Rencontres du GFEN : Bruno Hautin : Écrire dans toutes les disciplines 

Rappelant les programmes de 2002 qui faisaient la part belle à « l'écriture », Bruno Hautin invite à dépasser cette injonction, il va nous montrer qu'écrire va « au-delà de la simple maîtrise de la langue. » On retrouve ici l'intention de Jacques Bernardin en introduction, la maîtrise de l'écriture comme prise de pouvoir sur sa pensée et construction de la citoyenneté.

 

L'enseignant maître formateur en Eure-et-Loir nous met en contexte :  une situation telle qu'il l'a faite vivre à ses élèves de cycle 3. C'est une tâche complexe où les élèves doivent rédiger un plaidoyer adressé à Victor Schoelcher lors d'une commission parlementaire qui devra statuer sur la poursuite ou l'abolition de l'esclavage. Deux cas de figure, deux séries de documents différents distribués selon que votre rôle sera de plaider pour ou contre. En tant qu'adultes, ne surtout pas bouder son plaisir à plaider contre ses convictions premières, et inviter les élèves à s'emparer de tous les discours pour les déconstruire. Les « élèves » doivent bien ici « écrire » un discours politique. Pour clore la situation la scène est jouée. La salle d'abord timide, finit par se prendre au jeu volontiers, les arguments fusent, très vite ...bien que la « scène » est supposée se vivre en 1848, l'actualité, la situation politique contemporaine trouvent un écho dans ces joutes oratoires (mais préparées par écrit). Comme quoi c'est bien en croisant le fer qu'on apprend à décrypter les questions chaudes de nos vécus.

 

Dans un deuxième temps, Bruno Hautin revient sur une proposition vécue également dans sa classe, la description d'une gravure en histoire de l'art. Les élèves produisent par écrit et nous sont proposées à la lecture l'évolution des différents jets. Le premier jet est systématiquement gardé, mis de côté par l'enseignant. C'est l'élaboration d'une première pensée. Dans un deuxième temps, on écrit à nouveau, mais ce n'est donc pas de la réécriture et Dominique Bucheton présente dans la salle précise « réécrire, ce n'est pas corriger », c'est un nouveau jet sur le même sujet. Parce qu'il faut du temps, ces jets sont toutefois partagés, ils sont lus à haute voix, ils forment un terreau commun dont chacun pourra se resssaisir. Bruno Hautin défend le partage, le « co-pillage » entre pairs. Entre deux autres jets, des apports sont proposés pour apprendre à nommer les choses (précision du lexique à convoquer...), des apports formels qui peuvent guider l'écriture.

 

En tout 5 jets d'écriture sur un même objet donc, en clôture du travail on re-soumet aux élèves leur premier jet et on leur demande du premier ou du dernier lequel travail ils souhaitent conserver. Inévitablement l'élève gardera le dernier, mais pouvoir mesurer ainsi le cheminement parcouru, constater ses progrès, fait partie du processus. Ces élèves avancent, progressent, parce qu'ils reviennent en confiance, avec plaisir sur un objet avec lequel ils sentent qu'ils conquièrent des acquis.

 

Écrire permet de construire des connaissances et de les mobiliser dans un contexte porteur de sens. La démarche de Bruno Hautin est complète et intègre un volet sur l'évaluation pour valider ou non son efficacité. Stéphane Bonnery serait satisfait, avec une autre gravure que celle initialement proposée les élèves convoquent les savoirs en jeu et s'en resaississent dans une nouvelle production d'écrit (en un seule jet celle-ci puisqu'elle est évaluative). Et quand il pousse le jeu jusqu'à demander à ses élèves de « croquer » par une gravure à leur tour la nuit du 04 août 1789, on peut « lire » dans leurs productions plastiques combien ils ont tout compris à la Révolution, ses symboles et les enjeux de l'époque.

 

Lucie Gillet

 

 

 

Par fjarraud , le mercredi 15 avril 2015.

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