Concours 2013 : Les objectifs seront-ils atteints ? 

Alors que le ministère fait la promotion des nouveaux concours 2013, le secret reste absolu sur le nombre des candidats présents aux épreuves du premier concours 2013 qui ont eu lieu cet automne. Pourtant l'enjeu est de taille. Alors que le ministère lance deux vagues de recrutement massif d'enseignants, avec près de 20 000 postes proposés pour 2014, on aimerait avoir la certitude que le nombre de candidats est suffisant. Or il semble bien que cela ne puisse pas être le cas dans toutes les disciplines...

 

 Top secret. Travailler sur les concours de recrutement d'enseignants en France c'est se heurter au mur du silence. Inutile de demander à la rue de Grenelle les derniers chiffres des présents aux épreuves qui ont eu lieu de septembre à novembre 2012. Alors que le ministère lance le concours 2013-2, il se refuse à dévoiler les chiffres de 2013-1. On nous assure qu'ils sont à la hausse par rapport à 2012, ce que l'on veut bien croire au vu des inscrits. Car la question n'est pas là. Il y a des disciplines du secondaire où il n'y a aucun problème de recrutement et d'autres par contre où le manque de candidats est criant. C'est sur ces disciplines que portent les interrogations. Le silence ministériel est aussi nourri de la discrétion des universitaires. Inquiets pour l'avenir de leur filière ou la renommée de leur université, les responsables de formation des futurs enseignants se refusent aussi à communiquer leurs données dès qu'on se hasarde là où les problèmes existent.

 

C'est le cas en maths. Il faut se rappeler les chiffres de 2012. Cette année là pour 950 postes proposés seulement 652 candidats ont été admis. 75 d'entre eux ont aussi été reçus à l'agrégation. Au final, l'Etat n'a disposé que de 577 nouveaux enseignants pour remplir 950 postes. C'est à dire que seulement 60% des postes ont été pourvus. Alors que les concours 2013-2 vont s'ouvrir avec des épreuves orales en 2014, il n'est pas inutile de se souvenir que la sélection à ce concours ne s'est pas faite sur les épreuves écrites (20% d'échec seulement) mais sur l'oral. Le cas des maths est heureusement rare mais il n'est pas unique. En lettres et en anglais on n'est pas arrivé en 2012 à remplir les postes proposés. Cette situation peut-elle se retrouver en 2013 ?

 

"Je ne sais pas combien de postes seront proposés en 2013 mais vu nos flux actuels il est inutile de reprendre le nombre de 950", écrivait, en novembre 2012, J.-B. Hiriart Urruty, professeur de maths à l'université de Toulouse. Si ce chiffre paraissait inaccessible à ce responsable de formation toulousain c'est que le nombre de présents aux épreuves n'a cessé de diminuer en maths. Ainsi pour un nombre à peu près identique de 950 postes proposés, il y avait 1464 présents en 2012, 1285 en 2011, 3983 en 2006 et 7732 en 1999. En 10 ans le nombre de candidats présents aux concours a été divisé par cinq... Or le capes externe 2013 propose en fait 1315 postes , cafep inclus.

 

Quel vivier ? Cet effondrement reflète évidemment la perte d'attractivité du métier d'enseignant. Mais il résulte aussi de la baisse du nombre d'étudiants en licence de sciences. En 2004 on comptait encore 175 000 étudiants dans les filières de sciences fondamentales universitaires. En 2011, ils ne sont plus que 153 000. Le nombre de bacheliers S qui décide de s'inscrire en première année en université a chuté de 10% depuis 2000.  Et ce sont les moins bons élèves assure JL Piednoir, de la SMF. Les meilleurs optent pour les écoles d'ingénieurs et les CPGE et finiront en grandes écoles. La majorité des bacheliers S opte pour des études non scientifiques après le bac (42% seulement en sciences). Finalement le déficit de futurs enseignants résulte déjà de la crise du système d'orientation dans l'enseignement secondaire français qui fait de la filière S le passage obligé des bons élèves, qu'ils aiment les sciences ou pas.

 

"Les étudiants arrivent en L1 par défaut, après un refus d'inscription ailleurs. Le flux qui s'inscrit en préparation des concours depuis les écoles d'ingénieurs est très faible", nous a déclaré Aline Bonami, présidente de la Société mathématique de France. "Il n'y a pas le vivier correspondant aux postes mis aux concours". Bien que le concours en maths soit devenu nettement moins sélectif avec 1176 admissibles sur 1464 présents en 2012 et un taux d'admis de 42%, le nombre d'étudiants est trop faible par rapport aux recrutements envisagés.

