Ecole inclusive : Le Cnesco recommande un enseignant ressource dans les établissements 

Dix ans après la loi de 2005, l'inclusion des enfants handicapés dans le système éducatif français semble une réussite. Et ce n'est pas faux dit le Cnesco à l'issue d'une conférence de comparaison internationale. Mais, si la France a fait le choix de l'école inclusive, il reste encore beaucoup à faire en terme d'inégalités comme le révèle un rapport du Cneco sur la sociologie des élèves handicapés en France. Parmi les recommandations du Cnesco publiées le 11 février, on notera la création d'enseignants ressources dans les établissements capables de faire le lien entre les enfants et les enseignants peu ou pas formés aux handicaps. Mais la promesse de l'école inclusive est plus large : l'école inclusive saura aussi mieux faire progresser tous les élèves.

 

Des inégalités choquantes

 


"Alors que le pays est souvent accusé d'immobilisme scolaire, en matière de handicap à l'école, les progrès ont été fulgurants en 10 ans", rappelle Nathalie Mons, présidente du Conseil national d'évaluation du système scolaire (Cnesco). Aujourd'hui 53% des enfants handicapés sont scolarisés en classe ordinaire, 24% en classe spécialisée et plus que 21% en établissement spécialisé. Le Cnesco ne le dit pas mais le poids de ce grand progrès a été porté par les enseignants qui au quotidien et souvent sans aucune formation, font face aux difficultés inhérentes à cette scolarisation.

 

Mais ce que révèle le Cnesco c'est que la scolarisation  révèle des inégalités choquantes. Un rapport de S Ebersold, E Plaisance et C Zander montre que l'école inclusive est un défi pour l'école. L'école française a été crée pour transmettre des connaissances ou préparer à un emploi et la dimension d'épanouissement n'est pas dans sa tradition. D'où un manque d'intérêt pour la dimension inclusive. Mais le rapport pointe des réalités sociologiques passées jusque là inaperçues.

 

Le rapport montre que la probabilité d'être caractérisé handicap dépend étroitement de la situation sociale de la famille. "Les élèves présentant un trouble cognitif ayant été scolarisés en primaire en 2013 sont proportionnellement plus nombreux à provenir de milieux défavorisés  ; selon l’enquête HID (Handicaps-invalidités-dépendance) , l’admission en milieu spécialisé est plus fréquente pour les enfants et les adolescents d’origine modeste que pour ceux provenant de milieux aisés". Les familles plus favorisées contournent la qualification du handicap.

 

Une école qui peine à inclure un quart des enfants handicapés

 

Selon le rapport le nombre de jeunes scolarisés en établissement spécialisé n'a pas diminué depuis 2005 alors que celui des jeunes scolarisés augmentait fortement. "On peut donc se demander si l’augmentation du nombre d’élèves handicapés en milieu ordinaire reflète une meilleure réceptivité du système éducatif ou si elle correspond plutôt à une redéfinition du périmètre opératoire de la catégorique politique publique "handicap", dit le rapport. D'autant que c'est le plus souvent l'école qui diagnostique le handicap...

 

Le rapport montre aussi des disparités dans la scolarisation. Le taux de scolarisation en milieu ordinaire décroit avec l'âge. De 100% du primaire, on passe à 70% au collège et 40% au lycée et seulement 20% passé 18 ans.  Résultat seulement 6% des jeunes handicapés (20-24 ans) ont un diplôme du supérieur  contre 30% pour la population.

 

Enfin souligne qu'on sait peu de choses du vécu des enfants scolarisés et de celui de leurs parents. Il semble que leur parcours scolaire soit beaucoup plus heurté que celui des autres jeunes. Le rapport soulève aussi les retards à mettre en conformité les locaux scolaires, ce qui éloigne de l'école certains handicaps.

 

Assurer l'accessibilité numérique

 

Les préconisations du Cnesco se sont inspirées à la fois de pratiques innovantes existant en France et de l'expérience de certains pays.

 

La première recommandation concerne l'accessibilité. Le Cnesco demande la mise en accessibilité des batiments scolaires. Mais il recommande aussi l'accessibilité numérique : équiper de tablettes les élèves avec des logiciels adaptés donne des alternatives à la prise de notes et à la saisie de réponses. A partir d 'un texte pris en photo la tablette peut par exemple lire le texte à haute voix.

 

Le Cnesco souhaite aussi que la question du handicap soit davantage prise en compte dans les projets d'établissement. Il propose par exemple la nomination d'un enseignant ressource dans chaque établissement. Cette personne pourra conseiller les enseignants, trouver des solutions et les faire partager.

 

Le Cnesco recommande aussi de nouvelles formes de formation. D'abord avec l'idée de former les élèves au handicap de façon à faciliter la scolarisation. Ensuite, pour les enseignants avec la création de banques de partage de "bonnes pratiques" entre enseignants.

