La circulaire N° 2002-101 du 25 avril 2002 stipule : Les enfants des parents non sédentaires sont soumis à l’obligation scolaire entre six et seize ans. Ils ont droit à la scolarisation dans les mêmes conditions que les autres enfants, quelles que soient la durée et les modalités du stationnement dans le respect des mêmes règles d’assiduité notamment …C’est la résidence sur le territoire d’une commune qui détermine l’établissement scolaire d’accueil. … L’intégration dans les classes ordinaires est à privilégier avec la mise en place si nécessaire de soutien pédagogique (1) .
Des élèves Manouches,Yenish, Gitans… arrivent parfois à l’école. Enfants du voyage dans les faits et dans la culture, ils vivent, avec leurs familles, des conditions de vie souvent compliquées par la rareté des aires de stationnement et d’exclusion. L’École, si elle constitue un enjeu important pour les familles du voyage, restent néanmoins un milieu étrange où les enfants vont très rapidement découvrir leur différence. La scolarisation fonctionne alors comme un emprunt à une autre culture, celles des sédentaires, une culture de l’écriture et de la lecture qui contraste avec l’omnipotence de l’oralité dans les usages communautaires. Autant de paramètres que l’école doit connaître afin de mettre en place une organisation bienveillante favorable à l’épanouissement et aux apprentissages des écoliers passagers (2) .
« Le plus beau cadeau de parent d'élève que j'aie jamais reçu »
Régine Malié est professeure des écoles depuis 1994. Elle exerce en classe de CP en Midi-Pyrénées
Novembre 2013… Un nouvel arrivant dans ma classe : enfant du voyage au prénom improbable. Fouillis dans le cartable : cahiers raturés, feuilles déchirées, matériel incomplet, vague idée du travail réalisé depuis la rentrée. Petit bilan des savoirs : les sons-voyelles sont identifiés, le graphisme est relativement maîtrisé. Je lui prépare donc du travail personnalisé et essaie de lui consacrer un peu de temps sur ma journée de classe où je fais face à 28 élèves ! Bref, la routine.
Et puis voilà la maman qui m'apostrophe : Madame, c'est quand que vous le prenez en soutien ? Je ne me vois pas l'intégrer à mes groupes déjà constitués ; le niveau est trop différent. Je discute donc avec cette maman qui m'exprime avec beaucoup de force : Je veux que mes enfants apprennent ! Ebranlée, je lui promets de chercher une solution. Je prends contact avec l'association locale de soutien scolaire. Surchargée ; pas de bénévole disponible.
Contrat
Profondément touchée par l'énergie que met cette maman à se battre pour ses enfants, j'adhère à l'association (franchement, là, je ne l'avais pas envisagé avant la retraite) et propose à la famille le contrat suivant : je m'occuperai pendant une heure tous les mercredis de ses 2 enfants (7 et 6 ans) dans le local de l'association à condition qu'elle respecte les horaires et que je sente les enfants dans le désir d'apprendre à lire.
Elle s’en tiendra scrupuleusement à cet engagement. Eux aussi. Fin février, elle m'annonce son départ. Le jour du départ, elle m'amène une rose. C'est le plus beau cadeau de parent d'élève que j'aie jamais reçu.
Et si vous nous accompagniez ?
Une autre anecdote concernant une enfant du voyage… Après moult explications destinées à la rassurer, la maman accepte que sa fille vienne à la piscine. Elle lui a acheté un tutu qui fera office de maillot de bain. Je fournis le bonnet. Mais un jour où elle déboule dans la classe alors que j'allais prendre le bus avec les élèves pour précisément aller à la piscine : Madame, ma fille ne peut pas venir à la piscine ! J'étais en voiture et j'ai eu une vision ! Elle va avoir un accident !
Interloquée, j'ai un moment d'hésitation, puis, sans trop réfléchir, je lui dis : Et si vous nous accompagniez ? À ma grande surprise, elle accepte. Il s'agit maintenant de convaincre le maître nageur très à cheval sur le règlement d'accepter cette maman aux abords du bassin. Il finit par lui prêter un maillot et j’anime toute ma séance avec cette mère assise sur un plot, mâchouillant un chewing-gum et ne quittant pas sa fille des yeux !
Gilbert Longhi
Rapport de la cour des comptes sur l’accueil et l’accompagnement des gens du voyage
La France est l’un des rares pays à avoir défini une politique publique en la matière. Ce rapport, qui examine la mise en œuvre de cette politique depuis 2010.
La persistance du faible taux de scolarisation des enfants du voyage, en particulier à l’école maternelle et au collège, demeure préoccupante : le dispositif mis en place afin de favoriser la scolarisation des enfants du voyage n’apparaît pas à la hauteur des enjeux, tant sur le plan des structures de scolarisation que des outils pédagogiques, et les retards s’accumulent dans l’acquisition des savoirs fondamentaux.
La cour des comptes formule quatre préconisations…
-établir au niveau déconcentré un programme annuel d’actions en faveur de la scolarisation des enfants du voyage ainsi qu’un bilan annuel ;
-établir un état des lieux de la scolarisation des enfants du voyage dans chaque inspection académique ;
-lutter contre la non-scolarisation et l’absentéisme et développer les actions de médiation menées auprès des familles afin de faire évoluer les comportements ;
-mieux insérer le service public de l’enseignement à distance actuellement assuré par le centre national d'enseignement à distance dans la stratégie de scolarisation des enfants du voyage.
http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/L-accueil-et-l-accompagnement-des-gens-du-voyage Octobre 2012
Notes
1 Circulaire N° 2002 –101 du 25 /04/02 (Education nationale) Brochure de Ministère de l’Education Nationale de 2001 : La scolarisation des enfants du voyage… (Informations inspirées du document diffusé par le CEFISEM et ADPEP 63 en Janvier 2000)
2 Accueillir des enfants du voyage ... www.ac-clermont.fr/...voyage/enfants-voyageurs_memento-pour-enseig... Document élaboré à partir du mémento pour l’enseignant IA 03, du site des CASNAV d’Amiens et de Clermont, des Fiches du CASNAV Créteil et de la publication SCEREN proposée par le CASNAV de Versailles.