Paul Raoult : "Il ne faut pas nier les élèves. Il faut discuter avec eux" 

Que faire face aux débordements  lors de la minute de silence ? Pour Paul Raoult, président de la FCPE, première association de parents d 'élèves, il faut prendre le risque du débat avec les élèves. La Fcpe demande la mise en place d'un numéro vert pour aider les enseignants à mener ces débats.

 

Les médias parlent beaucoup des cas d'irrespects de la minute de silence. Comment la Fcpe réagit-elle à ce phénomène ?

 

Pour nous l'Ecole doit avant tout être éducative. Il faut discuter avec ces élèves, libérer la parole, leur parole. L'esprit Charlie c'est aussi entendre ce qu'on n'a pas envie d'entendre. C'est dans le dialogue que l'on pourra faire prendre conscience de leurs propos à ces élèves.

 

L'Ecole doit-elle se soucier de la ségrégation en son sein ?

 

Après le 11 janvier, l'institution éducative doit balayer devant sa porte. Les propos sur l'enseignement de l'éducation civique ça me fatigue ! Quand on va dans les établissement son nous dit que c'est un enseignement important. Mai sen réalité, souvent l'éducation civique n'est pas enseignée. L'horaire est utilisé pour d'autres disciplines. Si c'est comme cela c'est probablement parce que les inspecteurs ne demandent pas à inspecter l'éducation civique. Il serait bon qu'ils le fassent. Et que l'on ait de vrais cours d'éducation civique avec des débats.

 

A l'Assemblée nationale certains demandent que les enseignants signalent les élèves déviants. Et on nous annonce un livret sur la prévention de la "radicalisation". Qu'en pensez vous ?

 

Devant certains propos un professeur être amené à alerter. Il peut dire : "Je suis choqué. Venez m'aider". C'est comme cela que je conçois le signalement. Les enseignants ne sont pas formés à la discussion. Je salue ceux qui ont pris le temps du débat avec leurs élèves. Mais beaucoup ont exprimé leurs difficultés. Aucun sujet ne doit être tabou à l'école. Il faut accompagner les enseignants avant tout signalement. Si des propos tombent sous le coup de la loi , l'école a toujours la possibilité de porter plainte.

 

On a largement sous estimé le nombre d'incidents lors de la minute de silence. Il y en a eu dans tous les départements, y compris le mien, les Vosges, où officiellement on dit qu'il n'y en a pas eu. C'est faux je le sais. En minimisant on ne donne pas à ces jeunes la possibilité de comprendre ce qu'ils ont fait.

 

J'ai demandé à la ministre la mise en place d'un numéro vert dans chaque académie qui apporte une aide aux enseignants pour débattre avec les élèves. Dans les établissements où le sujet est devenu tabou, je demande qu'un équipe externe à l'établissement vienne instaurer le débat avec les élèves. On doit attacher de l'importance à ce qui se passe. Il n'y a pas eu d'énormes débordements. Mais il ne faut pas nier les élèves. Il faut discuter avec eux.

 

Enfin, dans les propos qui posent problème en ce moment, je veux parler de la Marseillaise. C'est tout à fait normal qu'on la chante car elle symbolise l'égalité dans la République. Mais dans la situation actuelle où on parle sans cesse de guerre, il me semble important de faire la part des choses avec les élèves qui entendent des strophes si guerrières.

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

 

 

 

Par fjarraud , le jeudi 15 janvier 2015.

Commentaires

  • amalric, le 16/01/2015 à 07:34
    Et quand l'élève insulte le professeur parce que femme, juive, blanche, "bourge" et j'en passe....il nous conseille quoi le Môsieur....
  • emapi, le 15/01/2015 à 19:54
    "Il ne faut pas nier les élèves. Il faut discuter avec eux".

    Alors là, vraiment, MERCI M. Paul Raoult! Les petits enseignants que nous sommes n'y avaient jamais pensé...

    Je constate que chacun y va de son bon (ou pas) mot sur ce qu'on doit faire à l'école, plein de "faut qu'on/y a qu'à" qui me donnent réellement l'impression que:
    - on me prend pour une décérébrée incapable de penser l'école bien qu'y consacrant la plupart de mon énergie;
    - on laisse entendre ça et là que je suis incapable d'empathie avec mes élèves;
    - je fais les frais, un peu plus chaque jour, du mépris clairement affiché de tout cet aéropage de personnes qui ne connaissent finalement pas grand-chose à l'école...
  • Bernard Girard, le 15/01/2015 à 09:19
    Est-il vraiment indispensable d'en passer par des rituels vides de sens pour faire réfléchir les élèves ? Un peu partout, des enseignants ont mené avec leurs élèves une réflexion riche de sens sans passer par la minute de silence officielle et artificielle.

    Quant à la Marseillaise, ce n'est pas être djihadiste que de prétendre que ce symbole de brutalité et d'intolérance n'a pas sa place à l'école... ni ailleurs.
    • amalric, le 16/01/2015 à 07:38
      Le chant  des Partisans est alors clairement un appel au meurtre...dans votre vision donc !

      Rituel vide de sens....pour vous....
    • Delafontorse, le 15/01/2015 à 18:09
      C'est une très bonne chose que l'hymne national ne témoigne pas de faiblesse ou de bisounourserie. Ni le Chant du départ, ni le Chant des partisans non plus n'en témoignent. Et c'est une autre très bonne chose que l'hymne national ait une histoire qui ait besoin d'être expliquée pour être comprise. C'est ce qui le différencie d'une chanson ("hon", dirait Philippe Meyer) de supporters de football ou du dernier tube commercial.
    • thais8026, le 15/01/2015 à 15:54
      Je suis d'accord avec votre 1ère partie mais pas du tout sur vos propos sur La Marseillaise.
      Oui, c'est un chant guerrier et alors... 
      Ce n'est pas un chant d'intolérance, relisez la en entier. C'est un chant qui demande aux français de se lever contre toutes agressions de son pays. Que la défense de celui-ci et de ses valeurs n'est pas l'affaire et la responsabilité de quelque uns (politiciens ou armée) mais l'affaire de tous.
      Oui, les paroles sont dures si elles ne sont pas expliquées et oui elle a sa place dans les écoles rien que pour sa valeur historique.
  • Viviane Micaud, le 15/01/2015 à 08:25
    Il me semble qu'on a trop pris au premier degré la parole de l'élève, trop voulu leur donner une place de co-organisateur de l'établissement, ce qui a mis les plus faibles à la merci des manipulateurs, internes aux jeunes puis externes aux jeunes.
    Dans un établissement scolaire, ce sont les adultes qui doivent décider. Ils écoutent les jeunes mais ils tiennent compte que certains sont dans la provoc. Ils décident, expliquent le pourquoi de leur décision aux sincères et utilisent des techniques de gestion des provocateurs pour les autres.
    Je pense que ceux qui ont imposé de traiter les "provocateurs" comme s'ils étaient sincères, ont une responsabilité importante dans le pourrissement du climat scolaire dans les établissements. 
    Les théories de "bisounours" ne fonctionnent pas là où il y a des manipulateurs dont les éléments de langage sont des construits par des adultes qui veulent porter atteintes à la République.
    • Viviane Micaud, le 18/01/2015 à 11:53
      Je vous invite pour comprendre à relire un de mes billets d'avril 2014, intitulé "les effets pervers de la doctrine de l'école bienveillante", où j'invite à être un peu plus réalisme sur ce qu'est la bienveillance.

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