Quel avenir pour les Rased ?  

"On ne peut plus jouer la montre". Après des années de suppressions de postes, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) arrivent à un tournant. Alors que le ministère va ouvrir un groupe de travail sur leur métier, le collectif national Rased, qui regroupe les associations de maîtres spécialisés, les syndicats et la Fcpe a envoyé le 30 septembre une lettre à Vincent Peillon pour rappeler les promesses de la gauche.

 

Les Rased rassemblent des psychologues scolaires et des professeurs des écoles spécialisés à dominante pédagogique (maître E) ou rééducative (maître G). Les maîtres E travaillent avec l'élève et l'équipe éducative sur la maîtrise des méthodes et techniques de travail, la stabilisation des acquis et leur appropriation et la prise de conscience de ce qui conduit à la réussite. Les maîtres G interviennent sur le développement de l'envie d'apprendre et l'adaptation des comportements en milieu scolaire. Tous fournissent des aides spécialisées qui s'adressent à des enfants ayant des besoins spécifiques.

 

Un effondrement depuis 2008

 

Rappelons-nous 2008. Quant Xavier Darcos décide de créer une aide personnalisée au primaire il apparait clairement qu'il lorgne vers les postes des Rased. Et de fait depuis 2008, on est passé de 14 844 à 9988 postes en Rased, soit une chute d'un tiers en 5 ans. A la rentrée 2013, si une centaine de postes est recrée on est très loin à ce rythme à pourvoir au rétablissement des Rased. Déjà certains territoires n'ont plus de véritables réseaux, comme les Bouches du Rhône. Mais il y a pire. La formation de ces enseignements spécialisés est en train de disparaître. En 2013 il n'y a eu que 25 départs en formation de maîtres G contre 250 à 300 par an avant 2008. Il n'y a donc plus de renouvellement possible, même si de nouveaux postes étaient créés. Les Espé, nouvelles écoles de formation des enseignants, n'ont pas mis en place de formation spécifique. Et , devant la faiblesse de la demande, les structures anciennes de formation disparaissent. De facto, le corps des Rased est mis en extinction.

 

"On ne peut plus jouer la montre"

 

Le 30 septembre, cette situation est longuement exposée par Maryse Charmet, présidente de la Fanren, association des maîtres G, et Thérèse Auzou-Caillemet, présidente de la Fname qui regroupe les maîtres E. Elles insistent sur la spécificité de l'aide apportée, par rapport aux aides délivrées par les professeurs des écoles. Pour Maryse Charmet, 250 000 élèves sont privés d'aide. Nathalie Gaujac, vice présidente de la Fcpe, association de parents d'élèves, insiste sur la gratuité de cette aide , "indispensable à l'école de la bienveillance". Pour Paul Devin, secrétaire général du Snpi Fsu, les Rased sont un service public, gratuit et sur temps scolaire, donc bien adapté aux familles populaires.

 

Que fait la gauche ?

 

Le désarroi des Rased est d'autant plus vif que la gauche avait fait des promesses. En avril 2012, le candidat Hollande  avait promis de "rétablir les Rased". Une promesse renouvelée le 1er mai 2012 puis le 2 mai, juste avant l'élection. "Il y avait deux marqueurs de la politique de N. Sarkozy en matière d'éducation", remarque Christian Chevalier, secrétaire général du Se-Unsa, "la formation des enseignants et les Rased. Sur le premier point la gauche a régler la question avec les Espé. Sur le second on attend". Pour le Se Unsa, il faut aller vite car il ne s'agit pas seulement de rétablir les Rased mais de rénover leur mission. "Où les former alors que les centres de formation ont disparu ? Quel type de formation ? La question du socle impacte les Rased puisque le suivi des élèves s'arrête au milieu du cycle Cm1-6ème. Il faut des Rased du socle".

 

Le Rased et le Plus de maîtres que de classes

 

Pour Sébastien Sihr, secrétaire général du Snuipp, "le plus de maîtres que de classes permet une organisation pédagogique nouvelle, de travailler autrement. Mais ne remplace pas les Rased". C'est que le nouveau gouvernement a supprimé l'aide personnalisée de Darcos mais a mis en place de nouvelles structures d'aide. La tentation existe de voir se rejouer le scénario imaginé par X. Darcos et les Rased à nouveau concurrencés par ces nouveaux dispositifs comme le "plus de maitres que de classes". La lenteur que met le ministère à tenir ses promesses, le fait qu'un rapport annoncé de l'inspection ne soit toujours pas publié plaident en ce sens. Les associations sont conscientes de cette concurrence même si , lors de la conférence de presse, elles s'en défendent. Ainsi, la Fname a listé dans un tableau les différences entre le maître E, rééducateur pédagogique, et le maître supplémentaire du plus de maître que de classe. Pour la Fname, ce dernier n'a pas de formation spécialisée diplomante, il n'a pas de formation en psychologie cognitive, il n'intervient pas sur les mêmes registres (par exemple les stratégies mentales erronées ou les démarches de pensée inadaptées), il ne se situe ni dans la même posture, ni dans le même environnement.

 

Une lettre ouverte

 

Dans une lettre ouverte au ministre, le collectif  estime qu'il "est urgent d'agir... Que propose-t-on à ces dizaines de milliers d'élèves , aux difficultés souvent multifactorielles et complexes qui ne tirent pas profit ,ou trop peu, de l'aide apportée par leurs enseignants ?". La lettre rappelle les propos tenus par Vincent Peillon à Marseille le 16 septembre où il exprimait son soutien aux Rased. "Ces signes doivent être traduits en actes", écrit le collectif. Les concertations.. doivent se mettre en place sans tarder".

 

Et un ultimatum

 

Interrogés par le Café pédagogique, les dirigeants syndicaux montrent leur résolution. "J'espère que cette conférence de presse permette le démarrage du groupe de travail dans les 15 jours", affirme Christian Chevalier. "On ne peut plus jouer la montre. Il faut maintenant y aller". "Il faut un calendrier précis et qui associe tout le monde, associations comprises", souligne Sébastien Sihr.  Le collectif promet de continuer à fonctionner après la mise en place du groupe de travail et de faire face à ses divergences. Il faudra bien cela pour relancer la dynamique des Rased.

 

François Jarraud

 

Par fjarraud , le mardi 01 octobre 2013.

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