Faut-il rétablir l'enseignement de la psychologie au lycée ? 

Peut-on se passer de la psychologie ? Certainement pas. La psychologie contemporaine est mobilisée par de nombreux métiers, depuis le commerce jusqu'aux soins ou à l'enseignement et elle constitue un domaine scientifique en pleine expansion. Pourtant elle a totalement disparu des programmes du lycée depuis 2003 dans une certaine indifférence. Agnès Florin, professeure de psychologie, avec la Fédération française des Psychologues et de Psychologie interviennent auprès du ministère de l'éducation pour son retour. Elle nous dit pourquoi.

 

Comment la psychologie a-t-elle disparu des programmes ?

 

Années 1960 : un de mes 4 manuels de philosophie, en terminale série littéraire, est consacré à la psychologie. Il faut quand même 250 pages et 20 chapitres présentant thèmes et méthodes. Plus tard, la psychologie s'est réduite dans le programme de philosophie à Freud et un peu de psychologie contemporaine. Puis arrive une modification des programmes e 2003, sous Luc Ferry, un ministre philosophe, et elle disparaît.

 

Or l'utilité de la psychologie n'est plus à démontrer. Il faut rappeler ce qui était étudié encore dans les années 1970 : la mémoire, l'intelligence, la perception, les émotions, le langage, l'attention. On voit bien que ce sont des questions qui intéressent la société. D'ailleurs la psychologie est intégrée dans la formation de base des jeunes dans de nombreux pays.

 

Pourquoi faudrait-il la rétablir ?

 

Il est clair qu'il faudrait la rétablir dans les horaires existants. Il n'est pas question d'ajouter des heures dans la semaine des élèves. Mais depuis 2003 on a supprimé la psychologie sans réduire le programme de philosophie. Pour son rétablissement on peut mettre en avant des préoccupations sociétales. La psychologie contemporaine est un domaine de savoir et de recherche important. Elle a son utilité pour comprendre nos comportements, mieux comprendre autrui. Elle intervient dans de nombreux domaines de formation.

 

Cela permettrait aussi d'alléger la formation des futurs enseignants. Aujourd'hui quand il s'agit de les préparer à enseigner à des élèves handicapés, on y consacre 3 heures pour lire la loi de 2005. C'est pareil quand il s'agit d'aborder les questions du groupe. On voit bien qu'il faudrait avancer cette formation avant l'Espe.

 

Enfin la rétablir permettrait aussi d'éviter que chaque année des milliers de jeunes s'orientent vers des études supérieures de psychologie en toute méconnaissance. C'est pour toutes ces raisons qu'on la trouve enseignée dans le secondaire dans d'autres pays.

 

Des exemples ?

 

En Belgique la psychologie est enseignée dans les 3 dernières années du secondaire dans les filières générale, technologique et professionnelle. Elle est présente dans l'enseignement de sciences humaines (2 h hebdomadaires) et dans des formations optionnelles par exemple pour la formation des puéricultrices, des agents d'éducation, des animateurs.

 

En Suisse, elle occupe 2 heures hebdomadaires des 2ème et 3ème années du lycée. L'élève travaille sur les méthodes de la psychologie, les concepts de base, la psychologie du développement, l'influence. Il doit savoir intervenir dans une discussion, argumenter, améliorer les comportements dans la vie quotidienne, avoir une attitude responsable. Le programme de 3ème année traite de la dynamique des groupes.

 

Mais je peux aussi citer l'Ecosse ou les Etats-Unis par exemple.

 

Comment expliquez vous sa disparition ?

 

Je ne vous apprends pas que le système éducatif repose sur des fonctionnements corporatistes. Il n'y avait pas une société des agrégés de psychologie pour défendre cette discipline en 2003.

 

Quelles démarches avez vous faites pour son rétablissement ?

 

Alain Lieury et moi-même, avec un représentant de la Fédération française des Psychologues et de Psychologie (FFPP) avons rencontré à deux reprises le Conseil supérieur des programmes (CSP), représenté par Roger-François Gauthier. On a plaidé pour une introduction progressive de la psychologie comme dans les autres pays dans le secondaire final mais aussi dans certains thèmes enseignés au collège.

 

Aujourd'hui le CSP ne s'occupe pas encore des programmes du lycée. Mais ça va venir. On a remis aux membres du CSP des propositions de programmes. RF Gauthier nous a proposé de travailler sur le socle en pointant les éléments sur lesquels un éclairage psychologique pourrait être utile. Les psychologues pourraient aider à la rédaction des documents d'accompagnement. Il nous a proposé aussi de travailler sur les programmes du lycée et des Espe.

 

Qui pourrait enseigner la psychologie dans le secondaire ?

 

Evidemment des doctorants de psychologie pourraient le faire mais on ne vas sans doute pas créer un nouveau corps de professeurs. On pourrait former les professeurs de philosophie et aussi ceux de SVT qui semblent ouverts à cette idée.

 

Le programme minimum pourrait se décliner dans les différentes filières du lycée en terminale ou sur plusieurs années. Dans les sujets abordés il pourrait y avoir la psychologie expérimentale, la psychanalyse, la santé, la psychologie du développement, les méthodes de la psychologie, la perception, la mémoire, l'intelligence, le groupe, l'attention, l'apprentissage, l manipulation sociale, le tout selon les séries à raison de 2 ou 3 heures hebdomadaires.

Propos recueillis par François Jarraud

 

 

 

Par fjarraud , le lundi 02 novembre 2015.

Commentaires

  • pataud47, le 04/11/2015 à 18:13

    Et si on commençait par former les profs à la psychologie !

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