Vagues syndicales sur les nouvelles obligations de service 

Le ministère utiliserait-il la réécriture des obligations de service des enseignants du second degré pour les faire travailler davantage ? C'est ce que dénoncent plusieurs syndicats dont le Snes. Le projet de circulaire fait suite à la publication du nouveau décret sur le métier enseignant. Sur certains points elle modifie imperceptiblement l'équilibre issu de la concertation lancée par Vincent Peillon. Or pour pouvoir changer le métier, fallait-il que rien ne change ?

 

Le nouveau calcul des heures supplémentaires

 

Globalement pas de mauvaises surprises à la lecture du projet de circulaire envoyé aux syndicats en vue d'un prochain comité ministériel. Le texte rappelle que les nouveaux décrets "reconnaissent l’ensemble des missions des enseignants : la mission d’enseignement qui continue à s’accomplir dans le cadre des maxima hebdomadaires de service actuels ainsi que l’ensemble des missions qui y sont liées directement... De même, les textes reconnaissent la possibilité pour certains enseignants d’exercer des missions particulières au niveau d’un établissement ou au niveau académique". Les maxima de service des enseignants du second degré sont rappelés et sont conformes aux maxima existants. Un certifié ou un PLP doit toujours 18h hebdomadaires, un agrégé 15 heures. Le texte précise que les heures d'enseignement des professeurs documentalistes comptent double. Surtout il rappelle, exemples à l'appui, les nouvelles pondérations qui remplacent l'ancien système des décharges horaires. C'est le cas pour la pondération 1.1 pour les heures dans le cycle terminal du lycée général ou la pondération de 1.25 en BTS. Il n'omet pas "l'heure de vaisselle" en SVT. Globalement sur tous ces points, le nouveau décret a maintenu ce qui existait antérieurement en le consolidant avec un texte clair au lieu d'une accumulation de textes de valeur variable.

 

Ce sont les heures supplémentaires que l'on peut imposer à un enseignant qui constituent le premier point de friction avec les syndicats. La nouvelle circulaire pousse un tout petit peu la ligne. " L’ensemble de ces enseignants, à l’exception des documentalistes et des enseignants du premier degré exerçant en enseignement adapté, peuvent être tenus d'effectuer, sauf empêchement pour raison de santé, une heure supplémentaire (art.4 du décret n°2014-940)", rappelle la circulaire... "Toutefois, lorsque l’application des pondérations donne lieu à l’attribution de moins d’une heure supplémentaire, l’enseignant pourra être tenu d’effectuer, en sus, une heure supplémentaire entière". Concrètement les enseignants pourraient se voir imposer 1,9 heure supplémentaire alors que les textes actuels disent une heure. Ce glissement est vivement dénoncé par le Snes mais aussi par Sud et FO.

 

Des missions en plus ?

 

L'autre point d'achoppement ce sont les nouvelles missions liées au service d'enseignement. Le décret de 2014 a reconnu comme faisant partie du métier enseignant tout ce que fait l'enseignant en plus des heures de cours : les préparations, la correction des copies, le dialogue avec les collègues ou les parents. Tout cela n'est pas compté en terme d'heures. Mais est bien inscrit dans le texte. Et c'est ce que rappelle la circulaire. " Le décret reconnait l’ensemble des missions liées directement au service d’enseignement dont elles sont le prolongement. Relèvent ainsi pleinement du service des personnels enseignants régis par ces dispositions, la préparation et les recherches nécessaires à la réalisation des heures d'enseignement, les activités de suivi, d'évaluation et d’aide à l’orientation des élèves inhérentes à la mission d'enseignement, le travail en équipe pédagogique ou pluri-professionnelle ainsi que les relations avec les parents d’élèves". Et la circulaire rappelle aussi que "l’enseignant perçoit, au titre de l’exercice de ces missions, sa rémunération indiciaire et l’indemnité de suivi et d'orientation des élèves (ISOE)", une gratification fort mince (1200 euros par an) au regard du volume horaire consacré à ces missions.

 

Mais, dans la foulée, la circulaire fait des précisions qui lui sont reprochées. " Entrent notamment dans ce cadre : les réunions d’équipes pédagogiques, qu’elles prennent ou non la forme d’une participation à des instances identifiées telles que les conseils d’enseignement..., les conseils de classe; la participation des enseignants à l’ensemble des dispositifs d’évaluation des élèves au sein des établissements, notamment à l’organisation d’épreuves blanches (brevet blanc, baccalauréats blanc…) ; les échanges avec les familles notamment les réunions parents - professeurs ; les heures de vie de classe, dont l’organisation est coordonnée par les professeurs principaux et qui peuvent faire intervenir d’autres enseignants ;  les réunions du conseil école-collège".

