Un maitre en plus et des TICE, au service de la géographie  

Marc Degioanni aime la géographie, mais sait qu'elle est souvent un parent pauvre de l'enseignement à l'école élémentaire. Profitant de sa présence de "maitre supplémentaire", ses collègues et lui ont cherché l'efficacité en mobilisant les maigres ressources technologiques de l'école, en l'occurrence des ordinateurs plus âgés que les élèves... Magique ? Surement pas... Au bout d'un an, la richesse des outils produits rend compte de la mobilisation, et le recours au papier-crayon n'est jamais oublié quand il s'avère nécessaire... Cette démarche innovante est présentée au 5ème Forum des enseignants innovants les 1er et 2 juin 2012. 

Quelle a été l'origine (la personne, l'évènement, la rencontre...) de votre projet ? 

 Au départ, le projet repose sur le fait que je dispose de 3 heures en surnombre (un maître de plus que de classes). Ceci a permis de lancer le projet pendant les quatre premiers mois. Depuis janvier, les élèves étant davantage autonomes, ces heures sont utilisées pour une autre action, et le projet TICE-géographie suit son cours sans heure supplémentaire dédiée. En septembre 2011, l'analyse des besoins de nos élèves des cycle 3 montre que bien peu ont un usage autonome de l'ordinateur. Nous convenons, avec mes trois collègues, de ne pas organiser de séances "TICE", mais de proposer un apprentissage d'une des disciplines au seul moyen de l'ordinateur. Ainsi nous espérons mener de front les deux apprentissages, disciplinaire et  technologique, et en renonçant aux supports traditionnels on s'oblige à une forme nouvelle de relation pédagogique. Nous souhaitons donc expérimenter  de n'enseigner que par l'intermédiaire du numérique : en se donnant cette contrainte, on s'oblige à imaginer des solutions que nous n'aurions pas nécessairement choisies à priori. Le choix se porte sur la géographie pour plusieurs raisons :- il nous fallait une discipline avec un volume horaire limité, pas les maths ou le français, pour que les 3 classes puissent en bénéficier.-  la géographie est souvent une discipline que l'on n'a guère le temps de traiter valablement.- elle a souvent une image vieillotte et les TICE peuvent contribuer à la dépoussiérer- elle gagne à s'ancrer dans le local, ce que le manuel "national" ne permet pas, à la différence de nos productions- elle fait appel à des compétences verbales mais aussi non verbales, telles que le repérage spatial, domaine dans lequel les TICE et les SIG peuvent apporter un concours appréciable- cette initiative nous semble pouvoir être utilisée en l'état par des classes proches, et avec adaptation par des classes plus éloignées- j'ai une (lointaine) formation post-bac dans ce domaine et suis un utilisateur assidu des TICE dans plusieurs domaines et en tant que formateurNous a vons d'ailleurs gardé trace ce que nous en disions en septembre (
http://formation.eklablog.fr/geographie-au-cycle-3-ensemble-complet-d-activites-en-ligne-a4004750 ). 

Pouvez-vous décrire, du point de vue des activités menées avec les élèves, une situation dans laquelle vous avez vu un impact positif sur les apprentissages scolaires ou de la mobilisation des élèves ?  

Par rapport à la séance traditionnelle, qui s'appuie soit sur le manuel soit sur une documentation amenée par l'enseignant, nous avons pu constater davantage d'investissement dans les tâches proposées. Le binôme se connecte, prend connaissance du scénario, et se lance dans la réalisation en suivant le mode d'emploi. Ce sont les enfants qui interrogent l'enseignant. Ils constituent leur portfolio numérique avec les documents qu'ils produisent et s'approprient ; il n'y a pas de cours mais des séances où les élèves agissent à propos des documents proposés Selon vous, quel est/a été la plus belle réussite de ce que vous avez pu mettre en œuvre ?  Beaucoup de nos élèves sont issus de milieux modestes ou placés dans une institution. Voir un de ces élèves, dont le parcours scolaire n'est pas toujours facile, venir à posteriori demander des précisions sur un point abordé, ou encore se connecter de chez lui pour revenir sur une activité proposée n'est pas banal. Les activités en ligne permettent ce retour sur action... 

Et a contrario, une difficulté persistante, un écueil que vous n'aviez pas mesuré complètement ?  

Les TICE ont souvent un défaut, celui du papillonnage. On survole, on agit, on produit, mais structure-t-on suffisamment ? Aussi le "tout-numérique" a-t-il parfois laissé entrevoir des limites ; il a d'ailleurs ponctuellement été complété par du "papier-crayon". Par ailleurs, nous avons dû renoncer à l'usage si commode et performant des fichiers .kml/.kmz, car Google Earth, aux potentialités pédagogiques énormes, ne passe pas sur notre parc de 16 PC datant de … 2002 !  

Pouvez-vous nous faire partager une anecdote significative d'un comportement, d'une réaction d'élève(s) au cours d'une des phases de votre travail ?  

Dans une séance (
http://formation.eklablog.fr/l-eau-seance-4-a5665795 ), il s'agissait de terminer ce diagramme du débit de "notre" rivière locale. A cette occasion sont remontées à la surface des erreurs d'interpolation, même en CM2 ; une régulation mathématique s'est avérée nécessaire ; ensuite, l'interprétation du résultat obtenu n'a pas été simple : si la fonte des neiges est connue, en revanche la cause de l'étiage d'hiver par exemple l'est moins. Avoir produit un schéma, c'est bien, l'expliquer c'est mieux... Alors on se rend compte que  ce qu'on croit bien connu (les caractéristiques des saisons, par exemple) ne l'est pas nécessairement. Innovation et retour aux fondamentaux donc. 

Si c'était à refaire, pouvez vous citer une phase du projet que vous pourriez modifier pour le rendre plus "efficace" pour les élèves ?  

L'an prochain, en étant allé au bout du tout-numérique, il faudra  sans doute mieux articuler supports traditionnels et supports numériques. On projette aussi d'intégrer une démarche d'auto-évaluation des acquis, notamment en produisant des contenus interactifs (voir par exemple
http://data0.eklablog.fr/ce1/perso/probleme/index.html ). Enfin l'usage de Google Earth sera recherché, au pire en vidéo-projection (on reviendrait là à une forme de cours, de démonstratif, ce qui n'était pas souhaité au départ, mais contraint par notre matériel limité) car l'outil facilite la relation réel/représentation du réel 

Un point de vue, une remarque que vous souhaiteriez partager avec les lecteurs du Café Pédagogique ?  

Au final, des élèves qui ont une autre image de la discipline, un certain nombre d'acquis notamment méthodologiques (légender une carte, construire un diagramme pluvio-thermique...), mais aussi les items du B2i presque tous validés au passage (sauf e-mail), une cohérence de cycle et un moment de respiration dans la semaine où "on travaille autrement", tout ceci donne envie de continuer. Quelques collègues extérieurs à l'école utilisent d'ores et déjà notre support en ligne ; le travail de conception est assez lourd et on pourrait imaginer que des contributions extérieures enrichissent le projet (améliorations, production de thèmes non encore traités et déclinaisons locales des thèmes traités). Lecteurs, à vos marques... 

Propos recueillis par Marcel Brun 

Par fjarraud , le vendredi 25 mai 2012.

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