Rythmes : Le CSE refuse le décret Hamon 

Réuni le 5 mai, le Conseil supérieur de l'éducation (CSE) a rejeté nettement, par 31 vois contre, 3 pour et 27 abstentions le décret sur les expérimentations de rythmes scolaires présenté par Benoit Hamon. Apparemment le rejet est plus net que pour le décret Peillon qui avait eu 23 voix contre et 5 pour. Apparemment aucun consensus ne peut être trouvé sur les rythmes scolaires. Mais dans la réalité il est bien possible que ce soit juste le contraire. C'est ça le CSE...

 

Un premier décret sur les rythmes scolaires avait été présenté le 8 janvier 2013 par Vincent Peillon. Il instituait une semaine de 9 demi journées de classe avec 3 heures de TAP, c'est à dire d'activités périscolaires, et un maximum de 5h30 de cours par jour. Après près de 2 ans de batailles et d'agitation contre ce texte, après l'éviction de V. Peillon, Benoît Hamon a voulu tourner la page. A peine un mois après sa nomination, il présente un projet de décret qui ne remplace pas le décret Peillon mais autorise des "expérimentations". Le ministre affiche la continuité avec V Peillon mais cherche un équilibre entre les attentes des différentes parties.  Derrière les promesses de continuer la refondation, les propositions ministérielles cherchent à satisfaire les demandes des uns et des autres. Ainsi le décret Hamon donne la possibilité du retour à 8 demi journées de classe, avec 6 heures de cours par jour, même si le principe de 5 matinées de classe est maintenu. C'est aussi la reconnaissance du rôle du conseil d'école dont l'avis est indispensable pour monter l'expérimentation alors que de nombreux maires avaient accordé peu d'attention aux enseignants dans le cadre du décret Peillon. Le décret permet aussi de regrouper les TAP sur une seule demi journée. Cela avantage toutes les parties et surtout les maires qui auront une gestion plus facile du périscolaire et peut-être moins d'enfants à prendre en charge si cet après-midi est le vendredi. C'est cette proposition qui a été largement repoussée le 5 mai.

 

Le Snuipp, premier syndicat d'enseignants du primaire, a voté contre. " Sur le papier, cette organisation de cinq matinées et trois après-midi portée par le SNUipp-FSU peut s’avérer intéressante notamment pour les enseignants. Mais, dans les faits, et au vu des délais, il est fort probable que parmi tous ceux qui le souhaitent, très peu pourront la mettre en œuvre. Pour le SNUipp-FSU, c’est donc trop peu et trop tard". Le syndicat continue à demander la réécriture du décret Peillon. La CGT craint avec ce décret le creusement des inégalités  territoriales. La Fcpe a aussi voté contre le décret mais sur une toute autre base. Pour  elle, " au-delà de 5 heures par jour, un élève de primaire n’a plus les mêmes capacités d’apprentissage et de mémorisation" et donc la possibilité d'aller jusqu'à 6 heures de classe par jour, comme sous Darcos, semble inacceptable. " Alors que le précédent décret était fait dans l’intérêt des élèves, vous nous proposez aujourd’hui de l’assouplir pour obtenir la paix sociale avec une infime minorité de maires", écrit l'association de parents. " Finalement, pour satisfaire les 5 % d’opposants, vous nous faites des propositions d’assouplissement en prenant le risque de donner raison à vos détracteurs. Le gouvernement de combat refuse-il déjà de se battre ? Vous nous présentez ce décret comme un texte permettant des expérimentations, mais encore faudrait-il qu’elles aillent dans le bon sens, celui des élèves, du respect de leurs rythmes d’apprentissage". Clairement la Fcpe vote contre le décret pour des raisons inverses du Snuipp et de la Cgt...

 

Les syndicats Unsa et Sgen se sont abstenus. " Le SE-Unsa et les syndicats de l’Unsa-Education se sont abstenus sur le décret après que le ministère a accepté un amendement mettant en avant le bien-fondé éducatif de tout projet comme premier critère de validation par le recteur. Le ministère s’est également engagé, à notre demande,  à indiquer clairement dans la circulaire que la durée de deux semaines des petites vacances ne pouvait pas être remise en cause et à rendre le PEDT obligatoire pour tous les projets  qui seront déposés pour la rentrée 2015. Tout renouvellement d’expérimentation sera aussi conditionné par l’existence d’un PEDT", écrit le Se Unsa. Pour Christian Chevalier, secrétaire général du syndicat, interrogé par le Café, "le décret laisse trop d'espace aux Dasen". Le syndicat y voit "un vrai risque" qu'ils acceptent des projets trop éloignés des ambitions de la refondation.

 

La Peep est la principale organisation à avoir voté pour le décret. Pour elle, "les assouplissements proposés constituent une avancée notable, même s'il est regrettable que la maternelle n'ait pas été exclue de l'obligation d'application de cette réforme".

