Saint-Denis (93) : Rupture d'égalité constitutionnelle selon le Défenseur des Droits 

Les efforts du ministère de l'éducation nationale sont réels mais insuffisant pour que les enfants de Saint-Denis (93) bénéficient du même droit à l'instruction que les autres enfants français. Le constat saute aux yeux. Mais il vient d'être asséné par le Défenseur des droits, Jacques Toubon, dans une note et une lettre publiés le 11 juillet par la mairie de Saint-Denis. Alors que la ministre fait de la lutte pour l'égalité l'argument principal de ses réformes, la note du Défenseur met à nu la réalité de la politique ministérielle. Pour le Défenseur des droits,  l'égalité réelle n'existe toujours pas pour les enfants dionysiens.

 

 Nous avions rencontré les professeurs de Saint-Denis (93) en mars 2015. Ils se révoltaient contre le manque de postes d'enseignants dans leur ville évaluant les besoins à 193 postes rien que pour le primaire. Le rectorat, lui, mettait en avant ses efforts. " Dans les collèges pour une croissance du nombre d'élèves de 1,2% on met 2,45% de moyens en plus. Au primaire c'est 0,9% et 2,42%", nous avait dit l'entourage de la rectrice. Depuis pas moins de 8 journées de grève ont eu lieu à Saint-Denis entre la fin mai et la fin juin, soulignant les inquiétudes persistantes des enseignants pour la rentrée.

 

8% de postes budgétairement vacants

 

C'est tout ce contexte qui est maintenant éclairé par la note du Défenseur des droits. Doté de pouvoirs d'investigation, Jacques Toubon a obtenu des informations partielles des services de l'Education nationale suite à un recours déposé par le maire de Saint-Denis, Didier Paillard, et le collectif du "ministère des bonnets d'âne".

 

Le Défenseur souligne le manque de postes d'enseignants dans la ville de Saint-Denis : 8% des postes sont budgétairement vacants, soit deux fois plus que la moyenne du département. A la rentrée de 2014, 20 classes du primaire étaient sans enseignant. 74 enseignants contractuels travailleraient à Saint-Denis. Le Défenseur évoque "la très grande approximation dans les procédures de recrutement de ces enseignants". Son enquête auprès de Pôle Emploi montre que seule une condition de diplôme post bac était demandée. Les contractuels ont eu 3 jours de formation... 3 mois après la rentrée. Le Défenseur montre aussi que seulement 4% des enfants de - de 3 ans sont scolarisés dans la commune contre 12% en France.

 

Rupture du principe à valeur constitutionnelle d'égalité

 

Depuis le recours, des actions ont été lancées par le ministère de l'éducation nationale. Un plan a été lancé pour créer 500 poste sen Seine Saint-Denis d'ici 2017 et à la rentrée 240 seraient créés dans le département. Enfin les 9 collèges et les 65 écoles de Saint-Denis entrent dans l'éducation prioritaire à la rentrée 2015 ce qui devrait amener de nouveaux moyens. Le rectorat a décidé d'embaucher les contractuels en juin juillet et de les faire débuter à la mi août pour organiser une formation avant la rentrée.

 

Mais globalement, au regard de la Convention internationale des droits de l'enfant, du Code de l'Education, du protocole n°1 de la Convention , le Défenseur conclue à une discrimination envers les enfants de Saint-Denis. "En étant confrontés à des classes sans professeurs lors de leur rentrée, puis à des enseignants contractuels affectés tardivement ou à une succession de remplaçants et de contractuels, les élèves dionysiens ont été placés dans une situation défavorable aboutissant à une rupture du principe à valeur constitutionnelle d'égalité des usagers devant le service public". Le Défenseur met donc la rentrée 2015 sous surveillance. La ville de Saint-Denis organisera de son coté une vigie citoyenne dans les écoles le jour de la rentrée, associant parents, enseignants et élus, pour reporter tout problème.

 

La rentrée 2015 sous surveillance

 

Interrogée par le Café pédagogique, Rachel Schneider, secrétaire général du Snuipp 93, confirme le diagnostic. Elle cite en exemple une clase de Saint-Denis qui a vu 19 remplaçants et contractuels défiler dans l'année. Elle reconnaît que "le Dasen porte plus d'attention à Saint-Denis. Le Snuipp aurait obtenu que 65 titulaires 1ère et 2de année soient nommés en priorité sur la ville à la rentrée. Pour elle, avec ces efforts et en faisant appel aux contractuels et aux remplaçants, la rentrée devrait se dérouler correctement à Saint-Denis. Mais comme la dotation reste insuffisante, les problèmes apparaitront ensuite : nombre d'élèves trop important dans les classes, fermetures d'écoles ailleurs, remplacement non assurés. La ville et le département souffrent d'un manque de postes qui remonte à l'ère Sarkozy, des difficultés de recrutement dans le département (321 postes non attribués en 2015 dans l'académie), des difficultés sociales particulières à la ville (dans une école 40% des enfants vivent en hébergement et leur cas n'est pas pris en compte dans les statistiques) et du fait que la zone est la plus éloignée des lieux de résidence des enseignants dans le département et donc la moins demandée.

 

Autant de remarques qui sont des pistes de règlement. Le Snuipp a demandé que le concours exceptionnel "de Créteil" où le nombre d'admissibles est très supérieur à celui des admis, recrute les 321 emplois non pourvus en plus des 500 postes offerts. On attend toujours la réponse de la ministre...

 

François Jarraud

 

Communiqué ville de Saint Denis

Le grand ras le bol des professeurs de Saint-Denis

 

Par fjarraud , le lundi 13 juillet 2015.

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