Sébastien Sihr : "J'ai peur que l'or attendu se transforme en plomb" 

Le 31 janvier un professeur des écoles sur trois (29%) devrait être en grève. Après la manifestation des professeurs des écoles contre les rythmes, au lendemain de la publication du décret sur les rythmes scolaires, à la veille de la manifestation le 31 janvier, quelle analyse le Snuipp, premier syndicat du primaire, fait-il de la refondation ? Pour Sébastien Sihr, son secrétaire général,

 

 

Le Snuipp, avec la Fsu, la Cgt et Solidaires, appellent à manifester le 31 janvier. Quel regard jetez-vous sur la situation de la refondation ?

 

On est à une étape où on voit bien que l'école primaire qui a tant besoin de confiance est secouée. La réforme des rythmes scolaires est devenue illisible  après les récentes déclarations de l'AMF. Au fil des semaines on a des déclarations contradictoires, des zones d'ombre apparaissent. Les enseignants découvrent les décisions des mairies sans avoir été consultés ce qui crée des contentieux. Finalement le débat sur les rythmes est réduit à une question d'emploi du temps. Il est escamoté.

 

Très clairement nous voulons le report de la réforme à 2014. On voit bien que son application va par exemple supprimer des systèmes qui marchent très bien comme les rythmes retenus à Toulouse ou Lomme. On n'est pas opposé à une application dès 2013 mais à condition que l'organisation résulte d'un projet construit par les conseils d'école.

 

Le fait que les Dasen décident en dernier lieu ça ne vous rassure pas ?

 

Il faut que les Dasen garantissent l'intérêt de l'école et ne se fassent pas des relais des seules contingences communales. Pour nous, il faut marcher sur deux jambes et ne pas opposer les intérêts des enseignants et des élèves. Je redoute que l'intérêt des élèves soit mis sous le tapis par rapport aux nécessités de l'école. On invite les enseignants à interpeller leurs élus. Pour le moment on a l'impression que le ministère navigue à vue sans que l'on ait notre mot à dire. La réforme souffre d'impréparation.

 

La préparation de la rentrée 2013 est en route. Comment les enseignants l'anticipent-ils ?

 

J'ai peur que l'or qui était en perspective soit en train de se transformer en plomb. V Peillon aurait pu reconstruire la confiance dans l'institution en s'attaquant à des questions comme les programmes scolaires, l'évaluation, le statut des directeurs. Or il n'a pas attaqué la refondation par là. Il a commencé par une réforme nécessaire mais pas prioritaire. Du coup la refondation perd en lisibilité et gagne en polémique.

 

Le ministre a annoncé une revalorisation, la refonte des programmes. Vous ne le croyez pas ?

 

Je lui demande de mettre en place un agenda  pour donner du corps à son action. Apparemment c'est ce qu'il devrait faire le 4 février. Enfin ! Ce geste est indispensable. C4est comme la revalorisation financière : ça ne peut plus attendre. Il faut mettre fin au décalage salarial dont sont victimes les professeurs des écoles.

 

Surtout nous allons interpeller le ministre sur trois points qui nécessitent des changements. D'abord la nécessité de consulter les conseils d'école à propos des rythmes scolaires. Ensuite la revalorisation des professeurs des écoles. Enfin une remise à plat du décret pour qu'il soit plus souple dans les dérogations. Si on n'avait aps de réponse sur ces points on appellerait à l'action.

 

La manifestation du 31 janvier demande la revalorisation pour tous les fonctionnaires. Dans la situation budgétaire actuelle cela vous parait possible ?

 

C'est un sujet difficile. Mais la situation de certains fonctionnaires mérite d'être revue. Mme Lebranchu le reconnait. IL faut que l'Etat ouvre des perspectives aux fonctionnaires.

 

Vous n'avez pas voulu vous associer à l'appel de trois syndicats pour une grève le 12 février. Pourquoi ?

 

Contrairement à la plateforme de cet appel, nous ne sommes pas pour le retrait de la loi d'orientation. Cette loi donne la priorité au primaire, crée 60 000 postes. On sait aussi que la loi ne fait pas tout. L'application est importante et on sera exigeant pour que le quotidien professionnel des enseignants change.  

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

 

Par fjarraud , le mercredi 30 janvier 2013.

