Une semaine après une première version, les syndicats réformistes et le ministère ont repris le travail sur la circulaire d'application de la réforme du collège. Le nouveau texte enregistre quelques modifications notables. Notamment elle impose un travail d'équipe tout en précisant qu'il s'inscrit "dans le cadre des missions (des enseignants)", autrement dit sans temps rémunéré. Elle introduit une réforme de l'évaluation qui sera sans aucun doute l'étape suivante de la réforme. Elle introduit les professeurs documentalistes et les CPE dans les EPI. La circulaire est adaptée à l'enseignement privé suite à la publication d'un décret. Le Se-Unsa estime le texte "stabilisé". Sa publication pourrait avoir lieu dès juillet.
Une nouvelle politique d'évaluation
La circulaire commence par annoncer plus clairement les principes de la réforme. "Assurer un même niveau d’exigence pour que tous les élèves acquièrent le socle commun de connaissances, de compétences et de culture par une priorité centrale donnée à la maîtrise des savoirs fondamentaux est un impératif" dit-elle. Mais le nouveau texte ajoute que " la mixité sociale et scolaire au sein des classes fait l’objet d’une attention spécifique", peut-être en écho au colloque du Cnesco. Un autre ajout est le coup de chapeau aux cadres. " L’évolution des pratiques pédagogiques au service de la réussite de tous les élèves s’appuie également sur les compétences des personnels d’encadrement (personnels de direction et d’inspection). Mais le principal ajout c'est la mention d'une " nouvelle politique de l’évaluation des élèves présentée prochainement". Cela confirme plusieurs interventions récentes, par exemple lors du colloque du Mclcm. Le ministère doit modifier le brevet et il compte relancer la réforme de l'évaluation que, selon B Hamon, l'Elysée avait interrompue.
Un temps d'équipe prévu dans le service des enseignants
La nouvelle rédaction rappelle l'organisation des enseignements prévue par la réforme entre enseignements communs et complémentaires, et enfin enseignements de complément. La circulaire définit précisément le rôle de chaque conseil : d'enseignement, pédagogique et d'administration. Le conseil pédagogique, qui reste nommé par le chef d'établissement, "formule des propositions quand aux modalités de l’accompagnement personnalisé – soutien, approfondissement, méthodes de travail – et de regroupement des élèves, que le chef d’établissement soumet ensuite au conseil d’administration. Il est saisi pour avis sur l’organisation des enseignements pratiques interdisciplinaires". Le conseil d'administration (CA) "répartit la dotation horaire supplémentaire mise à la disposition des établissements entre les moyens nécessaires à la constitution de groupes à effectifs réduits, aux interventions conjointes de plusieurs enseignants et aux enseignements de complément". L'offre d'accompagnement personnalisé (AP) , d'enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI) sont présentés au CA.
La circulaire mentionne le fonctionnement différent du privé où le chef d'établissement décide l'organisation "en concertation avec les professeurs". Le texte mentionne "une instance de concertation".
Mais la principale modification c'est l'annonce d'un temps d'équipe. " Le travail en équipe s’appuie notamment sur les instances collégiales existantes et sur des temps prévus dans l’emploi du temps des enseignants dans le cadre de leurs missions liées au service d’enseignement". Cette phrase fait allusion au décret Peillon sur le statut des enseignants. Elle instaure un temps non défini mais inscrit dans l'emploi du temps de réunion d'équipe mais sans rémunération spécifique (sauf en Rep+).
Les EPI et l'accompagnement personnalisé davantage ouverts
La circulaire donne comme objectif aux EPI "une réalisation concrète, individuelle ou collective" qui peut être un exposé ou un livret. " Des heures professeurs peuvent être mobilisées notamment pour des interventions conjointes de plusieurs enseignants". La nouvelle rédaction ouvre davantage les EPOI à des non(-enseignants, ce qui semble assez contradictoire avce la charge pédagogique forte qui leur est attribué. " La mise en oeuvre des parcours doit favoriser la participation d’autres personnels de l’établissement et les partenariats". On a là un écho de pratiques qui ont été introduites parfois au lycée.
Le nombre d'EPI est au minimum de 6 pour chaque élève sur le cycle 4. Il y en a donc au minimum 2 par an, l'EPI "monde économique et professionnel" devant avoir lieu en 4ème ou 3ème. "Les enseignements pratiques interdisciplinaires peuvent être de durée variable (trimestrielle, semestrielle, annuelle), sur un horaire hebdomadaire de 1 à 3 heures. Un établissement peut combiner des enseignements pratiques interdisciplinaires de durées différentes. Par exemple : trois enseignements pratiques interdisciplinaires trimestriels de trois heures; deux enseignements pratiques interdisciplinaires semestriels de deux heures, et trois enseignements pratiques interdisciplinaires trimestriels de 1 heure; un enseignement pratique interdisciplinaire semestriel de trois heures, un enseignement pratique interdisciplinaire semestriel d’une heure, un autre de deux heures".
