Les héritiers : Comment se transmet le niveau d'éducation de génération en génération ? 

Pisa vient de nous rappeler que le système éducatif français a bien du mal à faire progresser les enfants des milieux populaires. C'est un Français, Bourdieu, qui a théorisé les liens entre milieu social et réussite scolaire. Eurostat nous offre pour la première fois une géographie de cet héritage qui interroge le concept.

 

Pourquoi un pourcentage important des enfants des familles pauvres échouent-ils dans les apprentissages de base ? Cette question, qui continue à hanter l'Ecole, les responsables du système éducatif l'ont posé dès le début du 20ème siècle quand ils ont demandé à Alfred Binet de travailler sur l'échec scolaire. Le psychologue a alors cherché des causes naturelles à cet échec scolaire en développant une théorie évoquant une débilité héréditaire des enfants de la classe populaire. La volonté de naturaliser l'échec scolaire continue son chemin. dans les années 1970, le professeur Debray-Ritzen se fait ainsi l'apôtre de la théorie des dons qui n'a pas fini d'empoisonner l'Ecole. Cette semaine une nouvelle version est propulsée par un chercheur britannique, Robert Plomin, qui explique que le réussite aux examens dépend avant tout de facteurs génétiques. La preuve ? Regardons la composition des classes de CPGE...

 

Or Eurostat aborde la même question sous un éclairage différent , celui de l'espace. Une étude évalue la transmission intergénérationnelle des niveaux d'éducation. PLus clairement : quel pourcentage des enfants de parents ayant un haut niveau scolaire ont eux mêmes ce niveau ou un niveau inférieur ? Quel pourcentage des enfants de non diplômés acquièrent un niveau élevé d'éducation ?

 

Ce que montre l'étude ce sont les forts écarts entre les pays, ce qui en soi répond à la théorie génétique. Ainsi dans le Royaume Uni de M. Plomin, seulement 16% des enfants de parents ayant un niveau éducatif faible gardent ce niveau. Un tiers atteint un niveau élevé et la majorité un niveau intermédiaire. Chez nous 22% restent au même niveau et 23% un niveau élevé. La situation est encore pire en Allemagne ou 36% restent au niveau faible et seulement 16% au niveau élevé.

 

Ainsi se dessine une géographie. "En 2011, pour ceux dont les parents avaient un niveau d’éducation faible, il existe une tendance marquée à l'obtention d’un niveau d’éducation intermédiaire dans une majorité d’États membres, les plus fortes proportions ayant été relevées en République tchèque (83%), en Slovaquie (78%) et en Pologne (75%)", écrit Eurostat. "En Finlande ainsi qu’au Royaume-Uni, environ un tiers des répondants avaient même atteint un niveau d’éducation élevé. Cependant, le niveau d’éducation faible perdurait pour la moitié ou plus des répondants à Malte (73%), au Portugal (68%), au Luxembourg (52%) ainsi qu’en Espagne et en Italie (50% chacun), les proportions les moins élevées se situant en Lituanie (10%), en République tchèque et en Suède (11% chacun)".

 

François Jarraud

 

Eurostat


Par fjarraud , le jeudi 12 décembre 2013.

Commentaires

  • mguyard, le 16/12/2013 à 00:44

    Des études ont permis de montrer que les inégalités ne proviennent pas de paramètresgénétiques mais plus géographiques. En effet, les personnes issues de famillesd’un niveau scolaire faible, voient leur chance d’élever leur niveau, trèsréduites. Contrairement aux personnes issues d’un milieu où les études occupentune place importante.

    Ces paramètres se retrouvent dans d’autres pays d’Europe ‘échellesdifférentes. Ce document illustre le classement de l’enquête PISA publiéerécemment, montrant particulièrement les inégalités des chances dans le milieuscolaire. 
  • Viviane Micaud, le 12/12/2013 à 09:47
    Les principaux mécanismes sont :
    - le moindre encouragement à l'effort intellectuel dans la famille (surtout dans les zones où les enfants "scolaires" sont traités d'intellos et de bouffons et où les enfants n'ayant pas un soutien de la famille, préfèrent ne pas se marginaliser dans le groupe),
    - le délit d'initié de l'orientation (qui entraîne des moindres réussites et des abandons plus fréquents) et
    - l'autocensure à cause de représentations de la famille, du groupe ou de la société (n'y va pas ou moindre réussite à cause de la "menace du stéréotype de Steele (1995-1997))
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