Le changement ? 

 

 

 

Par François Jarraud

 

 

L'élection présidentielle est-elle importante pour l'Ecole ? Ou celle-ci est-elle à l'abri de transformations profondes ? La question fait débat chez les commentateurs.

 

Pourtant la campagne électorale des présidentielle s'est ouverte sur le thème de l'éducation avec deux importants discours à Orléans, pour F. Hollande, et Montpellier, pour Nicolas Sarkozy. Lors du dernier débat électoral encore, les deux candidats ont pu exposer leurs vues sur l'Ecole avec des propositions qui sont bien différentes.

 

S'il y a débat ce n'est pas tant sur les différences des programmes que sur la capacité à réformer. " Aucun des candidats n’a promis de révolutionner (l'école)", souligne par exemple Emmanuel Davidenkoff sur France Info. Il relève aussi que Nicolas Sarkozy fait des promesses mais ne les tient pas. A l'appui de cette thèse on pense à toutes les pesanteurs d'une administration qui compte près d'un million de fonctionnaires et dont les règles de fonctionnement ont plus d'un demi siècle. Comment faire bouger un si gros corps ?

 

Pourtant Nicolas Sarkozy l'a fait d'une manière plus profonde qu'il n'y parait peut-être. Pas uniquement dans les règles administratives comme la nouvelle gouvernance académique ou l'évaluation des enseignants par les chefs d'établissement. Ce qu'a profondément changé le quinquennat Sarkozy c'est plus les principes qui gouvernent l'Ecole que son fonctionnement administratif.

 

C'est aux valeurs de l'Ecole que N Sarkozy s'est attaqué de façon frontale. D'abord en prolongeant jusqu'au bout le combat contre "le pédagogisme" initié par Jacques Chirac. Si, dans son dernier discours, N Sarkozy se félicite de la suppression des IUFM, c'est bien que, si la structure existe encore, leur position et celle des sciences de l'éducation dans la formation des enseignants sont profondément modifiées. A la place, la droite a rétabli l'instruction civique, la morale, la transmission frontale en amphithéâtre, et aussi l'autoritarisme des petits chefs comme mode de gestion de la maison Education.

 

Le retour des pratiques pédagogiques traditionnelles, l'autoritarisme dans l'application des réformes, ces réformes elles-mêmes dictées par des objectifs budgétaires et qui obligent les enseignants à mal travailler , tout cela a dégradé profondément le travail enseignant. On citera en exemple la façon particulièrement brutale dont l'aide individualisée au primaire, une pratique dont les enseignants sentent que bien  souvent elle trompe les parents et les enfants, a été imposée. A beaucoup d'endroits, les réformes Sarkozy ont été vécues comme une rupture dans le métier . Cela a conduit de nombreux enseignants à se replier sur eux-mêmes. Pire encore, N Sarkozy a institué partout dans le système éducatif la concurrence entre établissements et entre enseignants. L'assouplissement de la carte scolaire est le moteur de changements brutaux de comportement chez les parents mais aussi chez les enseignants obligés de réagir à la mise en concurrence.

 

On voit clairement vers quel modèle d'école va N. Sarkozy. C'est celui de l'Angleterre ou des Etats-Unis. Une école pilotée par des évaluations imposées comme objectifs à des enseignants prolétarisés intellectuellement avec une mise en concurrence des établissements dès le primaire. Cette école des inégalités accrues est maintenant contestée par des enseignants qui en voient les effets pervers.

 

Alors si le quinquennat Sarkozy a effectivement "levé les verrous", pour reprendre une expression que l'on entend chez les partisans du président sortant, l'enjeu de ces élections , c'est de savoir si la porte va tomber. Et c'est un vrai enjeu de société pour l'Ecole et pour la société dans son ensemble.

 

 

 

 

Par fjarraud , le vendredi 04 mai 2012.

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