 

Le Snes dénonce la limitation apportée à la liberté pédagogique en imposant des modes d'évaluation. Il dénonce aussi l'extension de service en imposant la participation à des conseils qui reposent sur le volontariat comme le conseil école-collège ou le conseil pédagogique.

 

Enfin il y a la question des heures de vie de classe. La circulaire e vante l'importance tout e précisant qu'elles ne font pas partie du service. " En revanche, les heures de vie de classe, qui visent à permettre un dialogue permanent entre les élèves de la classe, entre les élèves et les enseignants ou d'autres membres de la communauté scolaire, sur toute question liée à la vie de la classe, à la vie scolaire ou tout autre sujet intéressant les élèves, n’entrent pas dans le service d’enseignement stricto sensu des enseignants qui en assurent l’animation". Puis elle les introduit dans les missions d'enseignement. Or pour le Snes, ces heures doivent être payées.

 

Un climat qui change dans les établissements ?

 

Le Se-Unsa dénonce de son coté la façon dont le texte évoque les heures d'enseignement des professeurs documentalistes. " Les heures d’enseignement visées sont celles qui « correspondent aux heures d’intervention pédagogique devant élèves liées aux enseignements figurant dans les grilles horaires de chacun des cycles d’enseignement. ». En clair pour les professeurs documentalistes, cela se limiterait aux heures d’accompagnement personnalisé en lycée et en 6e ainsi qu'à l’encadrement des travaux personnels encadrés et IDD. De fait, la circulaire passe à côté de la très grande majorité des interventions pédagogiques des professeurs documentalistes. Comme si le ministère souhaitait à tout prix minimiser la portée de la réforme…Une orientation qui interroge au moment où la ministre met en valeur l’éducation aux médias et à l’information dont les profs docs s’occupent depuis toujours."

 

Pour Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes, interrogée par le Café pédagogique, "il y a bien un alourdissement de la charge de travail qui pourrait être exigée des enseignants avec ce texte". Elle dénonce les réunions imposées et le nouveau calcul des heures supplémentaires. Mais elle le lie au climat vécu dans les établissements. "On assiste à un durcissement des relations entre chefs d'établissement et enseignants. Un des points de conflit c'est la participation imposée aux collègues à des réunions qui ne font pas forcément sens. Ils ont l'impression d'une bureaucratie plus pesante".

 

François Jarraud

 

Le texte de la circulaire

Le nouveau métier enseignant

Communiqué Snes

Communiqué Se Unsa

 

 

Par fjarraud , le lundi 23 février 2015.

Commentaires

  • Delafontorse, le 23/02/2015 à 11:31
    En s'abstenant de voter non au projet de Décret Peillon, le SNES a donné lors du CTM du 27 mars 2014 son accord tacite au Ministère de l'Education pour casser les statuts des professeurs du second degré. Ces statuts ont donc été cassés par décret fin août 2014 par Hamon.
    Et voici à présent le SNES qui s'élève contre les conséquences prévisibles - et d'ailleurs prévues - de cette avalisation ?

    Le SNES est tout simplement inconséquent ou bien il se moque de ses adhérents dont il défend plus que mal les intérêts. C'est de la mauvaise foi ou de l'incompétence pure et simple.

    Ce n'est pas avec de tels "syndicats" que les professeurs seront défendus. En vérité, il est plus que temps qu'une coordination indépendante des professeurs des premier, second degré, CPGE et Universités voie le jour , car c'est l'ensemble des enseignants de France qui sont aujourd'hui scandaleusement opprimés par toutes les voies possibles : politiques, administratives et juridiques, médiatiques et économiques. Le but est de les casser pour casser l'enseignement public et instaurer un grand marché privé de l'éducation.

    Les autres travailleurs sont aussi opprimés que les enseignants, mais les enseignants ont les moyens intellectuels d'analyser et dénoncer cette oppression de tous pour assurer les intérêts privés de quelques-uns. Un autre scandale serait que cette analyse et cette dénonciation ainsi que les luttes auxquelles elles doivent mener n'aient pas lieu.
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