 

L'école inclusive saura mieux faire réussir tous les élèves

 

Restent à conquérir deux espaces. D'une part celui du périscolaire à l'école primaire. Dans le secondaire celui des stages et de l'alternance. Là il faudra prévoir des accompagnements qui n'existent pas aujourd'hui.

 

"Pour être inclusive, l’école doit tout d’abord faire sauter les barrières physiques à la scolarisation, en la matière les normes d’accessibilité doivent enfin devenir réalité dans les établissements. Mais l’accueil physique des élèves ne suffit pas à construire une carrière scolaire réussie. Après la réussite quantitative de l’accueil des élèves en situation de handicap, doit être relevé le défi d’un accueil qualitatif, c’est-à-dire pédagogiquement efficace", dit N Mons. Et là on rejoint une problématique globale du système éducatif. En devenant plus inclusive l'école française saura aussi s'adapter davantage aux différences entre tous les élèves. L'école inclusive c'est aussi l'école du progrès de tous.

 

François Jarraud

 

Les préconisations du Cnesco

 

 

 

Par fjarraud , le vendredi 12 février 2016.

Commentaires

  • thais8026, le 12/02/2016 à 14:48
    Tout va bien dans le meilleur des mondes. Tout repose encore une fois sur les profs qui doivent gérer des classes à plus de 30 avec des élèves handicapés. Tous les handicaps ne se valent pas dans la gestion d'une classe. Et quand je vois les prescririons, voir les ordres, de certains orthophonistes sur la prise en charge de tel ou tel Dys, et donc qui mettent la responsabilité des non progrès de l'élève sur l'enseignants ou l'institution scolaire, j'ai envie de leur dire de commencer à régler le problème quand ils les ont seul à seul avant de renvoyer le bébé à d'autres. Je pense qu'il y a des limites à l'individualisation de l'enseignement dans les classes par un enseignant qui ne voit les élèves que 4h par semaine en collège au maximum dans des classes surchargées.

    De plus, je trouve qu'il y a de plus en plus d'élèves qualifiés d'handicapés dans notre société alors trois possibilités :
    - on les diagnostique mieux
    - on qualifie un peu trop vite un élève d'handicaper.
    - notre société est en déliquescence complète au point de produire de plus en plus d'enfants handicapés (pas politiquement correct du tout et volontairement provocateur)

    A part cela, cela semble choquer que seulement 6% des élèves handicapés atteignent un diplôme du supérieur mais quand on a un handicap cognitif cela me parait assez logique que ces élèves est des difficultés avec cela. Ils ont un handicap ou pas...

    • jackd, le 14/02/2016 à 16:12
      D'accord avec vous sur ce dossier

      L'inclusion réclame beaucoup d'efforts, et ce sont surtout ceux des enseignants qui permettent que ce soit possible, à un prix parfois disproportionné quant aux conséquences sur le groupe.

      Il ne faut pas oublier de dire que c'est aussi à l'individu de s'adapter à la société.

      La loi de 2005 a fait évoluer les choses favorablement, mais Nathalie Mons et le CNESCO doivent comprendre qu'il faut accentuer la formation des intervenants et permettre avant tout la baisse des effectifs : il n'est raisonnablement pas possible de pratiquer l'inclusion au-delà de 24 élèves par groupe à l'école et au collège et les possibilités de dédoublements, de prises en charges par groupes très réduits ou même en personnalisant doivent être multipliées.
  • Viviane Micaud, le 12/02/2016 à 09:33
    Cet article me semble assez théorique. 
    Je suis convaincue que tous les élèves d'intelligence normale doivent être admis en milieu ordinaire et qu'il faut donner les moyens à l'école pour qu'elle s'adapte à eux. Cela peut vouloir dire des manuels dans les matières à plusieurs niveaux de lecture (un accessible niveau de lecture s'adressant au Dys et aux élèves maîtrisant insuffisamment la lecture et un niveau de lecture pour la majorité des élèves). Cela devrait devoir dire des devoirs différents en fonction de la capacité d'expression (pour éviter de mettre les jeunes devant des devoirs qu'ils ne peuvent pas faire). L'enseignant a la compétence pour définir le niveau d'exigence qui oblige à faire des efforts intellectuels sans pour autant découragé par une mise en échec systématique.
    Par contre, je sais qu'il y a des jeunes avec des déficiences cognitives fortes qui font qu'ils auront besoin d'une protection contre les personnes agressives, en milieu scolaire puis en milieu professionnelle quand ils seront adultes. Donc, ils ne pourront travailler à l'âge adulte qu'en milieu protégé ou sous la protection bienveillante d'un proche. Ces jeunes ont un besoin d'accompagnement très spécialisé qui, d'après ce que j'ai compris, ne peut pas être donné en milieu ordinaire. 
    C'est important d'avoir des activités communes pour la sociabilité et la connaissance de l'autre, par exemple, une fois tous les 15 jours. 
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