Embarquée par la police dans son lycée pour un badge 

Au lycée Providence des Abymes, en Guadeloupe, la proviseure a appelé la police et fait arrêter dans l'établissement une lycéenne mineure parce qu'elle portait deux badges qui lui déplaisaient. Les syndicats locaux protestent. Le recteur, Stephen Martens, apporte tout son soutien au chef d'établissement. La proviseure a exclu provisoirement l'élève et convoqué un conseil de discipline.

 

Il faut lire le témoignage d'Isaline, une jeune élève de 16 ans du lycée Providence des Abymes. En une matinée elle s'est retrouvée interdite de classe, puis cueillie par la police dans les toilettes et embarquée par 4 policiers jusqu'au commissariat après avoir subi une fouille et les questions de la proviseure. Elle n'a été relâchée qu'en fin de matinée après 5 heures traumatisantes. Isaline n'a pas amené de drogue dans l'établissement. Ni d'arme. Elle n'a frappé personne. Ce qui lui est reproché c'est de porter deux badges vendus par un journal de jeunes qui porte bien son nom : "Rebelles Be Bad". Le magazine, réalisé par des jeunes et vendu à la sortie des lycées, s'en prend volontiers à l'autoritarisme des proviseurs.

 

En affichant ces badges Isaline marque sa sympathie pour ce magazine. Pour la proviseure, c'est beaucoup plus grave. Pour elle, "Rebelle" est un groupe d'extrême gauche, le badge est une manifestation politique interdite à l'intérieur de l'établissement et l'opposition d'Isaline un refus d'obtempérer. Isaline est exclue de l'établissement pour une semaine ainsi que plusieurs de ses camarades qui l'ont soutenu. Elle attend son conseil de discipline. La police, appelée par le chef d'établissement, après l'avoir retenue et intimidée n'a rien à lui reprocher. Dans un article de France Antilles, le recteur évoque Rebelle Be Bad qu'il définit comme "un groupuscule politique d'extrême gauche qui créé du désordre aux abords des établissements depuis deux ans : insultes, violences, intrusions, provocations". Quant à Isaline, il affirme que " cherchant à ameuter ses camarades, elle a créé un climat de trouble qui a entraîné l'appel de la patrouille. Ils n'ont pas réussi à la calmer". Interrogé par le Café, le rectorat ne s'est pas expliqué.

 

Pour Lionel Lorrain, secrétaire régional du Sgen Cfdt, Rebelle n'est pas un groupuscule dangereux et la répression est tout à fait disproportionnée. " Que dénoncent-ils ? La présence de rats dans certains lycées, l’interdiction de porter des locks ou des vanilles, l’interdiction pour les filles de porter des vêtements coupés au dessus des genoux, des renvois autoritaires et sans ménagement d’élèves, des refus de réinscrire des élèves dans leur établissement pour des prétextes fallacieux, des tentatives d’intimidation. Bref, ils dénoncent des abus d’autorité et une liberté d’expression bafouée", nous dit-il. " Plusieurs syndicats ont dénoncé cette situation car, en plus d’être ridicule, elle est assez significative des brimades subies par des jeunes gens qui n’ont qu’un seul objectif, améliorer la société dans laquelle ils vivent. Pouvoir étudier dans des locaux salubres, pouvoir étudier avec la coiffure et les vêtements qui leur plaisent, pouvoir exprimer leurs points de vue, pouvoir diffuser un journal lycéen. Mais pour cela, encore faudrait-il que l’encadrement certains établissement ne se perçoive comme étant « de droit divin », ce qui reste malheureusement encore trop souvent le cas chez nous." La FSU locale proteste également contre les mesures prises contre Isaline.

