Rythmes scolaires : Pourquoi Blois attendra 2014.... 

Déjà dotée d'un projet éducatif local, avec une municipalité de gauche, la ville de Blois optera très probablement pour l'attente. En novembre 2012, nous avions rencontré Yann Bourseguin, maire adjoint à l'éducation. Il attendait avec impatience les textes. Deux mois plus tard, après la publication du décret sur les rythmes, il oscille entre déception et irritation. Le doute s'est installé sur la faisabilité de la réforme des rythmes. Il soulève aussi la question des obligations légales pour les communes. Rien dans le décret ne semble obliger les villes à développer des activités périscolaires. Alors, à l'impossible nul n'est tenu ?

 

Le décret sur la réforme des rythmes est paru. Allez vous opter pour son application en 2013 ou 2014 ?

 

Très probablement nous allons demander une dérogation pour 2014 pour prendre le temps de la réflexion et de la concertation avec les parents et les enseignants.

 

Allez-vous opter pour un allongement de la pause méridienne ou pour un temps périscolaire de fin de journée ?

 

On s'attendait à ce que le décret instaure 3 quarts d'heure de périscolaire le soir de 15h45 à 16h30. Or ce n'est pas le cas. Il définit le temps scolaire et les APC. Mais il ne dit rien des obligations des communes sur le périscolaire.  Il laisse la possibilité aux communes de faire quelque chose, rien de plus. Le décret ne contient aucune demande claire et formelle. Quand je lis le décret j'en arrive à la conclusion que nous n'avons pas l'obligation de mettre en place du périscolaire. Pour nous c'est une surprise et nous allons en discuter avec le préfet.

 

En ce qui concerne la pause méridienne, à Blois elle est déjà d'1h45 avec un encadrement d'un animateur pour 15 enfants en maternelle et 1 pour 25 en élémentaire. Mais ce temps n'est pas réglementé Jeunesse et sports et donc le taux d'encadrement varie fortement selon les communes de l'agglomération. Pour nous à Blois le faire passer à 2 heures ce n'est pas un problème. Mais augmenter ainsi ce temps de pause méridienne, le faire passer comme on l'envisage à Paris à 2h45, est-ce souhaitable ? Dans quel état seront les enfants à l'issue de ce temps ?

 

On avait réfléchi à la question de la tranche 15h45-16h30. Et on était arrivé à quelque chose de simplement impossible : tripler le nombre d'animateurs, recruter 175 animateurs supplémentaires. A Blois cette ressource humaine n'existe pas. Il y a un autre problème : celui de l'espace. Aujourd'hui on accueille environ mille élèves après 16h30. Si je dois prendre en charge 4 500 enfants je n'ai que les salles de classe pour les accueillir. Or c'est un espace qui est déjà partagé. Ces problèmes les autres communes de l'agglomération me disent les connaitre également. Je verrai donc ce que me dira le préfet et s'il me confirme que j'ai le droit de ne rien faire.

 

D'autres communes envisagent de redéfinir les emplois par exemple en déchargeant les atsem des tâches d'entretien pour en faire des animatrices. Cela vous parait-il une réponse au problème de ressources humaines ?

 

Pour certains emplois , comme le conservatoire de musique ou les piscines, on est en compétence partagée avec l'agglomération ce qui rend les ajustements plus difficiles. On a de grandes différences selon les communes pour les atsem. A Blois il y a 1,2 atsem par classe de maternelle. Dans d'autres communes, seulement 1 atsem pour 2 classes. A Blois on leur demande déjà d'intervenir comme animatrices. Il faut bien voir que toutes les communes de l'agglomération ne sont pas engagées à l'identique en faveur de l'éducation. A mon avis la plupart vont attendre 2014.

 

Alors il va falloir du temps pour trouver la bonne solution au problème d'encadrement. Trouver 175 animateurs disponibles de 15h45 à 16h30 et qualifiés Jeunesse et sport ça ne me semble pas possible à Blois même avec une révision, par ailleurs inquiétante, des taux d'encadrement. On est d'accord sur le principe des 4 jours et demi de classe. Mais je ne vois pas comment nous allons faire.

 

A défaut d'obligation légale de mettre en place du périscolaire, vous risquez d'avoir la pression des parents pour que l'école dure au moins jusqu'à 16h30...

 

Cela ne nous pause pas de problème. On peut faire démarrer la journée à 9 heures au lieu de 8h30 et allonger la pause méridienne à 2 heures. Avec une journée de 5h30 d'enseignement on arrive à finir la journée à 16h30. Il y a juste un petit effort à fournir le matin.

