Sylvain Obholtz : Les valeurs d'un directeur d'école 

"Il y autant de directeurs qu'il y a d'enseignants". C'est quoi le métier de directeur d'école ? A ceux qui se posent cette question, Sylvain Obholtz, directeur de l'école La Rucklin à Belfort, apporte une belle réponse dans un long texte où se construit une philosophie de la fonction. Car être directeur c'est bien plus qu'un métier. Un engagement...

 

 Située en éducation prioritaire, l'école La Rucklin de Belfort, compte 8 classes et près de 200 élèves. Cette petite école est devenue célèbre sur la toile grâce à Sylvain Obholtz, son directeur, dont les sites sont devenus des références pour les professeurs des écoles et les directeurs.

 

Sur "Directeur 90", S Obholtz entretient notamment un "journal du directeur" qui alimente sa réflexion sur le métier de directeur. Un joli texte où S Obholtz définit sa conception du métier dans une pensée qui se déroule et divague un peu au gré des expériences. C'est ce joli texte et cette expérience là que nous lui avons demandé de partager...

 

Dans votre analyse du métier de directeur, vous mettez toujours en avant un travail sur les valeurs. Pourquoi ?

 

Très simplement parce que ce sont les valeurs qui soudent le groupe. Il faut partager des valeurs pour pouvoir travailler dans le même sens. Ces valeurs ce sont celles de l'écolen celles que véhiculent les textes officielles.

 

Par exemple : est-on tous d'accord pour dire que derrière l'élève il y a un enfant qui peut être empêché d'apprendre ? Est on tous d'accord sur l'accueil de la parole, l'écoute active ? Est on d'accord sur ce qu'est une sanction ? La différence avec une punition ? Est on d'accord sur le rôle de l'école ?

 

C'est quoi justement le rôle de l'école ?

 

C'est permettre à chaque enfant de progresser. Je n'utilise pas le mot réussir. Notre devoir c'est faire en sorte que chaque enfant puisse progresser et avoir le sentiment de ce progrès.

 

C'est une valeur qui fait consensus ?

 

Quand on travaille sur un projet, on s'assure que les valeurs du projet sont partagées. Si on n'est pas d'accord, alors au moins on le sait et on va chercher le plus petit dénominateur commun.

 

Ce qui m'intéresse ce sont les projets qui ont des conséquences réelles pour les élèves. Et in ne peut développer un vrai projet que si on se met d'accord  sur ce qui va se traduire dans les faits.

 

Vous développez l'idée que le projet n'est viable que s'il apporte du gain à chaque membre de l'équipe...

 

Il ne faut pas que le travail collectif prenne le pas sur le travail individuel de préparation de la classe. Mais pour que les enseignants travaillent ensemble, il faut qu'ils ressentent une plus value. Quand on se réunit, les gens doivent avoir le sentiment d'avoir gagné quelque chose. Je prends un exemple. Quand on a travaillé sur la réorganisation de la cour de récréation il y a 5 ans, est arrivée l'idée d'avoir une cour plus large ce qui implique davantage de surveillance et donc de service pour les enseignants. IL y a eu des avis défavorables mais la majorité a souhaité essayer. Au bout de la période d'esai , les oppositions ont disparu car chacun a perçu que les récréations étaient devenues plus faciles à surveiller. Le sacrifice était rentable.

 

Le directeur c'est celui qui montre le chemin ?

 

C'est un poste très compliqué car le directeur d'école n'a pas d'autorité hiérarchique. Il ne repose que sur la crédibilité du directeur et l'acceptation de l'équipe de fonctionner en commun. Il repose donc sur l'habileté du directeur à faire partager une culture commune. Une crédibilité qui se construit.

 

Je crois à l'authenticité. Quand on est authentique ça se passe bien, même s'il ya des désaccords. Les collègues voient que l'on prend sa part dans l'effort collectif.

 

Il faut que le métier de directeur reste comme cela ou que la direction devienne un poste hiérarchique ?

 

Personnellement je reste que l'idée d'un directeur non hiérarchique. On est dans de petites unités et on ne peut travailler que si on construit des projets partagés. Je ne crois pas à la contrainte car au final chaque enseignant fait comme il veut dans sa classe.  Je suis pour un directeur pair qui soit un coordonateur de l'équipe et dont le rôle est de poser des questions sans apporter des réponses toutes faites.

 

Cette position permet de poser des débats de fond, de confronter le sopinions et finalemet de s'engager avec authenticité.

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

La direction en question

S Obholtz, directeur et éditeur

 

 

 

 

Par fjarraud , le mercredi 04 janvier 2017.

Commentaires

  • PierreL, le 05/01/2017 à 08:15
    Beaucoup d'admiration pour Sylvain Obholtz, je pioche souvent dans les outils qu'il met en ligne sur son site pour piloter mon école.
    Par contre je suis "désolé" par la question de l'Expresso suivante qui, de mon point de vue, rabaisse le travail de Sylvain. 
    Il faut que le métier de directeur reste comme cela ou que la direction devienne un poste hiérarchique ?
    "Reste comme cela"... Comme si c'était ce type de direction qui est pratiqué dans l'immense majorité des écoles. Ce qui serait intéressant de savoir c'est si Sylvain était déchargé classe, parce que 90% des directrices et directeurs en ont la charge.
    On réalise, en lisant Sylvain, que directeur d'école est un métier à part entière différent de celui d'enseignant bien que l'objet reste le même: l'efficacité auprès des élèves.
    => pour que cela "devienne" comme cela, et pas "reste" comme cela, il faut que l'Institution reconnaisse la spécificité du métier de directeur d'école (ce qui a été fait avec le référentiel métier) mais surtout donne les moyens pour qu'un directeur d'école puisse l'être comme l'est Sylvain.
    - un recrutement ciblé
    - une formation performante
    - pas de classe, même si on peut conserver des heures d'enseignement.

    La question alors serait de savoir si pour cela il faut passer par un statut ou non? 

    De plus, le mal-être grandissant des directrices et directeurs d'école (sur le terrain on ne perçoit pas de simplification au contraire...) ne se règlera pas par la caricature exprimée par l'Expresso:
    - ou le statu quo ou la hiérarchie
    Cette bipolarisation ne sert qu'à conforter les conservatismes dans le primaire alors que toutes les enquêtes, d'où qu'elles viennent, montrent que c'est dans le 1e degré que la souffrance professionnelle et la défiance vis-à-vis des décideurs sont les plus forte.
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