Joëlle Gonthier : « Lire, écrire, compter » entendu, mais pourquoi pas « créer » ?  

Lire, écrire, compter, comme si la vie se résumait à cela et comme si l'avenir de nos enfants devaient exempté de rêve, de créativité et d'engagement, pour aller au plus vite de l'avant et pour frapper plus fort ? "Plus tard", nous dit-on, "quand les fondamentaux seront acquis", viendra le temps d'autre chose... Une vision de bâtisseur qui ignore comme se construisent les êtres au-dedans d'eux-mêmes et comment ils viennent au monde, une seconde fois, bien après leur naissance !

 

L'éducation n'est pas affaire de dosage

 

 Dans les mois qui viennent, en France, ce seront 70 à 100 % du temps scolaire qui devraient-être dédiés à des fondamentaux établis de facto comme tels, dans la mesure où l'art qui les a précédé sur les parois des grottes et leur a donné corps, est occulté ! Autre forme de la révision de l'histoire.

 

L'éducation, l'enseignement et la formation ne sont pas - comme la cuisine et la pâtisserie si en vogue - une affaire de dosage, pas plus que l'application de mesures adoptées suite à des sondages qui font voter ou acheter du crédit, des points de retraite, des vacances, de la viande sous vide, du pain sans gluten... Comment penser que les êtres sont clivés, qu'ils ne sont pas aptes à établir des liens entre ce qu'ils apprennent ici ou là, qu'ils n'ont ni mémoire ni projets, et que l'école est coupée de la société comme l'eau de la piscine l'est de celle du fleuve voisin, tandis que des bouées séparent le bassin en couloirs qui ne communiquent pas entre eux ?

 

Quelle place pour les enseignements artistiques ?

 

Les enseignements artistiques sont-ils destinés à tout jamais à établir une distinction sociale ? Les arts ne sont-ils pas aussi ce qui fait l'humanité ? La poésie adviendra-t-elle seulement parce que l'on sait lire et comment savoir lire sans désir d'apprendre ? Or, qui ou quoi suscitera le désir et quelle place sera faite au plaisir tout aussi vital ? La société à venir sera-t-elle faite de consommateurs, de spectateurs et de citoyens à qui il est demandé d'être plus attentifs aux bagages abandonnés qu'aux voyageurs ?

 

Comment expliquer à un enfant que ce sera plus tard, à certaines heures, dans certaines circonstances et seulement pour certains d'entre nous, qu'une ouverture d'esprit sera autorisée ?

Comment expliquer que le désir et la critique doivent être conservés par devers soi et n'ont pas de place à l'école où le tablier donne une même apparence à tous, et pas plus au travail où "la liberté" se traduira par la déréglementation ou l'absence de droits ? Comment expliquer à nos enfants que leurs parents n'ont pas ni le temps ni les compétences pour inventer un autre monde et que le dérèglement climatique qu'ils subissent n'est que fiction ? Comment se lever le matin et se tenir debout la journée ?

 

 

Joëlle Gonthier

plasticienne, créatrice de La Grande Lessive®

 

 

 

Par fjarraud , le jeudi 27 avril 2017.

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