 

Vous venez de signer une nouvelle convention avec la CAF. Vous discutez avec elle du périscolaire à mettre en place ?

 

La CAF est un partenaire quotidien de la ville. Mais on n'a pas d'élément sur  la prise en compte par la CAF du périscolaire en plus des 3 heures par semaine existantes pour un volume qui serait plus important.  C'est un aspect du problème.

 

A Blois, le 23 janvier , des enseignants grévistes ont clairement dit qu'ils voulaient garder le mercredi libre. Quelles relations avez vous avec les enseignants sur cette question ?

 

A Blois on a un programme éducatif local depuis 2012 et donc on est en dialogue permanent avec les enseignants et les directeurs d'école. Ils ont perçu très positivement la sanctuarisation du budget de l'éducation nationale et les créations de postes. Ils disent que la réforme implique une demi journée de travail supplémentaire et des frais de déplacement. Mais ce n'est pas leur revendication première. Les enseignants attendent surtout une évolution des programmes. La crispation est beaucoup plus forte sur ce point que sur les rythmes. A mon avis il faut les entendre. Par ailleurs, sur les rythmes, leurs revendications sont légitimes.

 

Vous allez consulter les enseignants ?

 

On ne peut pas travailler tout seul. Dans le cadre du Projet éducatif local on a prévu une consultation de septembre à décembre avec les enseignants,, les parents et les associations. On va faire venir des chronobiologistes pour expliquer la nécessité de la réforme des rythmes. On va informer sur les aspects financiers. Cela permettra ensuite à tous de participer à une décision éclairée. Il faudra aussi discuter avec la communauté d'agglomération. Car la réforme impacte les frais de transport , de conservatoire, de piscine.

 

Vous avez estimé le coût financier de la réforme des rythmes ?

 

Le seul fait de mettre en place une restauration le mercredi matin représente 350 000 euros. Chauffer et éclairer les écoles un jour de plus c'est 40 000 euros. On est entre 600 000 à 1,2 million d'euros de dépense supplémentaire pour la ville ce qui est considérable.

 

Vous trouvez que le décret est mal fait, que le ministère n'a pas bien travaillé ?

 

N'importe quel élu local aurait pu dire au ministre que l'application de ce texte pose des problèmes colossaux pour les ressources humaines et les locaux. A Blois aujourd'hui on accueille 10% des enfants scolarisés dans les centres de loisir soit 400 enfants. Nous demander de passer à 4 500 enfants ce n'est pas possible. Le cabinet du ministre nous semble un peu éloigné des réalités locales.

 

Une mise au point ministérielle

 

A l'issue de cet entretien avec Yann Bourseguin, le Café pédagogique  a interrogé le ministère sur les obligations légales des communes. La loi n'impose pas aux communes de développer des activités périscolaires. Par conséquent le décret ne peut pas non plus le faire. Mais l'Etat s'est engagé à aider les communes à la mise en place de services périscolaires. 250 millions seront donnés aux communes selon un dispositif qui apporte un soutien plus important aux communes les plus en difficulté. Le ministère de l'éducation nationale donnera des instructions pour que les inspections académiques assistent les communes dans la conception de leur projet éducatif territorial. Un guide sera envoyé aux communes dès le début de la semaine prochaine.

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

 

Novembre : Comment Blois se prépare au changement

 

Par fjarraud , le vendredi 01 février 2013.

Commentaires

  • LAURENT LAMAGNE, le 01/02/2013 à 22:07
    Ça fait du bien de lire les propos de ce Maire qui explique bien les problèmes engendrés par la réforme des rythmes bien trop précipitée.

    Par contre, un de ces propos est inexact :

    "Les enseignants attendent surtout une évolution des programmes. La crispation est beaucoup plus forte sur ce point que sur les rythmes."

    Non, les enseignants sont surtout crispés sur la question des rythmes.

    • ColdTrukey, le 03/02/2013 à 08:00
      Tout dépend du sens donné au terme rythme.
      Il me semble que beaucoup d'enseignants souhaitent une profonde refonte des programmes pour que justement ceux-ci soient adaptés aux capacités des enfants et que, par conséquent, leur permettre d'avoir des rythmes d'apprentissage plus tranquilles.
      Nous en sommes arrivés à un point où nous réussissons à stresser des enfants de maternelle.
      Là, où de nombreux pays ont compris que les apprentissages se font dans le calme, sans pression et au rythme de l'enfant, nous continuons à penser qu'il est possible de les enfourner de force, même quand les enfants ne sont pas prêts.
      Oui, notre Education Nationale a besoin d'une réforme mais il faut se donner le temps de la faire avec une loi de programmation qui fixe les objectifs, fixe un calendrier, se se donne les moyens de réussir et évalue objectivement les différentes étapes.  Un point noir : la formation. C'est un domaine dans lequel l'Education Nationale est faible, ce qui est paradoxal. Est-ce dû au fait que nombreux sont ceux qui pensent que pour être enseignant (ou formateur), il suffit d'avoir des diplômes? 
  • Koikilensoi, le 01/02/2013 à 19:32
    Je lis ce soir un mail du SE Unsa qui se rallie, comme désormais le snuipp, à la grève du 12.

