Les échecs des méthodes de lecture : une nouvelle piste.

On s’interroge encore énormément sur l’échec en apprentissage de la lecture. Les constats sont irréfutables, beaucoup d’enfants n’apprennent pas à lire dans leur année de CP, pire, beaucoup sont comme tétanisés et finissent dans la cohorte des relégués « sans aucune formation »après 16 ans.

On a beaucoup cherché les causes de cet échec pour unefrange importante des élèves de CP. On a accusé les méthodes de lecture,comparant l’efficacité des unes et des autres. On a augmenté la connaissancelexicale, préparé l’accès à la conscience phonologique, sans pour autantparvenir à une amélioration notable.

Et si tout simplement on avait commis des erreurs pédagogiques.Alors on pourrait comprendre que certains élèves, majoritairement, s’en sortenten rétablissant le bon cheminement pendant que d’autres s’embourbent etpatinent. Voici quelques exemples de cette pédagogie néfaste :

Enseigner à l’enfant que les lettres se sonorisent, qu’on peut décoder directement en voyant un mot au sein d’un texte. Si par malheur l’apprenti est docile, il apprend que « o » se lit /o/ et le voilà bien embarrassé lorsque il doit lire moulin, moitié, monsieur, monter, moins… Toutes les voyelles se décodent de nombreuses façons et même les consonnes. Prenez le cas du « n » qui se décoderait /n/…alors que 80% des lettres « n » environ ne se décodent justement pas /n/ : monter, mentir, fin, un, point,trouvent, examen, … J’ai même pu entendre que z se lit é lorsqu’on décode « assez »!  

On a oublié comme le dit Saussure que ce n’est pas « oi »qui se lit /oi, mais le son /oi/ qui s’écrit « oi », moyennant quoi on sait alors le décoder. Il illustre ce constat avec le mot oiseau où aucune des lettres ne se décode comme appris habituellement.

Enseigner la lecture de syllabes. En réalité on fait sonoriser des lettres. Par exemple on apprend à lire « mon » que chacun a déjà prononcé intérieurement /mon/ !

On a oublié que c’est le codage des sons par l’écriture qui engendre le décodage correct et lui seul. Donc « mon » se décode correctement si on vient d’écrire monter, monsieur, monotone. « men » n’est pas plus facile à décoder si on n’a pas commencé par coder les sons/ mentir, examen, mener, rament, amen, prenne, …/

Enseigner la lecture des non-mots est au sommet de l’erreur pédagogique. Il conforte l’élève dans la certitude que « a » se décode /a : etc.

On a totalement oublié l’aspect communication permis par le codage de l’écrit. L’élève apprend alors qu’il faut rôder la mécanique des décodages « académiques ».

Ce qui le conduira à écrire bato plus facilement que bateau.On se plaindra alors de son manque d’orthographe…

La solution ? Commencer par faire coder, ce qui engendre nécessairement la lecture (et pas un décodage académique). Alors l’enfantcomprend et accepte la multiplicité des codages puisqu’ils traduisent le plus souvent un changement de sens (est, aie, aies, haie, haies). Il sait qu’en lisant il va rencontrer des mots dont il devra retenir l’orthographe (vent,vend), montrant ainsi qu’il a compris ce qu’est lire : recevoir correctement du sens à travers un écrit.