Evaluations et « évaluationnite »

Ou ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain

La mise cause – en  Angleterre même – d’un système anglais d’évaluation de fin de primaire aboutit à condamner "la tentation du pilotage par l’évaluation". Certes s’il s’agit de dénoncer la tentation simpliste d’une sorte de pilotage automatique à partir d’une batterie de tests (avec le risque de testage, comme on parle de bachotage), tentation technocratique, dont il reste cependant  à démontrer le danger imminent, on ne peut qu’être d’accord. Mais s’il s’agit d’affirmer l’excellence du pilotage à vue et de la navigation à l’estime et de jeter par-dessus bord tous ces indicateurs inutiles (à commencer, bien sûr, par ces honnis indicateurs bac), il est à craindre que beaucoup d’établissements s’échouent sur les bancs mouvants de la rumeur !

Quand des enseignants, des parents d’élèves, des chercheurs même, confondent Base élèves et Edvige, quand les mêmes ou d’autres font échec à un questionnaire (anonymé) aux élèves lié à des évaluations d’un échantillon de classes de CM2, quand les mêmes ou d’autres tentent de mettre en échec le suivi de cohortes, la crainte serait plutôt inverse : celle d’une montée de l’obscurantisme !

L’évaluation est non seulement utile, elle est indispensable. La reddition de comptes comme disent, je crois, les québécois, le fait de rendre des comptes, est un devoir en démocratie. Les chercheurs doivent pouvoir nourrir leurs recherches de données fiables et d’enquêtes, sans être soupçonnés de vouloir procéder à un fichage des élèves. Et, dans la mesure où on ne considère pas l’enseignement comme l’exercice individuel d’une profession semi-libérale, les équipes éducatives ont besoin d’outils pour évaluer l’impact de leur action.

Et ce qui est en cause en Angleterre, ce n’est pas l’évaluation, mais comment on la fait et ce qu’on en fait !

J. F. Launay