Brevet : Thierry Cadart : " Non les élèves de cette année ne sont pas plus faibles que ceux de l'année dernière" 

 

 

 

Par François Jarraud

 

L'éducation nationale est-elle malade de ses examens ? Il y a-t-il une baisse du niveau du brevet ? Comment expliquer qu'il y ait moins de reçus aux concours d'enseignants que de postes ? Pour Thierry Cadart, secrétaire général du Sgen Cfdt, ces événements sont l'occasion de revenir sur les choix d'évaluation et de proposer des évolutions pour le système éducatif.

 

Selon le Snes, des consignes d'indulgence auraient été données aux jurys du brevet. Avez-vous recueilli des témoignages en ce sens ?

 

 Nous n'avons aucune information en ce sens. Par contre ce qu'on peut mettre en cause c'est le manque d'accompagnement des enseignants dans la procédure de mise en place du livret personnel de compétence (LPC). De nombreux collègues l'ont découvert en janvier et ont du le valider ce qui est assez compliqué (NDLR : le LPC compte 98 items). Cette mise en oeuvre chaotique fait que l'on a nous aussi une vraie interrogation sur le sérieux que le ministère accorde à cette évaluation. Le choix de maintenir le brevet classique fait que les enseignants sont dans une situation intenable de confusion qui les met dans l'embarras.

 

Ce que vous critiquez c'est le LPC ou le manque d'accompagnement lors de son déploiement ?

 

L'idée du livret est bonne. C'est un bon outil, indispensable pour s'approprier le socle commun, qui peut être amélioré et surtout qui aurait du bénéficier d'un accompagnement lors de sa mise en oeuvre. Pour nous il ne faut pas renoncer à cette idée. Il semble que la tentation soit forte, surtout chez les opposants au socle commun, de remplir le livret à la va-vite. Mais c'est le ministère qui est responsable. On maintient que ne pas se fixer comme objectif  le socle commun c'est fuir les difficultés du collège tel qu'il est.

 

Certains ont critiqué également la note d'histoire des arts et celle de vie scolaire. Qu'en pensez-vous ?

 

La note de vie scolaire ne correspond à rien et pour nous il faut clairement la supprimer. Croire que l'on peut évaluer avec une note l'implication dans la vie de l'établissement, l'apprentissage de l'autonomie, la qualité des rapports entre les personnes c'est caricatural. Mettre des notes partout également. Ca ne fait que rendre plus urgent le débat sur l'intérêt des notes par rapport à d'autres types d'évaluation.

 

Faut-il redessiner le brevet ?

 

Lors d'une réunion du CSE en juin 2010, on a dit que le gouvernement faisait le choix de ne pas faire de choix en entassant le mode d'évaluation traditionnel du brevet avec le livret de compétences. Cette situation est mauvaise : c'est trop de travail pour les collègues et l'examen est devenu illisible. Il faut choisir d'appliquer ou non le socle commun. Nous aimerions que le ministère fasse le choix de l'appliquer.

 

Que répondez-vous à ceux qui parlent d'une baisse du niveau du brevet ?

 

Non les élèves de cette année ne sont pas plus faibles que ceux de l'année dernière. Ceux qui pensent que pour qu'un examen ait de la valeur il est nécessaire qu'il y ait un fort taux d'échec ont une conception fausse de ce qu'est un système éducatif.

 

La question se pose également pour les concours. Cette année, le nombre de reçus à plusieurs concours d'enseignants est inférieur au nombre de postes. Comment expliquez-vous cela ?

 

C'est très localisé selon les disciplines. Cette année on a eu une année très particulière avec deux concours dans l'année. De ce fait il y a une  baisse du nombre des inscrits. Il y a quand même un paradoxe dans la position des jurys car ils savent bien qu'à la place des candidats qu'ils ont refusé, le ministère va recruter des vacataires qui seront souvent ceux qu'ils ont refusé... Ce qu'il faudra observer c'est l'évolution du nombre d'inscrits cette année. Si la chute continue c'est que l'attractivité du métier aura été atteinte. Et cela aura des conséquences sur la qualité du recrutement. 

 

N'y a-t-il pas un décalage entre le niveau de diplôme exigé (les masters) et les salaires des futurs enseignants ?

 

Pour le moment les concours bénéficient du taux de chômage du fait du ralentissement économique. S'il se confirme que le nombre de candidats est trop bas ce sera la touche finale donnée à l'échec généralisé de cette réforme. On prétendait améliorer l'attractivité du métier avec la masterisation et la revalorisation en début de carrière. Il semble que les étudiants ne soient pas prêts à troquer des conditions d'entrée dans le métier très pénibles, avec de fortes charges de travail sans formation, contre ce petit gain. On sait d'ailleurs que la situation sera pire encore à la prochaine rentrée du fait de la réduction des moyens.

 

Le président de la République avait promis de revoir cela. Il y a t-il des avancées en ce domaine ?

 

Il n'y a rien de concret. Les masters en alternance recyclent simplement le fait que des assistants d'éducation préparent le concours. Ce n'est pas une réelle mise en place d'une autre formation. La réforme n'est pas pilotée. Personne ne la porte.

 

Propos recueillis par François Jarraud

 

 

 

 

 

 

Par fjarraud , le mardi 12 juillet 2011.

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