    Avec regret ce retard constaté, mais avec plaisir de lire les arguments apportés qui sont ceux que nous dénonçons depuis longtemps déjà.
    La pause du midi, rallongée, va être une solution généralisée (ou presque..., car financièrement arrangeante!!!) et on va vraiment pourvoir faire apparaître clairement que ce mieux-être de l'enfant n'est pas l'objectif de cette refondation!!!
    "déjà, avec deux heures de pause méridienne, les élèves qui sont restés à la restauration scolaire, peuvent retourner en classe dans un état d’excitation peu compatible avec une reprise de la classe ;" (sic)
    Combien de temps, quel gâchis va t-il falloir pour constater que les gens du terrain, vous savez, ces "corporatistes", étaient finalement sans doute soucieux du bien-être de leurs élèves, et que derrière un mercredi salvateur, reposant, un prof reposé est aussi un prof plus dispo pour ces têtes blondes!!!
    • Koikilensoi, le 01/02/2013 à 19:38
      Précision: quand j'écris "un prof reposé":
      je vous l'assure, je le sais, j'en suis, je travaille une grosse partie du mercredi pour la classe ou la direction...
      Ce que nous appelons communément "fatigue" est le temps passé devant enfant. Un temps que nous apprécions, qui n'en est pas moins un temps qui "vampirise" l'énergie!!!
      • Fgouzy, le 03/02/2013 à 18:54



        De : fjarraud
        Publié : vendredi 1 février 2013 07:37
        Objet : Rythmes scolaires : Pourquoi Blois attendra 2014
        ....Pourquoi ces arguments semblent-ils seulement parvenir en "haut-lieu"  (au pluriel : national-politique, national-syndical et ministère)?
         Fallait-il les ignorer pour mettre en place une réforme rapidement?
        Où, ont-eu lieu les débats, les échanges? J'ai eu beau en chercher trace (dans mes mails professionnels et mes demandes à des collègues ou sur le site du rectorat...), je n'en ai pas trouvée. Un manque de connaissances des problématiques diverses que soulève cette question d'organisation de la journée, de la semaine (et des semaines dans une année) semble manifeste et nous insupporte.
        La gRRRande concertation semble avoir été menée ailleurs que sur le terrain.
        Nos arguments (plus ou moins recevables selon des oreilles plus ou moins agacées par le corporatisme) sont testables au quotidien...des élèves en collectivité de 8h à 17h3o, pour une majorité; des municipalités qui ont des réponses très variables aux demandes ministérielles pour raison de  décentralisation...
        Sur ce thème :
        connaissez-vous des écoles qui fonctionnent avec  une ATSEM pour deux classes, en MS et en GS (une demi-ATSEM! Ce qui nous interdit de répartir des PS dans toutes les classes, malgré un projet, et accessoirement pour répondre à des sollicitations de chercheurs dans ce domaine)? D'autre part, cette municipalité rémunère les heures de surveillance sur la base du tarif instituteur (ce qui et légal, puisque la rémunération inscrite au BO est un maximum...), alors que sur la circo, il n'en reste qu'une poignée! (d 'instituteurs). Spoliant ainsi les prof d'école d'env. 1, 30 euros/heure.
        Deux exemples, différents dans leurs effets (le premier étant plus délétère pour tous les élèves que le second  qui concerne de - en - d'enseignants qui n'assurent plus cette heure, laissée à du personnel précaire et pas
         formé) qui témoignent d'une observation qui aurait dûe  être menée avant de lancer tout autre changement.
        Le manque de contraintes d’organisation de la scolarité pesant sur les municipalités est manifeste et conduit à des écarts d'accueil (et d'apprentissage des élèves, lié aux conditions même de travail) qui augmente les inégalités de réussite d'une scolarité) et ce changement va encore accroître les écarts.
        Les fondations n'existent pas dans certaines communes qui appliquent les lois à minima, et rajouter un pan nouveau risque fort de faire s'effondrer l'édifice, déjà bien fragilisé et tout au moins de ne pas répondre à l'objectif poursuivi et de vider totalement de leur énergie les élèves et les prof d'école...





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