 

Ainsi le rejet du décret semble plus net encore que pour le décret Peillon. Faux ! clame le Se Unsa. "Les votes sur les amendements proposés par les différentes organisations sont très clairs : le Conseil Supérieur de l’Education soutient massivement la réforme des rythmes scolaires", affirme-t-elle. Ce serait aussi la lecture de Bertrand Gaume, directeur du cabinet de B Hamon.

 

Ce décret rejeté aussi massivement ne sera donc pas appliqué ? Tout prévoit le contraire. Un nombre important de communes devrait demander à bénéficier du regroupement des TAP sur une demi journée. Cette proposition risque fort d'être soutenue par les conseils d'école. Ce décret mal aimé pourrait rapidement devenir la loi générale ce qui permettrait au gouvernement de sortir de ce conflit. Il y a un précédent. En 2008 le même CSE avait voté contre le décret Darcos instituant 4 jours de classe par semaine. On connait la suite...

 

François Jarraud

 

Position Snuipp

Position Se Unsa

Position FCPE

 

Par fjarraud , le mardi 06 mai 2014.

Commentaires

  • Kicekela75, le 06/05/2014 à 11:23
    Les nombreux projets PEDT=garderies ne sauraient rester cachés très longtemps.
    En particulier en maternelle.
    Une pensée pour les animateurs, qui souvent pouvaient partir à la journée le mercredi, et faire de vraies sorties intéressantes (et avoir un salaire correct pour  cette journée là), tant pis. Métier sacrifié. Entre autres.

    Sur le sujet: deux votes, l'an passé, et cette année, pouvant largement être qualifiés de débâcle.
    Message reçu: "vous votez, mais n'y comprenez rien, nous pensons pour vous".

    Comme les députés sur le pacte, quel courage cette abstention! Au final, ça passe.
    Mais ici: l'abstention + les "pour" < aux "contre".
    Conclusion logique: ça passe quand même. On fait le même coup dans les référendum (dangereux, d'ailleurs, donc plus de référendum...), on vote pour un programme, un positionnement ("Mon ennemi, c'est la finance"), on en obtient un autre. On vote "non" au CSE, ce sera "oui".

    La période veut cela.
    Retour de bâton il y aura.

  • Viviane Micaud, le 06/05/2014 à 09:54
    Les syndicats ont des postures pour sortir le moins mal possible de ce problème complexe, sans trop se déjuger de leur premier engagement et sans se couper de leur base, qui ne souhaite pas venir travailler une journée en plus et réorganiser leur semaine.
    Il y a toutefois unanimité pour qu'il y ait au moins 5 matinées travaillées.
    Personnellement, je pense que les TAPs fatiguent autant les élèves que les heures sous la responsabilité de l'enseignant. Il faut voir la fatigue des élèves qui restent de 8h à 18h30 à l'école car leurs parents travaillent.
    Il faudrait prendre en considération que les enseignants, sont à fait capable de mettre en place des activités plus reposantes en fin de journée. C'est d'ailleurs étonnant que les syndicats participent au négationnisme général sur ce point. Il s'agit d'un dénigrement des enseignants. Est-ce voulu ?
    • PierreL, le 06/05/2014 à 11:26
      C'est le gros malentendu du départ, pas du dénigrement. 
      On a appelé réforme du "rythme scolaire" un aménagement du temps "éducatif" de l'enfant, et surtout de celui qui fréquente l'école (le lieu) au delà des 6 heures scolaires.
      Ce qui a produit l'effet de loupe sur les TAPs et la surenchère de leur contenu (les perles contre le poney).
      Aménager le temps scolaire on sait faire, et bénéficier d'une matinée en plus facilitera une bonne répartition des activités scolaires prévues dans le cadre des programmes nationaux. 
      Ceci étant, et il me semble que c'était un élément important de la réforme, il faut rechercher une cohérence entre le temps scolaire et celui "municipal". C'était l'idée du PEDT qui doit s'articuler autour du Projet d'école… D'où l'importance du Conseil d'école, et du rôle du directeur dans le dispositif. 
      C'est de la faiblesse de l'école face à ses partenaires, de l'incapacité de l'Administration à nous mobiliser, à nous parler même (on se rappelle que V.Peillon avait réuni tous les inspecteurs en février 2013, en leur demandant de sortir du management pour accompagner, informer… que s'est-il passé sur le terrain????)

      Le manque de considération pour les enseignants des écoles je le situe plutôt dans l'argument: "ça ne change rien pour eux", mis en avant pour ne pas compenser, pour le personnel, les effets négatifs induits par la matinée supplémentaire (déplacements, garde d'enfant…), alors qu'il aurait suffit de passer à 23h/semaine.
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