La circulaire spécifie qu'une "thématique interdisciplinaire peut être suivie par un élève chaque année du cycle 4" ce qui vise les langues anciennes et régionales. Mais, " les élèves qui bénéficient d’un enseignement de complément doivent être répartis dans plusieurs classes, afin d’éviter la constitution de filières sur la base de ce choix".
L'accompagnement personnalisé peut être pris en charge dans toutes les disciplines. " Les professeurs documentalistes, ainsi que les conseillers principaux d’éducation, ont naturellement vocation à apporter leur expertise dans sa conception et à participer à sa mise en oeuvre", ajoute la nouvelle rédaction.
Les langues étrangères et régionales
La circulaire étend aux langues régionales la possibilité de continuer en 6ème, à coté de l'anglais, cette langue quand elle a été commencée à l'école. Le mécanisme n'est pas automatique mais possible. Dans ce cas l'élève a 4 heures dans la langue continuée et 2,5 h d'anglais. Là aussi les élèves ne doivent pas être regroupés en filière. " L’organisation de l’apprentissage de la deuxième langue vivante en une séquence d’une heure et deux séquences de trois quarts d’heures est à privilégier."
Les sciences et les arts
La circulaire précise que l'EIST est une possibilité proposée au choix de l'équipe. De même le regroupement des disciplines artistiques est une possibilité offerte aux enseignants qui doivent manifester un "accord explicite".
Des séquences de 90 minutes recommandées
La circulaire revient sur les pondérations horaires. " L’établissement peut moduler de manière pondérée la répartition du volume horaire hebdomadaire par discipline, dans le respect à la fois : du volume horaire global dû à chaque discipline d’enseignement obligatoire pour la durée du cycle, du volume horaire global annuel des enseignements obligatoires dû à chaque élève, des obligations réglementaires de service des enseignants. La modulation de la répartition du volume horaire hebdomadaire est fixée pour la durée du cycle. La répartition du volume horaire doit rester identique pour tous les élèves d’un même niveau. Toutes les disciplines d’enseignement obligatoire sont enseignées chaque année du cycle." La nouveauté c'est une phrase qui vante des séquences de 90 minutes. "L’établissement peut réfléchir à la mise en place d’une organisation du temps scolaire visant à réduire dans la journée et la semaine le nombre de séances, afin de limiter le morcellement des temps d’apprentissage. Des séquences d’1h30 peuvent constituer des temps d’apprentissage efficaces".
Le plan de formation dans le public et le privé
La circulaire donne des détails sur la formation des équipes. " Dès le début de l’année scolaire 2015-2016, les personnels de direction et les inspecteurs territoriaux bénéficieront d’un plan d’accompagnement spécifique dans chaque académie". Viendront ensuite en janvier la formation des membres du conseil pédagogique . Et seulement plus tard celle des autres professeurs. La formation durerait 4 ou 5 jours, chaque établissement établissant des emplois du temps pour que chaque enseignant puisse en bénéficier par roulement sans interrompre les cours. " La formation des enseignants et conseillers principaux d’éducation se déploie en plusieurs vagues, afin de ne pas mobiliser tous les enseignants d’un collège en même temps".
Sur ces 5 jours , la formation devra aborder pas moins que " l’appropriation des nouveaux programmes de cycle ; la mise en place des nouveaux temps d’enseignement : enseignements pratiques interdisciplinaires, accompagnement personnalisé, groupes à effectifs réduits ; la différenciation pédagogique ; la pédagogie de projet ; les usages pédagogiques du numérique, en lien avec la mise en œuvre des programmes ; les pratiques d’évaluation des acquis des élèves".
" Dans l’enseignement privé sous contrat", ajoute la nouvelle rédaction, "un abondement des moyens de formation à hauteur de celui de l’enseignement public sera réalisé. L’abondement de ces moyens spécifiques sera fléché vers des actions de formation dédiée à la réforme du collège. Les chefs d’établissement seront invités à participer aux journées de formation destinées aux personnels de direction en début d’année scolaire 2015-2016."
La nouvelle rédaction intègre davantage les professeurs documentalistes et les CPE dans les enseignements du collège. Surtout elle crée dans les emplois du temps des enseignants des moments de réunions d'équipe sans rémunération. Les opposants à la réforme dénonçaient depuis des mois la "réunionnite". La voici officiellement installée. Cette évolution ne devrait pas passer inaperçue.
François Jarraud
La nouvelle circulaire
La première version
Réforme du collège : le DOSSIER