Rentrée : Les chefs d'établissements et le ministère 

Aux injonctions prescriptives d'une administration centrale de plus en plus oppressante, les chefs d'établissement du Snpden, le syndicat très majoritaire des personnels de direction, entend imposer "une jacquerie". Pour Philippe Tournier, secrétaire général du Snpden, qui présentait un bilan de la rentrée le 8 septembre, si la rentrée se passe globalement bien, les personnels de direction sont exaspérés par les interventions de l'administration centrale. Le torchon brule avec la Dgesco et sa façon de gérer les réformes et les établissements.

                                      

Une rentrée qui se passe bien

 

"La rentrée se passe globalement mieux cette année", affirme Philippe Tournier au regard d'une enquête auprès des chefs d'établissement. "Mais le ministère n'y joue aucun rôle. Il regarde la rentrée se faire". Le ton est donné d'emblée. A cette rentrée, le Snpden, qui avait lancé une alerte sociale au printemps dernier, ne fait plus de cadeaux. Il entend dénoncer les dysfonctionnements d'une administration centrale globalement jugée peu courageuse et trop autoritaire.

 

Selon l'enquête menée par le Snpden, les trois quarts des établissements ont le personnel enseignant prévu à la rentrée. Un quart par contre reste sans enseignant et sans solution.

 

La sécurité reste un point noir

 

Le point noir de la rentrée c'est déjà la sécurité. Le Snpden dénonce la façon irréaliste dont le ministère s'est emparé du sujet. Il s'inquiète de la façon dont l'exercice anti intrusion est programmé. D'autant que les établissements n'ont pas les crédits pour se doter de la fameuse alarme.

 

Mais le syndicat ponte deux motifs d'irritation. Le premier c'est la gestion des élèves fumeurs. Pour le Snpden le ministère ne répond pas au problème de sécurité posé par la nécessité de laisser les élèves fumeurs sortir aux récréations. Le Snpden va saisir les parlementaires pour qu'ils déposent une proposition de loi autorisant des coins fumeurs dans les lycées durant l'état d'urgence. Pour lui, la réponse du ministère est "symptomatique de la non prise de décision".

 

Le second motif c'est l'absence de personnel de sécurité dans les établissements. La sécurité repose sur des agents d'accueil non formés. Le Snpden ne demande pas de vigile mais que le personnel d'accueil soit formé à gérer des situations de crise. Pour lui, "l'état ne veut pas car la sécurité est une compétence non décentralisée. Or l'Etat est toujours pour la sécurité mais s'il ne paye pas".

 

"La dernière réforme classique de l'Education nationale"

 

La rentrée dans les collèges "se passe plutôt bien" estime le Snpden à la vue de son enquête avec un petit nombre de collèges en résistance. "Mais les enseignants restent majoritairement hostiles ou réticents".

 

Pour le Snpden cette réforme est symptomatique des errances de l'administration centrale et de ses interventions jugées inopportunes.

 

"Une grande partie des difficultés est venue des commentaires des textes" faits par l'administration. Le Snpden fait allusion clairement à la circulaire d'application dont il a obtenu de fait d ela ministre la non application. "Appliquer la réforme c'est le décret et l'arrêté. Point", souligne P Tournier.

 

"C'est la dernière réforme classique à l'éducation nationale", prophétise P Tournier. "Il faut passer de la culture de la réforme à celle du changement". Pour le Snpden, la résistance à la réforme a été créée par la façon dont le ministère a voulu tout diriger tout en proclamant l'autonomie. "Le changement a lieu dans les classes", explique P Tournier. "L'idée qu'on va modifier les résultats des élèves par une réforme partant du centre est fausse. Les modifications doivent partir de la classe. C'est l'inverse".

 

Le syndicat pointe des points de friction avec le ministère sur le collège comme la pause méridienne portée à 90 minutes. "Passer d'une heure à une heure et demi nécessite plus d'encadrement", juge-t-il. Or on supprime l'accompagnement éducatif, souvent installé sur ce créneau, et on n'a pas davantage de surveillants.

 

Lycée : Le droit au redoublement pas respecté

 

La suppression du redoublement au lycée a des effets qui n'ont pas été anticipés en première, estime le Snpden. Plutot que redoubler les élèves demandent la première STMG. "On a ruiné 10 ans d'efforts en faveur de l'enseignement technologique", estime le Snpden. "La Stmg est devenue la forme politiquement correcte du redoublement". Le droit au redoublement en terminale risque d'aboutir au tri des élèves en fin de première avertit P Tournier pour garder des places aux redoublants. Selon l'enquête du Snpden , un tiers des lycées professionnels et un quart des lycées généraux et technologiques n'ont pas appliqué le droit au redoublement et repris tous les redoublants qui le demandaient faute de places.

 

Régression injonctive rue de Grenelle

 

Pour le Snpden ces dysfonctionnements sont symptomatiques des interventions néfastes de l'administration centrale dans les établissements. Le Snpden va lancer un mouvement "après 10 ans de dialogue social inexistant" sur cette question. Il dénonce "une régression dans le management".

 

"Le détail est réglé au niveau national alors que les choses importantes comme le risque attentats restent sans réponse", estime P Tournier. Come exemple il donne la cérémonie du brevet, les prescriptions sur la seconde pro, ou le nouveau bulletin scolaire. La cérémonie du brevet "fait tiquer" sur le plan éthique : pour le syndicat elle montre du doigt les élèves n'ayant pas le brevet plus ou moins désignés comme de mauvais citoyens. "On est en pleine régression injonctive avec la manie des services centraux d'écrire sur tout et n'importe quoi".

 

Jacquerie numérique

 

Le Snpden dénonce aussi les interventions du ministère sur les outils numériques utilisés dans les établissements. Et là il menace d'une "jacquerie numérique". "Des gens mènent leur politique pour imposer un progiciel standard et clos pour controler les établissements", affirme -t-il. Selon le Snpden, les autres applications  sont systématiquement rendues inopérantes par des modifications des outils imposés par le centre.

 

Le Snpden semble par contre bien en retrait du débat éducatif qui se profile pour les présidentielles. Sur la mixité sociale, "l'approche ministérielle est crédible", juge P Tournier qui soutient les expérimentations limitées lancées par la ministre. "Affelnet c'est l'échec assuré". Quant à la réforme du lycée promise par F Hollande : "Terminons déjà celle du collège. Recommencer 18 mois de psychodrame ce n'est pas la peine".

 

François Jarraud

 

Par fjarraud , le vendredi 09 septembre 2016.

Commentaires

  • cgalopeau, le 10/09/2016 à 16:14
    Dans mon collège rural la pause méridienne d'une heure 30 est appliquée pour quasiment toutes les classes (sauf celle sui ont des enseignements complémentaires) et les effets ont été rapides et très bénéfiques :
    - diminution du nombre d'heures d'études en cours de journée puisque les emplois du temps sont plus "ramassés"
    - tout le monde, profs comme élèves a un temps suffisant pour se reposer au lieu d'avoir cours presque en continu : il n'y a plus aucun cours de 12h30 à 13h 25 ce qui va permettre des activités d'UNSS, des ateliers, l'accès au FSE, au CDI fermé auparavant, une salle d'étude est ouverte.
    - le passage au self est bien mieux régulé, on a pu programmer par quart d'heure avec un roulement.

    résultat au bout d'une bonne semaine de cours : une ambiance bien plus détendue, des élèves moins énervés et des enseignants moins stressés

    A suivre ...
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