Fracture(s) 

Combien seront-ils dans les rues aujourd’hui ? Combien resteront dans leur classe ? Combien regarderont la bouteille à moitié vide, combien considéreront la bouteille à moitié pleine ? La profession enseignante est divisée, le dialogue semble rompu, chacun campant sur ses positions, en référence à un passé proche épineux ou en espérant des lendemains meilleurs. Les arguments des uns et des autres échappent à la sphère stricte du rationnel. Les raisons de faire grève ou pas trouvent échos dans les situations personnelles, la recherche d’une reconnaissance, l’impression ou non d’être repoussés dans un retranchement catégoriel, les espérances, les représentations placées dans le métier.

 

Les uns accusent les autres d’avoir la mémoire courte, les autres soupçonnent les uns de se laisser séduire. Les uns estiment que les réformes sont décidées par des bureaucrates éloignés des réalités du terrain, les autres retrouvent dans les discours officiels leurs propres mots longtemps décriés. Et tous s’appuient sur l’intérêt de l’enfant, un intérêt commun mais dont les composantes divergent. Viennent ensuite les craintes sur l’image d’une profession répondant au sentiment de ne plus être un métier respecté, ancré dans la Cité. Qui a raison, qui a tort ? Les arguments s’entrechoquent sous le regard parfois étonné, parfois solidaire, parfois outré des composantes de l’opinion.

 

A l’heure de la pause café, le dialogue entre parents d’élèves est tout aussi brouillé. Une maman s’enthousiasme pour les possibilités qu’offrent la réorganisation des journées, des activités nouvelles pour les enfants, des interventions d’acteurs extérieurs dans l’école. Une autre s’inquiète. Que feront les enfants lors d’une pause méridienne allongée alors que la garderie se déroule dans un préfabriqué mal aménagé ? Idéal contre questions concrètes, les différences de vue surgissent aussi de ce qui est vécu localement, de l’importance offerte à l’école dans la politique communale dans l’arbitrage entre les investissements à mener.

 

Le changement est il possible dans la rupture, dans les fractures. Ecouter les uns et les autres, comprendre les motivations à évoluer en profondeur ou à rester camper sur ses pratiques pourrait être un préalable. Mais comment le faire pour un sujet aussi complexe qui réveille autant d’émotions qu’est l’éducation ? Les réflexions locales pourraient être une clé. Il reste à les orchestrer. Dans une institution vaste comme l’Education Nationale avec autour d’elle des acteurs divers qui interviennent de près ou de loin sur le système éducatif, la tâche est ardue. Bon courage Monsieur Peillon !

 

Monique Royer

 

 

Par fjarraud , le mardi 12 février 2013.

Commentaires

  • derenty, le 12/02/2013 à 21:08
    En ce qui me concerne, le principal point d'achoppement est le fait que Monsieur Peillon ne veule pas entendre parler du samedi matin travaillé.
    La question a déjà été posée aux professeurs des écoles, et la réponse a été, me semble-t-il, qu'en cas de retour à la semaine de 4 jours et demi, ils préféraient travailler le samedi matin. Je me trompe ?
    Certains chronobiologistes estiment que la coupure du week-end est trop longue, ont-ils été écoutés ou Monsieur Peillon n'entend-il que ceux qu'il veut entendre ?
    Le CTM rejette le projet de décret des nouveaux rytmes scolaires, Monsieur Peillon promulgue son décret !
    L'Education Nationale a beaucoup souffert durant les années Sarkozy. Surtout le primaire.
    Apparemment, nous allons encore souffrir !

    Dominique Fasquel, PE, 30 ans d'ancienneté, complétement désabusé...
    • ColdTrukey, le 13/02/2013 à 15:20
      Petite question qui s'est posée en AG hier :
      pourquoi les élèves français seraient (sont) fatigués le mercredi alors que les élèves des autres pays ne le sont pas ?
    • jeanmarcpichon37, le 13/02/2013 à 10:38
      Le décret offre la possibilité de travailler le samedi matin.C'est donc parfaitement possible. De plus le décret dit que les conseils d'école sont consultés, que le maire fait ensuite une proposition au DASEN qui prend la décision si la solution proposée présente des garanties pédagogiques suffisantes.
      Cela montre que le décret est peu connu et que l'on peut craindre que la loi ne le soit pas plus alors qu'elle donne le cadre de transformations profondes.
      Le fond des mécontentements me semble plutôt se fonder sur la non reconnaissance des difficultés de l'exercice de ce métier de la seule manière qui ait une valeur : la rémunération. L'ISOE devrait donner une première réponse : de 400€ à 1200 sur trois ans.
      • ColdTrukey, le 13/02/2013 à 13:59
        Sur le terrain, c'est légèrement différent puisque les DASEN doivent agir dans l'intérêt des services. La multiplication des fonctionnements n'est pas gérable (et ce n'est pas moi qui le dit mais un DASEN).
        Quant au fond du mécontentement, il suffisait d'être en AG hier pour percevoir que la rémunération ne venait pas en premier, même si c'est un point non négligeable.
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