Le CNESCO dévoile une éducation civique "de façade" 

Dans le contexte de l'après 11 janvier, alors que la ministre de l'éducation nationale organise "la grande mobilisation de l'Ecole pour les valeurs de la République", le Cnesco décrit une réalité de l'Ecole bien différente. Le 12 janvier, le Conseil national d'évaluation du système scolaire, présidé par Nathalie Mons, publie un rapport qui évalue la réalité de l'éducation civique en France. Pour le Cnesco si en principe l'éducation civique est exemplaire en France, dans la réalité elle relève de "participation de façade" notamment pour les jeunes des quartiers populaires et  dans les dernières années de la scolarité, celles qui préparent directement à l'entrée dans la vie citoyenne.

 

" Légalement, la France n’est pas en reste en termes d’éducation à la citoyenneté, elle se place au contraire en tête des pays européens par son investissement éducatif théorique dans ce domaine d’enseignement", rappelle le Cnesco. Tout le rapport est ainsi inscrit dans cette opposition entre les prescriptions réglementaires et la réalité de ce qui se passe sur le terrain, dans une situation très française.

 

En apparence, la France " se place en tête des pays européens par son investissement éducatif en matière d’éducation civique". Elle est le seul pays européen à dispenser pendant 12 années consécutives un enseignement à la citoyenneté obligatoire. Les élèves participent à la gestion des établissements ce qui est une forme très active d'éducation à la citoyenneté. Ils participent aussi à des  projets éducatifs. Sur le papier la France est simplement exemplaire.

 

Des enseignements qui passent à la trappe

 

Mais le Cnesco ne s'attache pas qu'au papier. "Derrière cette façade d’un engagement massif dans l’éducation à la citoyenneté, les faiblesses de ces apprentissages sont nombreuses", écrit le rapport. Il ne dévoile rien qu'on ne sache. Mais il le révèle officiellement comme une institution chargée d'évaluer l'Ecole.

 

" Dans les faits, les heures d’enseignements, intégrées le plus souvent à l’histoire-géographie ne sont pas toujours dispensées dans leur totalité", écrit le Cnesco en soulignant le cas du lycée. De la même façon, la participation des élèves aux instances de gouvernance des établissements laisse à désirer. Le taux de participation des lycéens aux élections à la vie lycéenne n'atteint aps 50% en 2012. La parole des lycéens n'est pas prise en compte ne réalité dans les établissements. " Les valeurs citoyennes de la République apparaissent hors sol et désincarnées", érit le Cnesco alors que " un champ de recherche fécond et solide4, développé notamment dans les pays anglo-saxons depuis une vingtaine d’année montre, notamment, que ce sont les participations des jeunes dans des projets et débats citoyens dans leur école, plus que le suivi de cours d’éducation civique qui sont en lien positivement avec les indicateurs d’attitude, d’engagement et de socialisation citoyenne et politique des plus jeunes."

 

L'éducation civique ne touche pas les classes populaires

 

Le Cnesco démontre aussi que l'éducation civique omet les jeunes des classes populaires. Alors que les séries générales du lycée comptent un horaire précis d'ECJS, dans la voie professionnelle l'éducation civique est le parent pauvre d'un bloc lettres - histoire-géo. En série technologique, " seules certaines mentions dans des thèmes d’Histoire ou de Géographie sont développées". Au final, " les filières d’élite sont mieux pourvues en enseignement citoyen que les filières moins favorisées aux publics plus démunis socialement, contribuant certainement à construire des inégalités de socialisation politique", écrit le Cnesco.

 

Déficit de préparation du jeune citoyen

 

Le Cnesco souligne encore un dernier déficit de l'éducation civique à la française. Alors que cet enseignement est bien fléché à l'école et au collège, c'est au lycée qu'il peut disparaitre comme on vient de le voir " alors que les recherches montrent aujourd’hui que l’éducation civique qui précède directement l’entrée dans la vie citoyenne adulte, notamment à travers la participation au processus électoral, est déterminante pour assurer un engagement citoyen de qualité".

 

Une pédagogie à revoir

 

"Ce sont les participations des jeunes dans des projets et débats citoyens dans leur école, plus que le suivi de cours d’éducation civique qui sont en lien positivement avec les indicateurs d’attitude, d’engagement et de socialisation citoyenne et politique des plus jeunes (participation associative, participation électorale, croyance dans les institutions, tolérance pour l’altérité…)", écrit le Cnesco. Or le Conseil relève que les projets citoyens sont peu nombreux.

 

Alors que la ministre consacre toute une semaine à réfléchir à l'enseignement des valeurs républicaines, le Cnesco rappelle son existence à la communauté éducative. Cele-ci en a bie besoin. Le même jour, la consultation des syndicats par la ministre a montré qu'il y avait peu de remise den question de l'éducation civique avec l'exception de F Sève, secrétaire général du Sgen Cfdt , précisant que "l'école doit s'interroger sur la façon dont elle pratique la citoyenneté à travers les conseils de vie lycéenne". Et la petite note du Cnesco apparait déjà comme prescriptive.

 

François Jarraud

 

La note du Cnesco

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 13 janvier 2015.

Commentaires

  • Delafontorse, le 13/01/2015 à 22:47
    Appelons un chat un chat : les problèmes radicaux sont dans les inégalités économiques croissantes et l'accaparement des richesses par une faible minorité de personnes privées. La casse de l'école de la République par nos gouvernements successifs pour la transformer en garderie "bienveillante" afin d'abrutir les pauvres et favoriser la privatisation tous azimuts du secteur éducatif, cette casse certes ne résoudra pas ces problèmes... puisqu'elle est destinée à les aggraver.

    Rappelons quand même ce beau projet néolibéral pour l'école et les institutions publiques, concocté par les experts de l'OCDE depuis au moins l'année 1996, je cite le Cahier de politique économique de l'OCDE n° 13 de 1996 : 

    "L'apprentissage à vie ne saurait se fonder sur la présence permanente d'enseignants mais doit être assuré par des prestataires de services éducatifs. Les pouvoirs publics n'auront plus qu'à assurer l'accès à l'apprentissage de ceux qui ne constitueront jamais un marché rentable et dont l'exclusion de la société en général s'accentuera à mesure que d'autres continueront à progresser (....) Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement". 

    Si vous avez encore la naïveté de ne pas en croire vos yeux, 
    téléchargez le Cahier de politique économique n°13 de 1996 de l'OCDE : 
    http://www.cip-idf.org/IMG/pdf/ocde_n_13_.pdf

    Nous en sommes à la baisse organisée sciemment de la qualité de tout ce qui est institution publique, école comprise. Ces mobilisations à la va vite qui laissent croire que ce n'est pas au quotidien que l'école essaie de faire valoir les valeurs républicaines sont une pure INSULTE à tous les enseignants de France. Et je pèse mes mots...
    "une semaine pour se mobiliser pour les valeurs de la République"... De qui se moque-t-on ?!

    On voit surtout qu'il n'aura pas fallu 48 heures après les manifs du 11/01 pour que la propagande néolibérale s'empare des événements pour les récupérer et les mettre à profit contre l'école de la République, insultée et humiliée de plus belle, "elle qui n'a pas su transmettre etc., etc., etc." !
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