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Editorial : L'élève et le système 

Quelleplace pourles ados à l'école ? Photo Morguefile
"Près d'un million de lycéens se sont exprimés démocratiquement lors de ces élections (aux conseils des délégués pour la vie lycéenne). Ce chiffre, en progression de plus d'un point par rapport au taux de participation des précédentes élections de 2004 (46,77 %), démontre l'attachement croissant des élèves à la vie lycéenne". Dans l'actualité de ce jour, ce satisfecit du ministère se heurte au démenti de l'Union nationale des lycéens qui " appelle le Ministre à sortir du silence, et à faire en sorte que la voix des lycéens puisse être enfin réellement entendue".

S'il ne nous appartient pas de trancher ce débat (ce sont peut-être les tribunaux qui le feront), il est révélateur d'une appréciation très différente de la place de l'élève au sein de l'institution scolaire.

Force est de remarquer que symboliquement, les ministres de droite, de Ferry à Robien, l'ont fait régresser en dénonçant le "jeunisme" et "l'esprit de 68" et en revenant sur la loi de 1989 qui avait mis l'élève "au centre" du système éducatif. Dans la loi Fillon de 2005, c'est probablement le "socle commun" qui a pris la place centrale de l'élève. Parallèlement d'autres textes ont réduit ou carrément ignoré la représentation des élèves dans les instances des établissements. Quant à ceux qui garantissent le droit d'expression des élèves, force est de constater que leur application se heurte encore à de nombreux obstacles dans les établissements. La reconnaissance de ces droits ne fait pas l'unanimité dans le système éducatif.

On constate une évolution similaire dans l'appréhension du problème de la violence scolaire. En dehors de déclarations assez naïves sur les bienfaits d'une mixité relative, le communiqué ministériel de ce jour aborde ce sujet essentiellement sous l'angle de la sécurité des adultes. S'il faut évidemment protéger les personnels, il faut rappeler que les élèves sont les premières victimes de cette violence et qu'ils devraient avoir droit aux préoccupations ministérielles à égalité avec les adultes. Enfin, le discours ministériel ignore totalement les violences générées par l'institution scolaire elle-même. Pourtant "L'élève humilié" décrit par Pierre Merle existe bien...

Ces glissements n'arrivent pas par hasard. Ils s'appuient sur une construction idéologique assez cohérente qui redéfinit l'enseignement comme un moment de transmission de connaissances, l'élève comme bénéficiant d'une "égalité des chances" et l'échec comme le mauvais résultat d'un programme personnel. Bruno Mattei dans Libération montre clairement, à propos de l'égalité des chances, comment cette notion sert un projet social et politique conservateur.

Comment alors accueillir le voeu d'une formation éthique des enseignants émis par le Haut conseil de l'éducation ? "L'enseignant fait preuve de conscience professionnelle et suit des principes déontologiques : il respecte et fait respecter la personne de chaque élève, il est attentif au projet de chacun, il respecte et fait respecter la liberté d'opinion, il connaît et fait respecter les principes de la laïcité, il veille à la confidentialité de certaines informations concernant les élèves et leurs familles, etc.".


Par  François Jarraud , le mercredi 08 novembre 2006.

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