 

Le ministre va-t-il couvrir le recteur ? Cet incident est à la fois significatif et politiquement intéressant. Il pose évidemment la question du respect des droits des élèves et particulièrement de leur liberté d'expression. Il interroge aussi sur la formation des cadres du système éducatif. Le trouble et le traumatisme générés dans cette affaire ne sont-ils pas sans commune mesure avec l'offense ? L'éthique de l'enseignement et sa finalité ne sont-ils pas perdus de vue ? Mais il y a aussi une question  politique.  Alors que V. Peillon veut insuffler de la confiance dans l'institution, il n'y a pas de semaine où au Café pédagogique nous ne recevions de témoignages de l'autoritarisme de certains cadres. Dans cette affaire le recteur s'est exprimé publiquement et a engagé l'autorité du ministre. Quelle est sa position dans cette affaire ? Mardi 29, le recteur fêtait sa promotion dans l'ordre du mérite.

 

François Jarraud

 

PS : Attention le port des badges qui illustrent cet article peut vous valoir une descente de police...

 

 

Le témoignage d'Isaline

Celui du recteur

Le magazine Rebelle Be Bad

 

 

Par fjarraud , le mercredi 30 janvier 2013.

Commentaires

  • caribwoman, le 31/01/2013 à 03:01
    Je suis Guadeloupéenne et professeure  en lycée dans l'académie de la Guadeloupe. Les faits relatés dans cet article  sont complètement faux. Les " Rebelles" sont en réalité un groupe de lycéens déterminés à troubler l'ordre public et à créer des problèmes au sein des établissements, avec l'aval de certains syndicats et organisations politiques.  Ils sont loin d'être populaires; les lycéens ne les ont pas suivis. En dehors du lycée de Providence, les cours se déroulent normalement dans les autres lycées de l'académie. Je dénonce la démagogie des commentaires précédents.
    Monsieur le Secrétaire académique du Sgen-Cfdt brosse un tableau d'une touchante naïveté; il ne connait absolument rien à la réalité du terrain ni d'ailleurs au pays Guadeloupe et est par conséquent très mal placé pour faire ce genre de commentaires.
    • Pietrarubbia, le 31/01/2013 à 14:09

      "Monsieur le Recteur, 

      Je suis une élève de seconde au lycée de Baimbridge, je vous contacte pour dénoncer un fait qui me semble inacceptable; au conseil de classe du deuxième trimestre, j'ai voulu poser une question, je voulais savoir si un adulte, quel qu'il soit, ayant des responsabilités dans le lycée, pouvait se permettre de frapper ou de malmener un élève. 

      Après avoir posé cette fameuse question, je me vois somée de me taire par le proviseur adjoint aux secondes. Le fait était que, je cite "Nous ne sommes pas la pour discuter de cela, nous n'avons pas le temps, passons a autre chose mademoiselle, c'est terminé!"." 
      25 mai 2010

      http://www.youtube.com/watch?v=wS4rveVApI0

  • Pietrarubbia, le 31/01/2013 à 00:50

    à 

    MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

    Palais de l'Élysée

    Objet: REQUÊTE D'ENQUÊTE SUR LA VIOLENCE PÉDAGOGIQUE EN GUADELOUPE

    Monsieur le Président

    Professeur certifié au Lycée général et technologique de Baimbridge de 1984 à 2011, j'ai été alerté fin 2009 par de nombreux élèves des agissements inappropriés et violents  du proviseur. Conformément à la loi,  j'ai envoyé en avril et en juillet 2010 deux recueils de témoignages au procureur de la République de Pointe-à-Pitre et au recteur de la Guadeloupe. 

    En juillet 2010, un collègue a adressé une lettre semblable au procureur.

    Le rectorat m'a répondu par voie hiérarchique en m'informant, d'un ton comminatoire, que mes 'propos' pouvaient "être qualifiés de diffamatoires."

    Quant au procureur de la République, il n'a jamais répondu à mes deux lettres. 

    Suite à ma plainte auprès du Tribunal administratif de Basse-Terre, en novembre 2011, dix-huit mois après ma première lettre au procureur, j'ai été convoqué au commissariat de Pointe-à-Pitre. La fonctionnaire de la police judiciaire en dressant un procès-verbal m'a félicité de mon courage, mais, hélas, je reste persuadé, presque trois ans après mes lettres, qu'aucun témoin cité dans mes deux lettres n'a été entendu par la police..........

    Le 31 décembre 2012

    http://www.youtube.com/watch?v=wS4rveVApI0

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