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Editorial : Toujours la carte scolaire  

Trouver sa place... Photo Morguefile
Les Français sont-ils favorables à "l'assouplissement" de la carte scolaire ? Oui et non répondent les sondages. Selon un sondage du 11 septembre Ifop pour Valeurs actuelles, 73% des français sont favorables à sa suppression, et cela tous milieux sociaux confondus. Que nenni répond un autre sondage, réalisé par Louis Harris pour "20 Minutes" et RMC le 15 septembre : 50% des français sont favorables à son maintien, 42% jugent la carte négativement.

Pendant ce temps les déclarations politiques continuent. Dans une tribune du Monde, le ministre de l'intérieur affirme son intention de la faire disparaître. "La carte scolaire, qui était effectivement autrefois l'outil de la mixité, est devenue l'instrument de la ségrégation. Face à cette situation, certaines familles peuvent s'émanciper de la carte scolaire en faisant le choix du privé, en s'installant dans des quartiers huppés, ou tout simplement en contournant la carte par la mobilisation de leur réseau relationnel. 30% des enfants sont ainsi scolarisés en dehors de leur collège de rattachement. Les autres sont tenus de se plier à une règle qui vaut pour les uns, mais pas pour tout le monde. Cette réalité est choquante".

Et le ministre lie la suppression de la carte à l'autonomie des établissements et à un système d'évaluation à l'anglaise. "Qui dit autonomie dit évaluation. Je propose que nous nous dotions d'un organisme d'évaluation de chaque établissement scolaire. Il doit s'agir d'évaluations détaillées, allant bien au-delà de la seule mesure des résultats des élèves, et s'intéressant également à la qualité du projet éducatif, à sa capacité à faire progresser tous les élèves, à l'ambiance au sein de l'établissement, etc. Ces évaluations aideront les établissements à remédier à leurs insuffisances. Elles seront évidemment à la disposition des parents".

Il faut quand même noter que si les parents britanniques ont accès aux inspections d'établissement, d'une part les procédures d'inscription des élèves ont été récemment modifiées pour éviter les pratiques discriminatoires, d'autre part le système scolaire britannique est infiniment plus complexe que le français puisqu'il offre une gamme d'une dizaine de types d'établissements différents avec une offre éducative qui est tout sauf nationale et uniforme. Ajoutons qu'il a ses faiblesses, par exemple un taux de décrochage record en Europe que les sanctions financières (autre mesure envisagée par le ministre) et même l'emprisonnement des parents n'arrivent pas à faire baisser.

Des voix se font entendre également pour critiquer l'impact même du contournement de la carte scolaire. Si 30% des élèves dérogent à certains endroits à la carte, remarque Louis Maurin, " sur ces 30 %, les 20 % sont des familles qui optent vers le privé et pour qui la suppression de la carte scolaire, par définition, ne change rien. Il reste 10 % de dérogations, 8 % à Paris... Ces passe-droits sont choquants. Est-ce suffisant pour abandonner la carte scolaire ? Raison médicale, frère, soeur ou parent inscrit dans l'établissement, proximité du domicile, les raisons de ces dérogations peuvent être nombreuses. Rien ne dit que toutes sont injustifiées. Admettons que la moitié des dérogations - ce qui est déjà une forte proportion - le soit : on compterait au total 5 % de « tricheurs ». Lever l'hypocrisie consiste donc à généraliser une pratique très minoritaire". Et de contre attaquer : " Le réel problème de l'école aujourd'hui, c'est qu'elle est pour une bonne part formatée sur le modèle des catégories favorisées : importance démesurée accordée aux humanités contre les techniques, orientation de plus en plus précoce, qui dirige les enfants (fils et filles de catégories populaires) vers les filières qui leur sont prédestinées, évaluation trop fréquente et peu formatrice qui fragilise les plus fragiles, jusque l'introduction d'une « note de vie scolaire » pour stigmatiser encore plus les enfants en difficulté, inégalité considérable de moyens entre université et grandes écoles, etc. Depuis plus de dix ans, les politiques éducatives vont à l'inverse de l'égalité des chances".

Gilles de Robien a annoncé qu'il recevrait les syndicats et les associations de parents sur ce sujet à partir du 20 septembre.
Article du Monde
Article de L. Maurin


Par  François Jarraud , le lundi 18 septembre 2006.

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