Un lycéen crée un microscope pour téléphone portable 

Comment un lycéen de 16 ans peut-il monter sa startup ? Mokhtar Bacha, lycéen lyonnais et fondateur de la startup Kantum, a créé un microscope qui s’adapte au téléphone portable. Son projet « Voir » vise à améliorer le diagnostic du paludisme grâce à une application. Déjà remarqué dans plusieurs rendez-vous de l’innovation, le lycéen détaille ses idées au Café Pédagogique et porte également son regard sur l’Education nationale. Pour cet élève de 1ère S doué en programmation  « les élèves ont davantage besoin de personnalisation et surtout de pouvoir apprendre à apprendre ».

                                                              

Quel but a votre projet “Voir” ? Comment votre application détecte-t-elle le paludisme ?

 

 « Voir » est une coque qui transforme votre Smartphone en un microscope exceptionnel. En plus de tous les aspects de l'utilisation d'un microscope qui sont couverts par « Voir », je développe une application capable de diagnostiquer automatiquement le paludisme.

 

Ce microscope est donc constitué d'un clip qui va venir s'attacher à votre Smartphone (une simple pièce en plastique) et d'une lentille capable d'un zoom de 100x à 1000x. Pour diagnostiquer le paludisme, il suffit de déposer un échantillon de sang sur une lamelle de l'observer avec votre téléphone. L'application va pouvoir diagnostiquer automatiquement le paludisme grâce à la technologie de Machine learning et de Computer vision.

 

Quelle est l’origine de votre projet ? Quelle sont vos principales motivations ?

 

J'ai commencé à travailler sur ce projet lorsque j'ai lu un article qui disait que le paludisme fait chaque année entre 1 et 2 millions de morts, dont 80% d'enfants de moins de 5ans. Le paludisme peut toucher potentiellement 3 milliards de personnes. Je me suis donc renseigné sur le diagnostic et j'ai découvert qu'il est fait à l'aide de microscope. Vous vous rendez vite compte du problème. Les microscopes classiques sont excellents pour la recherche, mais sur le terrain, en Afrique, ils sont lourds, encombrants, complexes, fragiles et coûteux. De plus, il n’y a pas assez de médecins pour faire le diagnostic. Mon projet répond donc à ces deux problèmes : un microscope peu coûteux et extrêmement simple couplé à une application qui remplace le médecin.

 

Actuellement, que vous manque-t-il pour développer davantage le projet ? Prévoyez-vous des tests sur du sang contaminé ?

 

Pour développer le projet, il me manque une communication suffisante, efficace et ciblée. Pour ce qui est des tests, je suis en contact avec un professeur qui pourra me faire accéder à des échantillons et ainsi apprendre à mon application à diagnostiquer tout en pouvant tester véritablement « Voir ».

 

Concrètement, comment travaillez-vous au quotidien entre start-up et lycée ?

 

Un seul mot : organisation. Je priorise mes tâches. Ainsi quand je rentre chez moi, je fais directement mes devoirs pour être sur d'avoir le temps de travailler sur mon projet. Mais c'est surtout une question de priorité : ainsi je n'ai pas de petite amie et je ne vais pas en soirée. Ma vie ne tourne qu'autour de mon projet, du lycée, du sport et de ma famille car ils sont mes premiers soutiens.

 

Quelques mots sur cette participation à « Make It Happen » ?   Qu’est-ce-que l’innovation pour vous ?

 

Make It Happen m'a permis d'avoir accès à un week-end de prototypage et ainsi pouvoir créer mon microscope physiquement. Ensuite Ulule m'a aidé à préparer ma campagne de crowdfunding, j'ai même pu aller dans leur bureaux. Pour moi, qui les suivait depuis très longtemps, c'était juste un moment magique. Enfin, je pense que l'innovation ce sont toutes les solutions qui répondent à de vrais problèmes : « la faim dans le monde, le paludisme, la corruption, l'accès aux soins, le climat ». Tout cela devrait être la priorité des entrepreneurs.

 

Comment un lycéen comme vous s’instruit-il sur internet ? Dans quel domaine ? Quel regard portez-vous sur l’Education nationale ? Qu’envisagez-vous après le bac que vous passerez en 2018 ?

 

Aujourd'hui, tout ce que l'on veut apprendre s'apprend sur internet. Il y a véritablement tout et ce, dans tous les domaines! Je crois même que le champion du monde de lancer de javelot aux jeux olympiques de Rio à tout appris sur YouTube. Je pense que l'Education nationale est dépassée, c'est un système qui a été créé à l'âge industriel. On apprend en série la même chose à des millions d'élèves et de la même manière. Ce monde n'existe plus, nous sommes à l'âge entrepreneurial et à l'ère d'Internet. Les élèves ont besoin de personnalisation et surtout de pouvoir apprendre à apprendre. Aujourd'hui, notre mémoire c'est Google et ça l'Education nationale ne l'a pas encore intégré.

 

Enfin, les disciplines enseignées sont trop cloisonnées et hiérarchisées. Il n'y a pas d'histoire des sciences ou d'art des mathématiques. Je trouve cela dommage car la créativité naît de l'association d’idées nouvelles et différentes. Et le pire, c'est qu'il y a une hiérarchie dans les disciplines. Ainsi tout le monde doit être fort en mathématiques et en français alors que ce n’est pas toujours possible ! Quelqu'un qui aurait la fibre plus artistique se voit trop souvent se faire anéantir son talent (il y a heureusement quelques rescapés du système). Il transforme petit à petit son talent en doux rêve qu’il ne se réalisera jamais.  Voilà comment les enfants  à 5 ans veulent être astronaute, peintre ou neurochirurgienne et ils finissent consultant, vendeurs ou community manager.

 

Après mon bac S, j'espère que je pourrai me dégager un smic avec ma startup et ainsi pouvoir arrêter mes études. Sinon, je compte faire des études en sciences cognitives, en sociologie ou peut être en philosophie.

 

Entretien par Julien Cabioch

 

Description du projet Voir

En vidéo

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 11 octobre 2016.

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