 

Le pré recrutement est-il la solution ? "Il est urgent de demander une politique offensive de recrutement et de pré-recrutement très en amont des masters", écrit Nicolas Saby, président de l'Adirem. Il préconise de mettre le concours en L3. J.-B. Hiriart Urruty pense que le recrutement des emplois avenir professeurs pourra compenser la baisse du nombre de candidats. Aline Bonami ne partage pas cet optimisme. "C'est un espoir mais à condition d'en revoir le recrutement. Il ne peut pas être juste social. Il faut recruter des élèves ayant la possibilité de réussir le concours".

 

Si le cas des maths est particulier, la place de cet enseignement dans le système éducatif français l'est aussi. Si globalement le nombre d'inscrits aux concours augmente il n'est pas certain que le ministère trouve dans les disciplines où les besoins sont les plus importants ou l'attractivité des salaires de l'éducation nationale la plus faible, les candidats nécessaires au plan de recrutement Hollande. Or quand les professeurs de maths et de français manquent à l'appel, l'école est orpheline.

 

François Jarraud

 

 

La crise du recrutement


Par fjarraud , le mardi 15 janvier 2013.

Commentaires

  • Augustin, le 15/01/2013 à 09:11
    Je ne suis pas étonnée qu'en lettres classiques la crise se fait plus forte : ce que l'on demande au capes est bien trop éloigné de ce que l'on peut enseigner en classe à l'heure actuelle. Même si le latin ou le grec restent optionnels, il n'en demeure pas moins que l'élève doit connaître ses déclinaisons, apprendre ses leçons, sa conjugaison, et faire un peu de thème ou de version. Or aujourd'hui, je constate que ce n'est plus le cas partout. Je viens de faire un remplacement et j'ai constaté en tombant de haut que les élèves de 5ème ne maîtrisaient absolument pas leur grammaire latine et encore moins la grammaire française (niveau primaire).  En troisième, je me suis ennuyée à corriger des copies (35 élèves par classe) dont deux troisièmes, qui n'avaient pas le niveau requis pour se préparer au brevet. Nous sommes en janvier. Il y a un sérieux problème. Le métier de professeur n'existe plus tel que nous l'avons connu. Il est devenu le métier d'éducateur spécialisé lorsqu'il faut remédier aux problèmes de chaque élève aux graves difficultés d'apprentissage (précocité, lenteur, dyslexie) sans parler de certains qui sont a scolaire ou précoces dans leur comportement violent, a social. Certains élèves aussi  travaillent avec un ordinateur  et rendent leur devoir sur clef USB, car ne peuvent pas écrire avec un stylo,  et sont mélangés avec d'autres élèves qui travaillent bien. J'ai reçu une éducation où "on ne mélange pas les torchons et les serviettes" pour y voir clair et avancer. Nous ne sommes pas préparés concrètement à travailler, à enseigner à ces enfants là, je regrette. Trop d'hétérogénité est nuisible aussi bien pour le bon élève, que l'élève à difficultés et pour l'enseignant qui ne peut pas faire grand chose puisqu'il n'est pas formé par nos chers concours trop académiques, trop éloignés de la réalité du nouveau public.
    Avec un M2, j'aime trop l'école pour abandonner mais depuis 2000, je constate que les choses vont en empirant à cause de cette trop grande hétérogénité dans une même classe. Tout le monde en subit les conséquences et ce n'est pas agréable du tout (bavardages intempestifs, arrogance, chahut).
    Avec un M2,  je souffre d'être inadaptée pour l'enseignement, alors qu'il y a trente ans, j'aurais pu m'épanouir. Je préfère  donc donner des cours particuliers, c'est bien plus motivant pour les deux parties et plus intéressant au niveau intellectuel. Ce n'est plus le cas au collège par exemple. On nous tire vers le haut à bac plus 5 et il faudrait enseigner à des élèves qui n'ont pas du tout les codes scolaires. C'est nous, qui nous  éloignons de ce public car on ne nous forme pas à faire face à l'hétérogénéité. De plus en tant que contractuel, on nous met face à des classes difficiles alors que les lauréats eux sont parfois mieux lotis que nous puisque pour leur première année, ils peuvent échapper aux classes hétérogènes préparant le brevet ou le bac en plus. C'est illogique.
    Si je me réinscris au concours, dans lequel j'étais admissible, ce sera d'abord pour me maintenir au niveau intellectuel, au niveau de mes connaissances.  Et si par chance, je réussis le concours, je réfléchirais à deux fois avant de m'engager, même par temps de crise économique.
Vous devez être authentifié pour publier un commentaire.

Partenaires

Nos annonces