Colloque de Sévres : De Ketele : Penser de façon holistique 

Comment expliquer le succès des systèmes éducatifs asiatiques ? Jean-Marie de Ketele, co organisateur du colloque et professeur à l'université de Louvain la Neuve, met en avant les racines culturelles des familles et des systèmes éducatifs.

 

Les systèmes éducatifs asiatiques sont renommés. Quelle importance du confucianisme, des traditions familiales dans ce succès ?

 

 Je suis étonné que religion et culture soient profondément imbriqués alors que c'est moins le cas en occident. La fusion culture religion autour de quelques valeurs est telle que les gens ne font plus la différence. Dans nos pays occidentaux il y a des valeurs liées à la culture par exemple francophone ou anglo saxonne, mais qui sont plus indépendantes des religions. On distingue d'ailleurs davantage les pratiques religieuses et les valeurs des religions et cultures. J'ai fait la préface d'une enquête menée par un chercheur de Bruxelles sur ce que pensent les étudiants et lycéens des rapports entre religion et sciences. Il a trouvé 3 groupes : des catholiques, des musulmans et des laïcs ou agnostiques. On voit une différence dans les réponses. plus l'emprise de la religion est forte dans la vie quotidienne plus il y a une schizophrénie de la pensée sur ce qu'il faut penser de la science quand on en fait et quand on est en dehors d'un travail sur la science. Elle est moins forte chez les laïcs , pas très forte en Belgique chez les catholiques mais la coupure est forte chez les étudiants qui se réclament d'être musulmans. Je ne trouve pas cela en Asie.

 

Un autre point c'est le rapport entre croissance de l'éducation et croissance économique chez ces pays. Chez nous ce  rapport semble plus délicat ?

 

Les 7 pays dont on parle toujours car ils ont d'excellents résultats sont ceux qui mettent le plus l'accent sur le développement économique. La devise de Singapour, par exemple, c'est "une éducation compétitive pour un développement économique compétitif". Mais on ne parle pas des autres comme la Malaisie l'Indonésie ou la Thailande ont des résultats faibles et n'ont pas le même rapport au développement économique. Et il ya l'asie de l'ouest musulmane. On a été trop obnubilé par ces 7 pays.

 

Un colloque comme celui la permet il de mieux comprendre nos systèmes éducatifs?

 

Je pense que oui. Les méthodologues de la recherche disent qu'on ne comprend bien que par comparaison. Pour bien comprendre son pays il faut aller dans d'autres pays. Je ressors d'ici en comprenant mieux les systèmes occidentaux par comparaison.

 

Une idée s'en dégage ?

 

Pour moi l'idée la plus importante c'est le fait que ces pays asiatiques qui ont réussi ont des systèmes éducatifs qui pensent de façon holistique  (qui consiste à considérer les phénomènes comme des totalités NDLR). On ne pense pas programmes, formation des enseignants ou ce qui se passe dans la classe mais ce qui se vit dans l'établissement. On  pense a mettre les élèves en situation d'être responsables de leur environnement scolaire. On pense à la famille. Chez nous on est analytique. Les disciplines sont morcelées, les horaires aussi. L'enseignant se retire après la classe; Au Japon l'enseignant vit avec ses élèves. Il se réunit avec ses collègues pour échanger. Il a des contacts réguliers avec les familles au niveau local. Au niveau macro aussi. On devrait réfléchir davantage à inclure davantage cette dimensions holitisme dans notre système.

 

C'est faisable ?

 

Il faudra au moins une génération et en France peut être plus. Car il y a beaucoup de blocages, de baronnies. Les enseignants se reconnaissent par leur discipline. On a du pain sur la planche..

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

Les fiches et les contributions au colloque

 

 

 

Par fjarraud , le lundi 16 juin 2014.

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