Education : Quelles leçons de l'Asie ? 

L'Occident, aux systèmes éducatifs généralement défaillants, va-t-il tirer des leçons d'un modèle éducatif asiatique qui caracole en haut des évaluations Pisa ? C'était la question posée il y a pile un an par le Colloque international sur l'éducation en Asie organisé par le CIEP. La Revue internationale d'éducation de Sèvres revient sur l'événement. Un an plus tard elle livre des conclusions distancées. Oui il y a à apprendre des succès asiatiques. Mais les leçons sont davantage encore à échanger entre les pays de la zone. Pour l'Occident il y a des contre sens à ne pas commettre. Comme par exemple adopter des modes éducatifs dont les pays asiatiques cherchent à se débarrasser...

 

Les apports d'un colloque

 

Durant trois jours, le CIEP a réuni près de 120 participants, venus de 18 pays, pour un événement unique qui a réuni des nations asiatiques qui se parlent guère. Partenaire du colloque, le Café pédagogique a rendu compte chaque jour des ateliers du colloque. Vous avez pu vivre en direct les rencontres, les confrontations et les conclusions de cet événement extraordinaire.

 

Mais tout n'était pas dit. Au delà des conclusions immédiates du colloque, le numéro 68 de la Revue internationale de Sèvres, la revue du CIEP, engrange  d'abord les apports scientifiques de l'événement. Une partie de la revue revient sur les tables rondes et les ateliers pour faire découvrir les nuances à apporter à l'idée d'un modèle éducatif asiatique.  Un des apports du colloque c'est de montrer la variété des histoires nationales, des cultures et des systèmes éducatifs.

 

Apprendre par coeur contre apprendre à apprendre

 

Jean-Marie de Ketele et Bernard Hugonnier approfondissent cette analyse en reprenant les résultats éducatifs des pays asiatiques. Si certains sont parmi les excellents élèves de Pisa (Corée du Sud, Hong Kong, Japon, Singapour par ex.) , d'autres ont des résultats médiocre : la Malaisie, l'Indonésie, la Thaïlande par exemple. Pour de Ketele et Hugonnier, ces résultats doivent être lus comme la réussite de certains modes éducatifs. S'inspirant des travaux de N Mons, ils montrent que les modèles d'intégration à la carte et individualisée, marqués par une filière éducative unique, une orientation tardive et une aide individualisée, obtiennent de meilleurs résultats. La leçon vaut encore pour des systèmes occidentaux où la voie unique reste à achever ou est contestée...

 

Ces deux auteurs tirent une autre leçon importante du colloque sur la façon d'enseigner. Ce qu'ont en commun les pays asiatiques ce sont des pressions à l'intérieur des systèmes éducatifs. D'abord entre les valeurs traditionnelles et la globalisation éducative.Les pays cherchent à la fois à répondre aux exigences de la globalisation et à maintenir des systèmes éducatifs que de Ketele nous avait décrits comme holistiques, c'est à dire soucieux d'ue éducation globale intégrant dans la communauté.

 

Ce qui marque ces systèmes éducatifs sur le plan pédagogique est aussi sous pression. Le "rote learning" c'ets à dire l'enseignement par le rabâchage et le par coeur, est perçu comme positif dans ces pays. Mais est sous la pression de la globalisation qui exige des adultes créatifs et autonomes. Finalement c'est cette capacité à gérer ces tensions qui est mise en avant par de Ketele et Hugonnier. L'Occident à bien à apprendre de l'Asie.

 

Un modèle asiatique qui reste à construire

 

Nathalie Mons signe aussi un article marquant de la revue. "Le miracle asiatique n'existe pas en éducation", dit-elle d'emblée.  D'abord du fait d ela variété des pays de  l'Asie. Mais elle montre aussi que de pseudo caractéristiques du modèle éducatif asiatique ne tiennent pas l'analyse. Ainsi l'idée de modèles performants car peu onéreux, est démentie par l'importance de la "shadow education", les petits cours privés devenus quasi obligatoire spour réussir. Le modèle de l'apprendre par coeur est lui aussi à nuancer d'abord parce que la rote learning est plus complexe qu'il n'en a l'air, ensuite parce qu'il est contesté dans les pays d'Asie. Enfin les pays asiatiques cherchent des solutions nationales pour leurs systèmes éducatifs ce qui change là aussi notre perspective.

 

C'est sur ce point qu'intervient Rangachar Govinda. Pour lui les modèles éducatifs doivent changer. "Nous devons aider les élèves à trouver non pas les bonnes réponses mais à développer des solutions créatives ainsi que la communication et la réflexion critique", écrit-il. "L'Asie doit remporter la course entre l'éducation et la technologie... et la course entre la création du savoir et l'utilisation du savoir". Il oppose l'opportunité offerte par les nouvelles technologies à la tradition du professeur gourou. Pour lui la solution passe par les coopérations régionales. R Govinda nous explique au final que le modèle asiatique reste à construire. Voilà une singulière conclusion pour cet extraordinaire colloque.

 

François Jarraud

 

L'éducation en Asie : le sommaire de la revue

Le DOSSIER sur le colloque

 

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 23 juin 2015.

Commentaires

Vous devez être authentifié pour publier un commentaire.

Partenaires

Nos annonces