièrement,.. parce qu’un  enseignant peut, dans le même temps, décrire sa classe sous différentes configurations. Deuxièmement,.. tout se passe comme si, pour un moment donné, un enseignant n’appréhendait pas tous les sous-groupes d’élèves avec les mêmes critères, selon une « grille de lecture » unique : la grille change en fonction des sous-groupes d’élèves concernés".

 

Cette grille changeante a-t-elle un impact sur l'enseignement ? Les résultats sont décevants. Selon Lara Laflotte, qui a observé une trentaine d'enseignants, " la typicité des élèves à leur catégorie a un impact faible sur les conduites pédagogiques menées par l’enseignant. Les résultats montrent que les enseignants rapportent des catégories d’élèves mais qu’elles sont peu utilisées pour enseigner". Si les catégories sont bien là elles  semblent peu actives avant et durant le cours.

 

Coté élèves

 

Mais que se passe t-il du coté des élèves ? Hélène Veyrac, Audrey Murillo, Julie Blanc et Philippe Sahuc ont mené une enquête auprès d'élèves de 4ème d'un lycée agricole avec l'objectif de comprendre comment les élèves classent leurs enseignants et comment ces catégories évoluent dans l'année.

 

 

 


Il apparait que les élèves catégorisent les cours selon le contenu enseigné et s'ils l'aiment ou pas, selon ce qui se passe en cours et selon l'impact du cours sur eux.  Et ces catégories évoluent bien dans l'année. " Les cours/enseignants sont décrits selon les traits suivants  : matière, attirance ou rejet des cours, vécu en classe en terme pédagogique et didactique, utilité des cours et enfin résultats scolaires. Le pôle « curriculum » est dominant en début d’année, il laisse la place, du deuxième au sixième mois de l’année scolaire, à une perception dominée par « ce qui se passe en cours » et à des expressions d’attrait/rejet. Ces dernières sont faibles en début d’année puis augmentent nettement, comme si les expériences vécues cristallisaient, au fil du temps, une perception relativement globalisante des cours/enseignants (j’aime/j’aime pas), laissant au second plan les distinctions plus fines qui auraient pourtant fondé cet attrait/rejet... Pour distinguer un cours d’un autre, la place des résultats scolaires n’est pas centrale pour ces élèves".

 

Peut-être que le principal enseignement de ces études c'est cette cristallisation qui se fait à la fin du premier trimestre. Tout ne se joue pas dans la relation prof élèves le jour de la rentrée. Mais à la fin du premier trimestre les positions sont prises et peu susceptibles d'évoluer.

 

François Jarraud

 

Recherches en éducation

 

 

Par fjarraud , le vendredi 22 juin 2018.

Commentaires

  • eddie007, le 29/08/2019 à 09:46

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