Pour une nouvelle classe inversée  

"Comment rendre la rencontre entre l'élève et l'enseignant possible, sans rien abandonner sur le niveau ou sur les objectifs ? Comment changer ce qui ne fonctionne plus ?" Alain Taurisson n'est certainement pas le seul  professeur à se poser cette question. Il propose, dans un petit livre accompagné de fiches pratiques et d'exemples, écrit avec une enseignante de lettres, Claire Herviou, d'inverser l'école, c'est à dire de mettre vraiment les activités des élèves au centre de la classe à la place du monologue du maitre en direct ou en différé à la maison.

 

 Car pour Alain Taurisson la "classe inversée" qui connait une certaine mode actuellement ne peut pas convenir à la plupart des élèves. "Les élèves ont changé. Ils ont de moins en moins de temps pour travailler en dehors de la classe. Et plus ils sont en difficulté mois ils consacrent de temps à leur travail scolaire". Pour Alain Taurisson, tout doit se jouer dans le temps de la classe. Et c'est sur le temps du cours que la rencontre doit s'opérer en inversant le rapport pédagogique traditionnel, en impulsant un vrai rapport de soutien.

 

Pour cela il faut une prise de conscience par l'élève de son apprentissage. C'est la découverte de ce travail qu'initie la classe inversée d'Alain Taurisson et Claire Herviou. En une centaine de pages, leur livre pose les bases de leur méthode pédagogique. Il n'y a rien de totalement nouveau si ce n'est la mise en pratique de savoirs pédagogiques comme , par exemple, les apports de Vygotski. A ces savoirs théoriques ils associent des exemples d'outils pédagogiques, en maths et en français, qui permettent d'inventer ensuite ses propres instruments. L'ouvrage encourage à développer une pédagogie simplement nouvelle, adaptable aux classes actuelles de l'école au lycée. Au bout de cette initiation chacun peut modifier sa pédagogie pour engager enfin les élèves dans un travail intellectuel souvent délaissé depuis longtemps.

 

Alain Taurisson, Claire Herviou, Pédagogie de l'activité : pour une nouvelle classe inversée. ESF 2015, ISBN 978-2-7101-2719-2

 

 

Alain Taurisson : " Le travail avec les autres c'est transgressif"

 

La classe inversée où l'élève apprend le cours avant de venir en classe ça peut marcher avec tous les élèves ?

 

 Je ne crois pas. En tous cas cela marche rarement avec les élèves que l'on a. Ils sont démunis devant cette demande. Ils ont besoin d'autre chose.

 

Vous parlez d'une nouvelle classe inversée reposant sur une pédagogie de l'activité. De quoi s'agit-il ?

 

C'est trouver un moyen pédagogique pour que les élèves travaillent, résolvent des problèmes et précisément y arrivent parce qu'ils ont les moyens d'y arriver.

 

Vous parlez de collaboration entre les élèves. Mais comment cela se construit-il ?

 

Cela prend du temps. On commence par les faire travailler en demi groupe pendant 2 heures pour observer et repérer leur façon de faire. On arrive ainsi à faire comprendre que c'est plus efficace quand on peut parler de ses difficultés.  C'est nouveau pour les élèves. Ils sont plutôt habitués à ce qu'on attende d'eux une performance individuelle voire à ce qu'on individualise.  Le travail avec les autres c'est transgressif. Donc il faut leur donner des outils et les convaincre qu'ils peuvent réussir s'ils sont capables de parler de leurs difficultés.

 

L'ouvrage présente plusieurs de ces outils. C'est quoi exactement ?

 

Ce sont des façons de faire et des informations qui peuvent être utilisés dans certains types d'exercice. Ils comprennent des informations, des théories qui répondent aux lacunes que l'on constate chez les élèves. Par exemple ce sera une démarche pour analyser un texte.

 

Ce sont des fiches méthodologiques ?

 

Pas tout à fait. Car on va avoir, en maths par exemple, des énoncés de résultats, des façons d'aborder les choses alors que la fiche méthodologique est soit très générale soit très particulière. Là on aborde des domaine sou des types de problèmes.

 

Dans votre démarche quels sont les apports du numérique ?

 

On n'est pas parti du numérique comme dans la classe inversée classique. Mai sle numérique permet d'apporter du mouvement (tracé d'une fonction en maths par exemple) de découvrir des documents. Il peut se mettre au service de l'idée essentielle de ma pédagogie d el'activité : que les élèves échangent entre eux.

 

Est-ce que tous les élèves s'y retrouvent avec votre méthode ?

 

C'est le contraire de la classe inversée classique. On donne aux élèves la possibilité d'aller au bout de leurs difficultés.  Ca profite à tous.

 

Faut-il des changements dans la classe et l'établissement ?

 

Le seul problème rencontré c'est le nombre d'élèves. Au delà de 32 ça devient difficile d'encourager la coopération. J'ai découvert qu'avec les "bonnes" classes ça se passait très bien car ils ont l'habitude d'apprendre en expliquant.

 

Votre parcours particulier vous a-t-il aidé à imaginer cette méthode ?

 

J'ai été professeur au Nouveau Brunswick, au Canada, puis formateur. On utilisait des moyens d'enseignement à distance. Puis j'ai enseigné à de futurs enseignants au Québec. Enfin je suis revenu en France. Ce parcours m'a donné de la distance sur ce qu'est apprendre. Quand je suis revenu en France je savais que je ne pourrais plus faire de cours magistraux. J'avais compris que ce n'est pas parce qu'on dit qu'on est compris. Je connaissais aussi l'importance des lacunes des élèves. Enfin je suis un enfant d'une école Freinet. Ca aussi ça compte.

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 24 février 2015.

Commentaires

Vous devez être authentifié pour publier un commentaire.

Partenaires

Nos annonces