Commentaires

  • instit17, le 30/01/2013 à 13:29
    Je rends ma carte du snuipp dès demain.
    je suis atterré par leur immobilisme, c'est une traîtrise envers les personnels enseignants et les elèves... on croit rêver...
    on verra aux prochaines élections professionnelles...
    quant à moi, je vais me tourner vers des syndicats qui semblent mieux nous défendre et s’intéresser aux enseignants... SNE ou FO, je ne sais pas encore... en tout cas, snuipp et seunsa c'est fini pour moi...

  • Koikilensoi, le 30/01/2013 à 11:11
    Je tenais à préciser que beaucoup d'école ne feront pas grève le 31 janvier, parce que les collègues n'aiment traditionnellement pas les grèves appelées 'fourre-tout" (toute la fonction publique + tous les thèmes du jour). D'ailleurs des syndicats importants appellent, pour cette raison à ne pas faire grève ce jour.
    Par contre, une autre grève spécifique aux rythmes scolaires aura lieu le 12 février...
    Cela va appeler à une grande confusion, et permettre de "relativiser" cette grève du 31, et servir d'argument concernant les rythmes en particulier.
    Très mauvais timing, de nombreux profs ont décidé de faire grève quand il n'y avait pas encore le 12 d'annoncé. Referont-ils une deuxième fois grève dans la foulée?!!!!!
    Très très mauvais timing.
    Après un à-peu-près 90% à Paris, on aura bien vite ri et relativisé les résultats du 31-01, puis du 12-02!!!
    Les chiffres ne permettront pas un bon décryptage et offrira le bâton pour se faire battre.
    Dé-ses-pé-rant...
    • Koikilensoi, le 30/01/2013 à 11:10
      Je rajoute: sur un sujet aussi important, avec autant de conséquences dans son contexte particulier, j'estime que c'est une faute, que les enseignants sauront reconnaître, avec de mauvaises conséquences pour tous:
      les syndicats ne tirent pas dans le même sens (grève sur des journées différentes!!!!!).
      Les enseignants ont des avis différents, mais vont dans le même sens: contre.
      C'est une faute majeur. Nous votons avec nos pieds (et notre porte-feuille). La désaffectation, le nombre de syndiqués en est une conséquence. 
      Tant d'enseignants non syndiqués pour ce type de raisons (j'entends les avis, sur le terrain!)!

      Nous sommes POUR le changement. Nous sommes CONTRE ce décret.
  • ColdTrukey, le 30/01/2013 à 09:21
    "On sera exigeant pour que le quotidien professionnel des enseignants change."
    Change en BIEN.
    Car avec le décret des rythmes tel qu'il va être appliqué dans de nombreuses villes, le quotidien des enseignants va changer :
    - ils seront toujours dans leur classe de 8h30 à 16h30 mais avec une pause méridienne de 2h45 et pour certains sans pouvoir disposer de leur classe.
    - ils seront là le mercredi matin et souvent le mercredi après-midi pour caser les animations pédagogiques et certaines réunions.
    Nous vous remercions pour votre exigence pour que le quotidien professionnel des enseignants change, mais, s'il vous plait, cessez peut-être de penser à nous aider de cette façon.
    Grâce à vous, nous avons eu :
    - les projets d'école (et lorsque l'on compare le temps passé à se réunir, à remplir des papiers et le résultat sur les enfants, c'est du gaspillage).
    - les livrets de compétences et les évaluations nationales (qui, associés à des programmes délirants, ont fait la preuve de leur inefficacité (merci PISA)).
    - et enfin le must, le corps des professeurs des écoles, pour lequel nous ne remercierons jamais assez nos syndicats. Nous sommes entrés dans la catégorie A. Total, nous avons perdu le logement et nous sommes moins bien rémunérés que des personnels de la catégorie C.
    Le changement, c'est maintenant.
    Merci pour votre aide.
  • pld22, le 30/01/2013 à 09:01
    "La situation de certains fonctionnaires mérite d'être revue", certes mais commençons donc par les catégories C de la fonction publique d'Etat : une secrétaire de direction d'EPLE qui gagne 1350€ mensuels avec un BTS, ça devrait faire réagir davantage surtout quand on prend en compte la technicité acquise (souvent en auto-formation) par ces personnels...
    Et là aussi, comme ailleurs, les montées en qualifications n'ont pas été suivies  par de meilleures rémunérations.
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